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TF1 vu de l'intérieur...

Publié le 13 janvier 2008 par Onigiri
madame-monsieur-bonsoir-tf1.png19h59. Le générique le plus connu de la télévision française est vu quotidiennement par plus de sept millions de français. À l'écran, un visage familier, pour une voix qui l'est tout autant. Une personne qu'on a l'impression de connaître comme un frère, tant elle s'incruste avec aisance chaque soir à 20 heures dans nos foyers. Le frère de plusieurs millions de personnes, parfois leur principale, voire leur seule source d'information de la journée.
Un frère pour sept millions de français, mais un tyran aigri pour 300 d'entre eux. L'armée de journalistes qui compose TF1 essuie souvent la critique, les avis retors et les accusations diverses. Mais quels avis portent-ils eux-mêmes sur leur propre travail, sur leurs dirigeants, sur les animateurs qui font du journal télévisé ce qu'il est ?
C'est ce que tente d'expliquer ce livre, "Madame, Monsieur, Bonsoir...". Le titre n'est pas franchement recherché, mais le livre se veut explicatif des "dessous du premier JT de France". Et le livre n'y va pas avec le dos de la main morte, comme on dit. Ça taille, assez sévèrement, toute la direction et les responsables de la rédaction pendant les 160 pages du bouquin. Au point même que les 5 auteurs de ce bouquin, tous salariés de la chaîne, ne laissent pas savoir qui ils sont, et vont jusqu'à signer leur livre sous le pseudonyme de Patrick Le Bel, en référence (hommage, lit-on en quatrième de couverture), à Patrick Le Lay.
C'est bien connu, l'anonymat délie les langues, fait tomber les tabous, et annule la peur des représailles. Atmosphère pesante, tyranie des animateurs, partialité de la rédaction et de ses dirigeants, pression sur les salariés, tout y passe, et l'inquisitoire se montre sévère. Un inquisitoire envers TF1, qui se transforme rapidement en inquisitoire envers PPDA, "Le 20 heures", comme on l'appelle officiellement là bas. "Il arrive enfin, nonchalament, comme d'habitude ; son retard n'est jamais excusé, encore moins justifié ; un bonjour général est déjà signe de bonne humeur, un sourire, c'est le bonheur : la journée s'annonce radieuse".
"Considère qu'un off dans mon journal est déjà un immense privilège", lance-t-il un jour à un jeune journaliste en conférence de rédaction, quand celui-ci réclamait un véritable reportage. Décrit comme rarement agréable et souvent antipathique, "Poivre" est très certainement la personne la plus décriée tout au long de ce livre. "Irascible. Chacun dans la rédaction s'attache à prévenir ses colères ; on les craint.  Destructrices, blessantes".
Bien sûr, PPDA n'est pas le seul à en prendre pour son grade. Jean-Pierre Pernaut a lui aussi l'honneur de figurer dans quelques pages. "Son côté beauf de droite décomplexée le rend presque sympathique", lit-on à son propos. Un homme pas forcément méchant, amateur de la France profonde, et dont la personnalité transpire tout au long de son journal, contrairement à son collègue cité plus haut.
Claire Chazal est également moins réprimendée que son confrère. Ceci dit, tout le monde y passe, personne n'est oublié. De Robert Namias (directeur de l'info), à Patrick le Lay en passant par Etienne Mougeotte et Nonce Paolini. Autant de dirigeants d'une chaîne qui a de plus en plus de mal à affirmer son indépendance éditoriale et politique. "Je met quiconque au défi de savoir pour qui je vote", lance PPDA en réunion, le même qui débouchait le champagne hors cadre en compagnie de Claire Chazal, le soir de l'élection de Nicolas Sarkozy.
Le président de la République n'est d'ailleurs pas épargné, comme pour montrer à quel point il est lié à la chaîne. "Il n'est pas chez lui à TF1, il est chez son meilleur ami. Martin (Bouygues), rarement là, lui laisse les clés de la maison en toute confiance". Le livre est donc plein de révélations, de confidences qui ne s'avouent qu'à demi-mot, quand toutefois elles s'avouent, mais dont beaucoup ont déjà leur petite idée. "J'ai un peu honte en ce moment de dire que je travaille à TF1", indique une journaliste de la plus grande chaîne télévisée française.
Bref, un livre à lire, ne serait-ce que pour assouvir une curiosité latente, pour apprendre ce que l'on savait déjà, ou encore pour découvrir les dessous d'une organisation bien huilée, peut-être trop bien huilée pour que cinq journalistes trop bavards parviennent à la renverser. Les sujets abordés sont toutefois assez divers, même si les mêmes noms reviennent toujours. Du traitement de l'information à certaines bribes de la vie privée de certains protagonistes, des rapports entre la rédaction et  "le quatorzième (étage)", la direction, en passant par les raisons, officielles comme officieuses, de l'embauche soudaine de Harry Roselmack ou les rivalités parfois vives qui opposent tout ce petit monde.
Bienvenue derrière le décor, de l'autre côté de la caméra, "bienvenue au JT". Que vous ne verrez plus comme avant, c'est certain.

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