Magazine Culture

Poezibao a reçu n° 147, dimanche 24 octobre 2010

Par Florence Trocmé

Cette rubrique suit l'actualité éditoriale et présente les derniers ouvrages reçus par Poezibao. Il ne s'agit pas de fiches de lecture ou de notes critiques et les présentations font souvent appel aux informations fournies par les éditeurs.
*Franck Venaille, C'est nous les Modernes, Flammarion
*Attila József, Ni père ni mère, Éditions Sillage
*Israël Eliraz, et tout cela pour dire ose, José Corti
*James Sacré, America solitudes, André Dimanche éditeur
*Keith Waldrop, Le vrai Sujet, José Corti
*Claudia Rankine, si toi aussi tu m'abandonnes, José Corti
*Cole Swensen, L'Âge de verre, José Corti
*Luís Aranha, Cocktails, La Nerthe
*Sérgio Milliet, Poèmes modernistes & autres écrits, La Nerthe
*Revue Rehauts, n° 26
*Irène Dubœuf, La Trace silencieuse, Voix d'Encre
*Marcel Migozzi, Cité aux entrailles sans fruits, Gros Textes
*Françoise Parker, La Griote de Montpellier, Manoirante
*Laurence Bouvet, Unité 14, L'Harmattan

informations détaillées sur tous ces livres en cliquant sur "lire la suite....)

