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James White, le retour

Publié le 08 novembre 2007 par Smaël Bouaici

James White était à Paris et en tournée dans toute l’Europe le mois dernier. L’occasion de revenir sur la vie du plus célèbre des musiciens de la No Wave.

Comme un ouragan, le revival a dévasté quasiment toutes les années 80. Ne manquait plus que la no-wave, un des courants les plus dignes d’une époque tourmentée. Son représentant le plus illustre s’appelle James White, saxophoniste et leader du groupe le plus emblématique de cette période, les Contortions. Il jure pourtant qu’il n’avait rien à voir avec cette histoire…

Coincée entre le punk décadent et la new wave, la no-wave est un condensé des 70’s. Un amateurisme revendiqué (les keupons), des structures minimalistes (les Stooges), une pointe arty (le Velvet Underground), et du jazz pas vraiment free mais bien trippé (Sun Ra). En 1978, Brian Eno s’intéresse à l’activité du Lower East Side de la Grosse Pomme, et sort la compile No New York, qui sera à la base de l’appellation. Sur le disque figurent des pionniers qui n’avaient pas certainement pas conscience de leur statut, Teenage Jesus and the Jerk, James Chance & The Contortions et DNA, avec Arto Lindsay à la guitare.

Dés le départ pourtant, James White nie toute appartenance au mouvement. « A dire vrai, je ne me suis jamais considéré comme faisant partie de la no-wave. C’est un concept inventé par les journalistes pour nous mettre dans une case. Le seul lien, c’est l’amitié. DNA, les Contortions, Mars étaient tous mes amis. Mais j’ai toujours pensé que ma musique était différente ».

Après une formation au conservatoire, il arrive à New-York en 1975 sous le nom de James Chance, avec l’ambition de faire résonner le jazz dans son sax. Une ambition vite revue à la baisse puisqu’il entre dans un groupe de rock nommé Gap. Suivent quelques sessions au CBGB, avant de s’acoquiner avec les Teenage Jesus & The Jerks, qu’il quitte vite pour former The Contortions.

Après la sortie de No New York, les Contortions signent un premier album pour le label Ze Records de Michael Zilkha et Michel Esteban, Buy The Contortions en 79. « C’étaient les premières personnes à m’approcher. Avant il n’y avait eu que des escrocs ou des gens à mauvaise réputation. Michael avait de l’argent et il voulait produire quelque chose. Il était d’accord pour signer les Contortions mais il voulait qu’on fasse un morceau de disco ! Et il ne rigolait pas. Il a donné l’argent et il ne s’est jamais pointé au studio ». Le studio en question est celui de Bob Blank, le Blank Tape Studio. « Les gens réalisent seulement maintenant sa contribution créative à la musique. Quand j’ai enregistré mon premier disque, je n’avais aucune expérience des studios d’enregistrement. J’y étais passé deux fois dans ma vie! Il m’a beaucoup aidé sur le plan technique ».

“Je détestais ce public de prétentieux. C’est une des choses qui m’a poussé à arrêter, ça m’emmerdait vraiment…“

Ze héberge aussi son album solo Theme From Grutzi Elvis, le dernier sous le nom de Chance. Il évolue désormais avec les mêmes musiciens sous le nom de James White & The Blacks, et l’album Off White, qui mixe disco funk et free jazz marque le changement de style. Jusqu’ici, tout semble rouler. En fait, James ne se sent pas bien dans ce milieu. « C’était un truc un peu arty que j’essayais de rendre dansable, le tout devant un public de journalistes. Je détestais vraiment ce public de gens prétentieux. C’est une des choses qui m’a poussé à arrêter, ça m’emmerdait vraiment. J’ai toujours voulu élargir mon audience ».

Et puis pour le saxophoniste de haut-niveau qu’est White, l’amateurisme de ses collègues avait de quoi lasser. « Tous les musiciens étaient nuls. Ils ne s’entraînaient jamais sur leur instrument. J’aimais bien parce que c’était frais. Des gens comme ça sont parfois plus intéressants que des musiciens professionnels. Mais ils étaient limités. Je ne pouvais pas leur imposer des structures trop complexes. Ils ne savaient déjà pas lire la musique alors la jouer… Ils n’avaient pas de technique, la plupart venaient du rythm’ n blues et du rock. Eux faisaient vraiment partie de la no wave. ». L’héroïne aidant, James White se retire peu à peu de Ze et de la scène no wave. « Après 1984, la mode et l’underground avaient changé. Je n’avais plus rien à voir avec ce milieu. Michael avait aussi des problèmes d’argent et j’ai fait une petite pause. »

Une pause qui passe par Los Angeles, où il monte un groupe avec Flea des Red Hot Chili Peppers, et qui se prolonge jusqu’en 1996, date de sa réapparition officielle, avec les Flaming Demonics chez Warner. Alors que lui inspire le revival no-wave du moment et la réactivation de ZE Records en 2002? « Je suis content bien sûr, pour la reconnaissance de notre travail de l’époque. Et puis ce fut le dernier soupir de la scène new-yorkaise comme on l’a vécu. Après la no-wave, New York est devenu beaucoup plus commerciale. La ville a beaucoup changé mais pas pour le mieux. »

A écouter

Buy The Contortions (ZE 1979)

Off White James White & The Blacks (ZE 1980)

Saxmaniac James White (Warner 1982)

Compilation Mutant Disco (ZE 2004)

New York No Wave (ZE 2004)


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