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Autisme : “Elle s’appelle Sabine”, de Sandrine Bonnaire

Publié le 31 octobre 2010 par Frédéric Duval-Levesque

Tous les “professionnels” de l’autisme en HP/institutions devraient voir ce documentaire et/ou savoir ce qui réussit à l’étranger dans la prise en charge de des autismes.

S’informer aussi auprès des associations de parents serait utiles de la part de certains “soi-niants”.

Titre du documentaire : “Elle s’appelle Sabine”,

de Sandrine Bonnaire Documentaire français, 2007

Écrit et réalisé par : Sandrine Bonnaire

Présenté en 2007 au Festival de Cannes où il remporte le Prix Fipreschi de la Critique Internationale, ce documentaire très personnel est une sorte d’introspection de Sandrine Bonnaire, marraine des Journées de l’Autisme en 2001, à travers le regard permanent qu’elle porte sur sa soeur Sabine, jouant sur l’image à travers le temps – grâce à des vidéos prises pendant leur adolescence commune et lors du tournage en 2007 après que sa soeur a subi cinq ans d’internement en asile psychiatrique.

Le film que Sandrine Bonnaire a réalisé sur Sabine, sa soeur autiste âgée de 38 ans, dresse un constat quasi journalistique : « Aujourd’hui, Sabine est prise en charge dans un foyer, mais il n’y a pas assez de centres d’accueil médicalisés en France. J’ai été marraine de la Journée de l’autisme et je reçois toujours des lettres de familles qui sont dans la détresse. Ce documentaire est une manière d’agir plus concrètement, de faire passer un message de sensibilisation », explique la comédienne.

Petite, Sabine fréquente une « école pour enfants anormaux », mais devient victime de la cruauté de ses camarades qui la surnomment « Sabine la folle ». Elle reste dans sa famille jusqu’à l’âge de 27 ans. Elle fabrique des poupées, apprend l’anglais, joue Schubert et Bach, des facultés qu’elle perdra à l’hôpital psychiatrique où elle a été diagnostiquée, bien tardivement à l’âge de 32 ans, « psycho infantile avec des comportements autistiques ».

« Dès la première année d’internement, elle a décliné mentalement et physiquement, se souvient Sandrine Bonnaire, son aînée d’un an. Elle se trouvait dans un milieu assez carcéral, je me suis demandé si c’était à cause de la maladie ou de l’endroit que son état se dégradait. Nous donnions raison aux médecins en nous disant qu’ils connaissaient le problème. En même temps, je voyais bien que quelque chose n’allait pas. J’étais très nostalgique de la Sabine d’avant. Quand je l’ai comparée à celle d’« après », j’ai éprouvé un sentiment d’injustice et j’ai eu envie de faire un film. Je n’ai pas eu le courage de le faire plus tôt, j’avais peur d’être impudique. »

Un établissement inadapté

La réalisatrice, qui a tourné son documentaire en 2006, a su, au contraire, éviter le piège du pathos. « À cette époque, j’étais moins en colère », confie-t-elle. Sans tomber dans une polémique inutile, elle pointe toutefois du doigt les conséquences d’un internement dans un établissement inadapté. « Personne ne doit vivre dans un hôpital. C’est un lieu de soins et de transition et non un lieu de vie. L’autisme n’est pas une maladie, mais un handicap. » Sabine a aimé le documentaire. « Il l’a apaisée », signale Sandrine Bonnaire.

Sabine avant, Sabine après, Sabine aujourd’hui dans un foyer d’accueil en Charente, à Montmoreau *, qui a pu ouvrir grâce à l’acharnement de certains et à la notoriété de l’actrice, entourée d’un personnel attentif et bienveillant, ayant réduit ses doses de médicaments de moitié, retrouvant peu à peu des fonctions que l’asile avait écrasées dans la violence et la chimie (mais jusqu’où ?)…

Introspection car on ne peut voir ces images sans comprendre que Sandrine s’interroge et interroge sur la notion de culpabilité. Culpabilité des familles qui ne savent pas comment prendre en charge une différence, faute d’une société qui tourne le dos aux besoins de ceux que quelque mystère a enfermés dans une forteresse intérieure – l’autisme est-il physique ou psychologique ?