Franck Venaille
C'est nous les modernes
Flammarion, 2010
18 €
" Livre bien peu banal à vrai dire que celui de Franck Venaille, à mi-chemin d'un art poétique (dont il n'aura cessé depuis Construction d'une image (1977) de redéfinir les termes) et d'une ″histoire secrète de la poésie contemporaine″ que personne ne se risque à écrire mais dont il nous livre ici quelques fragments épars, à son inimitable manière (″en venaille″ comme il le dit lui-même). C'est-à-dire avec une liberté de ton et d'esprit qui lui permet de revenir sur ses écrivains phares (Jouve, Laforgue, Morhange), mais aussi de saluer les contemporains qu'il estime. Cette galerie de portraits éclectiques est entrecoupée de digressions plus personnelles, où Venaille revient sur son propre parcours et réfléchit sur l'idée finalement très singulière qu'il se fait de la poésie, travaillant comme il l'écrit ″avec des mots sans âge, parfois défigurés au cours des nombreuses guerres du langage″. Ce livre généreux, ironique parfois, éclaire subjectivement tout un pan du paysage poétique contemporain. C'est aussi - et peut-être d'abord - une introduction à l'œuvre d'un poète majeur de notre temps " (Prière d'insérer)
Attila József
Ni père ni mère
Traduit et présenté par Guillaume Métayer
Éditions Sillage, 2010
On peut lire dans Poezibao des extraits de ce livre, la fiche bio-bibliographique d'Attila József et un entretien avec le traducteur, Guillaume Métayer, à propos du poète, de ce livre et de façon plus générale la poésie hongroise moderne.
Israël Eliraz
et tout cela pour dire ose
José Corti, 2010
16 € - sur le site de l'éditeur
" se passe trop dans
peu de choses (feu
à la cuisine, insectes
au jardin)
c'est l'heure où poires sont pommes
est-ce une sérénade qui s'amplifie
dans les lointains ?
"
Lire d'autres extraits de ce livre dans Poezibao.
James Sacré
America Solitudes
André Dimanche éditeur, 2010
27 €
Parfois rencontre d'un Français, Jean-Jacques Audubon souvent
Avec son prénom en anglais tordu tout autant
Que l'aile ou le cou de ses oiseaux peints ;
Ou bien c'est Lafayette arrivé par loin
Du petit port de Georgetown belles maisons
[...]
Un gros recueil de près de 350 pages de poèmes dans lequel l'Amérique est le prétexte à l'écriture. On peut rappeler que James Sacré à longtemps travaillé aux États-Unis, à l'université Smith College. Poezibao publiera prochainement une note de lecture sur ce livre.
Keith Waldrop
le vrai sujet
Interrogations et conjectures de Jacob de Lafon avec choix de poèmes
Traduction Olivier Brossard
coll. série américaine, José Corti, 2010
15 €
En 2004, Keith Waldrop publie un livre au titre étrange pour un lecteur français : The Real Subject: Queries and Conjectures of Jacob Delafon. Le vrai sujet : Interrogations et conjectures de Jacob de Lafon est une séquence de poèmes en prose, méditations poétiques, drôles, absurdes, mais aussi tristes et mélancoliques du " héros " Jacob Delafon à qui Keith Waldrop a prêté vie.
Fils de R. Mutt (signature apposée par Marcel Duchamp sur son célèbre urinoir), le héros Jacob Delafon est une sorte de pied nickelé américain, n'oubliant jamais l'origine modeste, prosaïque et sanitaire de son nom ; mais c'est un pied nickelé rêveur qui se perd en " conjectures et interrogations ", à la recherche (illusoire) du " vrai sujet " qu'il ne trouvera d'ailleurs pas, le livre se terminant sur une phrase inachevée et le mot " surprise ". Le vrai sujet est une quête - si absurde soit-elle, la vérité en prenant pour son grade dès les premières pages. C'est une quête qui, consciente de sa propre absurdité, la met en scène dans de nombreux passages très drôles. Et pourtant " profonds " aussi, si l'on décide d'y voir les nombreux échos à la littérature, philosophie et aux Écritures qui ponctuent les textes.
Bréviaire de l'apprenti philosophe de waters, Le vrai sujet présente au lecteur les pensées d'un personnage qui refait le monde et, pendant qu'il y est, le langage - alors même que son patronyme devrait l'inviter à une prudente modestie. Le personnage - anobli dans la traduction française, de " Delafon " à " de Lafon ", pour des questions de copyright - est un funambule qui avance en vacillant sans cesse entre grotesque et beauté, humour et gravité, rire et larmes. On commence la lecture du livre par une réflexion sur le nom du " bousier ", jugé répugnant par Jacob. C'est pourtant cet insecte qui va mener, une page plus loin, au premier poème en vers du recueil, " Bourdonne ", premier moment " poétique ". Le mouvement est ainsi lancé : du laid au beau, et retour. ( sur le site de l'éditeur)
Claudia Rankine
Si toi aussi tu m'abandonnes
Traduction Maïtreyi et Nicolas Pesquès
coll. Série américaine, José Corti, 2010
16 €
Quatrième livre, mais premier à être traduit en français, de Claudia Rankine, auteure américaine, Si toi aussi tu m'abandonnes relève d'un genre inventé et développé aux États-Unis : la " documentary poetry ". Claudia Rankine se l'est approprié pour créer un texte d'une grande originalité.
À la fois autobiographie et chronique des années Bush, Claudia Rankine y sonde ce qui ronge et, à proprement parler, infecte la vie aux États-Unis: la télévision, la publicité − notamment celle pour les médicaments − et une justice en général à deux vitesses selon la qualité et la couleur des suspects. Mais parce que tout ce qui l'affecte l'isole, elle ressent aussi la solitude comme une conséquence de sa sensibilité.
Claudia Rankine est virulente mais profondément humaine ; elle porte un regard acéré, à la fois critique et drôle, mais sans cynisme, sur cette Amérique surconsommatrice d'images et de pharmacopées. Elle traverse drames nationaux et dépressions familiales avec une lucidité engagée et un humour radical qui rendent sa poésie neuve et attachante.
Claudia Rankine est née en 1963 en Jamaïque. Elle enseigne à l'université. ( site de l'éditeur)
Cole Swensen
L'âge de verre
Traduit de l'anglais par Maïtreyi et Nicolas Pesquès
coll. Série américaine, José Corti, 2010
14 €
Deuxième livre de l'auteur à paraître chez Corti - après Si Riche Heure en 2007 -, L'Âge de Verre retrouve le rythme de vers coupé qui est sa signature mais en alternance cette fois avec de brefs blocs de prose. L'auteur parcourt ainsi à sa façon l'histoire du verre et donc, surtout, celle de la fenêtre : tant l'invention de l'objet et ses conséquences sur le regard que nous portons sur le monde, que la représentation qui en est faite depuis la Renaissance. La peinture s'étant emparée de la fenêtre pour en faire son deus ex machina : la source de toute mise en scène, cadrage et perspective.
Raison pour laquelle cette histoire s'entretisse avec celle de Bonnard - le peintre des fenêtres s'il en est - poursuivant en sa compagnie, de vitre en reflet et réciproquement, une réflexion sur la réflexion. Poème de la traversée de la transparence et de ce qui la procure, ce livre noue et dénoue ce qu'il en est de la vue et de la vision, de l'intensification des diverses modalités du voir. ( sur le site de l'éditeur)
Luís Aranha
Poèmes choisis, suivi d'une étude par Mário de Andrade
Choix, traduction du brésilien, présentation et notes par Antoine Chareyre. La Nerthe, 2010
20 €
Luís Aranha (1901-1987) fut un poète brésilien précoce à la carrière fulgurante. Il commence, en effet, à publier en 1922 et cessera toute activité littéraire après 1924 pour faire des études de droit avant de commencer une carrière diplomatique. Il est immédiatement salué par Sérgio Milliet (qui le traduit en français) et Mário de Andrade. Il participe à la fameuse Semaine d'Art Moderne de février 1922 au Théâtre Municipal de São Paulo, session inaugurale de la modernité brésilienne. Présent aussi lors de la réception de Cendrars (Aranha est un des dédicataires de ses Feuilles de route). Durant cette courte période d'activité littéraire, il publiera uniquement en revue, notamment dans l'emblématique revue Klaxon.
Poète audacieux, volontiers provocateur et hyperbolique, ce qui l'inscrit dans l'histoire d'autres jeunesses tumultueuses de poètes européens (qu'ils soient futuristes, dadaïstes ou surréalistes) ayant aussi eux-mêmes cessé toute activité poétique pour des raisons tragiques le plus souvent. Luís Aranha, lui, s'efface simplement, sans pour autant être oublié par ses amis. Mário de Andrade lui consacrera une étude en 1932. Il a fallu attendre 1984 pour que ses poèmes soient rassemblés par Nelson Ascher et Rui Moreira Leite.
La présente anthologie reprend l'essentiel des poèmes de Luís Aranha. Elle est suivie des études que lui ont consacrées Sérgio Milliet et Mário de Andrade (dos du livre)
Sérgio Milliet
Poèmes modernistes & autres écrits
Anthologie 1921-1932, textes originaux français ou traduits du brésilien, choix, traduction, présentation et notes par Antoine Chareyre.
La Nerthe, 2010
20 €
Sérgio Milliet (1898-1966) est né à São Paulo. De 1912 à 1920, il vit à Genève. C'est en Suisse que le jeune poète commence à publier, en français. Fin 1920, il retourne au Brésil où il noue des liens avec tous les écrivains brésiliens qui comptent alors (Mário de Andrade, Guilherme de Almeida, etc.). Son bilinguisme lui permet de faire le pont entre le continent sud-américain et l'européen.
Il rapporte des livres français et commence à traduire ses amis brésiliens. Il participe à la fameuse Semaine d'Art Moderne de février 1922 qui se tient au Théâtre Municipal de São Paulo. En 1923, il retourne à Paris où il fréquente Cendrars, Larbaud, Satie, entre autres, et publie, à Anvers, un nouveau recueil écrit en français, Oeil-de-Boeuf.
À Paris, il retrouve aussi son compatriote Oswald de Andrade et la peintre Tarsila do Amaral. Il se trouve au Brésil en 1924 pour la venue de Blaise Cendrars (il sera un des dédicataires de ses Feuilles de route). De fin 1924 à fin 1925, il est à nouveau entre les deux continents ; il écrit en français et en brésilien, collabore à la revue anversoise de Michel Seuphor, Het Overzicht, y publiant ses propres poèmes ou des traductions de ses amis brésiliens.
Cet ouvrage rassemble les textes les plus importants de ces années décisives, textes français ou traduits du portugais. On y découvre un poète, un écrivain à la prose singulière et un critique central, avec Mário de Andrade, pour l'histoire des lettres brésiliennes modernes. (dos du livre)
numéro 26
13 €
Au sommaire de ce numéro des textes de Mathieu Bénézet, Maurice Benhamou, Pierre Dhainaut, Stéphanie Ferrat, Christian Fumeron, Françoise Hàn, Christian Hubin, Peter Huchel, Jérémy Taleyson. Et un hommage à Albert Ràfols-Casamada (par Antoine Graziani, Jean-Pascal Léger, Anna Mark, Thierry Le Saëc et Antoni Ros Blasco.
Irène Dubœuf
La Trace silencieuse
peintures Michel Verdet
Voix d'Encre
17 €
" L'instant n'est rien qu'une pliure entre une cicatrice et un désir.
Ainsi nous habitons à la jointure des pages un espace improbable et toujours provisoire.
Que faire de l'inachevé
? "
La question, placée au centre du recueil, interroge le temps en s'enveloppant d'odeurs de bois, de feu et d'encre. Alternance d'ombre et de lumière. Les paysages omniprésents, suggérés plutôt que nommés, invitent à une rencontre dans le jardin d'enfance qui affleure sous nos pas. (Dos du livre et site de l'éditeur)
Marcel Migozzi
Cité aux entrailles sans fruits
Gros Textes
6 €
" Gloire à l'ancienne cuisine aux soupes
De pommes de terre, au placard ouvert
Sur le peu essentiel de bouche,
À la flûte de pain ouvrier, merci,
À ce fruit rouge, rien qu'un seul,
À l'étagère alourdie du seul livre
De la maison, dico de poche,
Au lavoir puits figuier, trinité des mois chauds,
Au cabanon, bois et charbon, et gloire aussi
À la vie, la présente, engrossée par l'enfance
"
(Dos du livre)
Françoise Parker
La griote de Montpellier
Itinéraire poétique
Manoirante, 2010
12 €
" Griote de Montpellier
Je reprends la parole
Tombée
. "
" Née en Australie en 1954, Françoise Salamand, devenue Parker par son mariage, a tourné autour des mots et des langues. Américaniste de formation, elle a intégré l'Ecole Normale Supérieur en 1975, puis vaincue par les tracasseries administratives qui l'ont empêchée de passer l'agrégation et de rentrer comme chercheur au CNRS, elle est devenue conservateur de bibliothèques sans jamais cesser d'écrire. De la poésie, des nouvelles, des articles. Elle participe activement à la revue Filigranes. " (dos du livre)
Laurence Bouvet
L'Harmattan, 2010
12,50 €
Si Camille Claudel revenait pour témoigner de son internement, du chemin parcouru entre le désir et le délire, entre le surgissement de son génie et le tarissement de son art, si les mots avaient été sa matière première, si sa parole n'était restée interdite, si Camille Claudel avait été poète... Ce recueil tente d'approcher l'expérience intime de la limite entre la réalité et la perte de celle-ci. Limite fragile que le poète, identifiée à l'artiste captive, sait être une source vive tout autant que cet effroi entrevu aux confins du vacillement subjectif.


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