La psychiatre qui suit Sabine répond qu’il ne faut pas parler d’autisme mais des autismes – inquiétude sur l’avenir car ces enfants qui ne ressemblent pas aux autres vont devenir grand et un jour n’auront plus leurs parents… On est presque gêné de faire un commentaire sur ce documentaire qui forcément passe très peu par les mots pour exprimer ce désarroi, des malades, de ceux qui les accompagnent, cette absence de solution terrible qui fait tour à tour crier Sabine, parler Sabine, qui s’exprime avec pas mal d’habileté et pleure en revoyant les images de son voyage à New-York avec Sandrine il y a…

Il y a devant ces images de la traversée de la mer en Concorde, toute la concorde meurtrie entre les deux soeurs – Sabine demandant sans cesse à Sandrine, aujourd’hui, si elle reviendra demain – et toute la traversées de vies mises à l’écart par un monde d’hypocrisies et d’économies dirigées vers des besoins plus productifs.

Ce film est un constat d’un grand courage, d’une rare immobilité, la réalisatrice est figée devant tant de tristesse, d’une grande compassion, c’est un message adressée à une soeur qui prend sa source dans la plus farouche nostalgie, celle d’avant les coups, d’avant les rictus un peu trop prononcés, du temps où Sabine, avec trente kilos en moins et un sourire qui ne parvient plus à se dessiner sur sa bouche, pouvait s’asseoir à son piano sans nous tirer des larmes. Bouleversant, instructif, indispensable.

Réaction d’un internaute :

“Je l’ai vu il y a 4 mois et aujourd’hui l’émotion est restée intacte. Ce n’est pas un film fait par hasard, sûrement pas un énième film sur le handicap, mais un docu militant tout en finesse qui dénonce les dérives de l’institution psychiatrique avec une incroyable légitimité. Tout est dans l’image, dans les flash back et le champ/contre champ temporel de Sabine avant et après les médocs. Celle qui fait du scooter, rigole et danse, joue du piano, et celle qui quelques années plus tard, méconnaissable, a pris 20 kilos, bave, mord… elle ressemblait à sa frangine l’actrice, elle ressemble à une épave détruite par la camisole chimique, peut-être la maladie. Tout est dans le off aussi, si la soeur de Sandrine Bonnaire est traitée comme ça alors comment sont traitées les autres, ces anonymes dont on ne parlera jamais…. C’est aussi un film témoignage sur l’amour entre deux soeurs, malgré la maladie, malgré l’éloignement. C’est elle qui cadre et réalise avec la distance juste, c’est forcément difficile et extrêmement courageux car elle dévoile à travers le portrait de sa soeur une grosse part de son intimité. Mettre sa notoriété au service d’une cause souvent ça fait sourire… ici cela fait pleurer de rage mais aussi d’émotion.” Francis

Elle s’appelle Sabine était passé le 14 septembre 2007 sur France 3, puis est sorti sur grand écran en janvier 2008, il est encore visible dans quelques salles, il faut, si ce n’est fait, aller le voir.

* Le film a été tourné au sein de l’APEC (Agir pour la Protection, l’Education et la Citoyenneté), une association qui anime des structures spécialisées dans la prise en charge des troubles mentaux. L’APEC, dont les actions touchent à l’année plus de 350 usagers dont une trentaine d’autistes, fonctionne sur un système de petites unités, permettant un travail de qualité dans l’accompagnement des personnes.

Selon l’INSERM, on compterait 40 000 enfants et adolescents autistes, et environ le même nombre d’autistes adultes.

Il faut aussi aller sur le site de l’association Léa pour Samy – La Voix de l’Enfant Autiste, d’envergure internationale qui agit, dans les pays francophones, pour la défense, la protection et l’intégration des enfants atteints d’autisme et de leur famille. Léa pour Samy – La Voix de l’Enfant Autiste, est une Organisation Non Gouvernementale (O.N.G) apolitique qui œuvre pour l’intérêt général de l’autisme et rejette l’intérêt particulier, le profit et le pouvoir. Site : www.leapoursamy.com/ – Contact : [email protected]


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