Magazine Journal intime

Quitte à se faire Xi'an... (le rotour) episode 1

Par Simplybrice

Un jour on a récrit, la si, la sol,
Un jour on a récrit la si la sol fa mi.
Mais qu’est-ce qui nous a pris, la si, la sol,
Mais qu’est-ce qui nous a pris la si la sol fa mi.
C’est p’t’être  qu’j’avais envie, la si, la sol,
C’est p’t’être  qu’j’avais envie la si la sol fa mi.
Sur ces mots je frémis, la si, la sol,
Sur ces mots je frémis la si la sol fa mi.
(Faut simplement que je retrouve où j’ai enfoui tout ça)(sic)
La Chine, continent sans limite aux confins du monde, la Chine, terreau d’une culture millénaire millésimée, la Chine, carrefour planétaire entre sagesse et la tienne, la Chine, phare d’une fierté retrouvée, pas la mienne.
La nuit a laissé des traces. Des traces de pneus de tracteurs sur le fil de pêche de ma vitalité. La SNCF me manque à m’en faire monter des sanglots. La décision d’acheter un billet de train ne donnant droit à rien d’autre que de partager trois mètres carrés transpirant l’urine et la tabac froid avec une huitaine de bougres pendant douze heures
aurait finalement pu ne pas être prise. J’ai beau avoir garni mon tableau de chasse du pire voyage ferroviaire depuis la création du rail, c’est un trophée qui se mérite, remis exclusivement s’il est admis après coup que le voyage a fait de vous autre chose qu’un être humain.
On ne se pose pas la question de savoir si un contorsionniste grince quand il sort d’une boîte dans laquelle il a passé cinq minutes mais qu’en est-il après douze heures d’une nuit d‘un blanc blafard? Oui, ça pour grincer, ça grince.
Xi’an, ma destination, est le premier arrêt du convoi. A l’ouverture des portes, sous la pression du nombre, les passagers sont éjectés de l’habitacle comme un diable de sa boîte. A mon tour, moi aussi, je boite. J’ai les facultés motrices d’un arbre mort et la vivacité d’esprit en manque d’engrenages. Ne reste que l’instinct et une vague expérience de la démerde en milieu inconnu voire hostile. 
Avec la grâce de l’éléphant de mer je traverse le hall principal obnubilé à l’idée que mon futur lit qui s’ignore m’attend dans de courtes minutes. Seule la taille de la gare pourrait me faire pousser de vagues cris d’admiration devant sa taille une nouvelle fois pharaonique mais non, pas le temps, pas la force.
« Hep taxi!! »
Ne faisant aucun effort, je lui colle directement sous le nez la page relative aux auberges sur le LP et fouette cocher!!! Il aura beau tenter une manœuvre d’approche par la face nord pour me tirer quelques mots de mandarin dans une conversation qui a autant d’avenir qu’un hérisson se réfléchissant dans la lumière des phares d’une voiture lancée à pleine vitesse, j’en fais fi. Ainsi fondent fondent fondent mes bonnes manières quand je supporte contre ma volonté le simple fait d’avoir les yeux ouverts.
Dans la ville, le taxi glisse sur l’asphalte, et moi avec lui.
En une enfilade de larges avenues, malgré le trafic omniprésent, on atteint l‘hotel. Dans la rue, pour peu qu’on veuille bien se donner la peine, ça sent le plumard à plein nez, je respire. Je respire et je rentre à la recherche d’une couche pour les 36 prochaines heures au minimum. A la réception, je ne suis pas tout seul. D’autres se sont donnés le mot pour arriver avant moi. On m’indique de patienter. Alors moi, pas con, je patiente. Dix, vingt, trente minutes. Je suis semé, le temps s’égraine, je plante, me décompose. Vite, une cigarette!! Je sors et m’offre une vue susceptible de m’ôter le poids de mon inconfort. Je végète dans une impasse sans fond depuis une demie heure sans savoir qu’à trois numéros de là se dresse un autre marchand de sommeil, avec vacance celui-là. Dîtes, vous n’auriez pas ne serait-ce qu’un tapis ou une paillasse en bois dormant? Si? Vous êtes sure? Non, là c’est trop, je vous prends dans mes bras?
Je pourrais chaque fois questionner mon interlocutrice sur ce qu’elle exprime dans ses réponses en mandaringlish mais je m’abstiens. Rien n’est intelligible ou presque, mais ça n’enlève rien à l’essentiel, ça se lit dans son sourire compréhensif ainsi que dans la clé qu’elle me tend, ce n’est pas la peine que je m’inflige une lutte finale avant ma mise en bière.
 
Ainsi, le milieu de journée inonde Xi’an d’un soleil radieux, je vais me pager dans un dortoir d’une dizaine de paddocks superposés dont l’agitation relative n’a aucun type d’influence sur la plateur de mon encéphalogramme. Seul un miracle m’en décanille. Pas d’explications rationnelles pour expliquer que je suis debout et pas loin d’une vaillance difficile à pronostiquer, mais il se trouve qu’avant que la nuit n’ai tiré un trait obscur sur cette journée mi-fatigue mi-fatigue, je guette le dehors derrière mes vitres fumées et correctrices. Le premier contact visuel sur Xi’an en impose. On ne peut pas faire plus en face de la bonne auberge se dresse un mur. Que dis-je un mur? Une muraille qui pourrait dans les dimensions faire de l’ombre à sa cousine dont je ne me lasse pas de faire l’éloge! Un truc pas croyable qui s’allonge à perte de vue pour peu que le soleil m’aveugle avant de se cacher derrière. Je le longe jusqu’à une porte qui n’est pas qu’une métaphore du genre de la porte d’Orléans où il n’y a pas vraiment de porte, pas la peine de chercher, là, si si, ils ont penser à tout, il y en a une de porte, et pas des moindres! La muraille est le mur d’enceinte de la ville du temps où elle était la capitale de l’empire, et à quatre côtés correspondent quatre portes par lesquelles s’écoule dans des vapeurs à particules tout le trafic de la dîte vieille ville .
Je m’enfonce, la boussole à portée de main, des fois que. Je me cantonne aux grandes avenues, déjà bien assez chinoises pour que je puisses m’y repérer mieux qu’une aiguille dans meule de foin. Partout ça s’active, on en oublierait qu’on est en juillet! Ils ne sont pas nombreux les locaux qui flânent! Tous donnent l’air d’être en mission sauf quand certains prennent le temps de me rendre mes sourires, ce qui fait qu’au bout du compte, on est quitte.
Ravi, je rentre à la GH après deux heures de ce manège où tout n’est pas beau architecturalement parlant mais comme le fond de l’air est en manches courtes, tout passe. Là, je mange, en pas qu’un peu, ça favorise une remise en sommeil plus rapide quand on se leste un tant soit peu. Et comme en plus, la vie est bien faîte, sur le court chemin entre la nourriture et le sommeil m’attends tapi le quartier réservé aux tours organisés. Oui, c’est pas parce que l’armée des guerriers en terre cuite n’est qu’à une trentaine de kilomètres que je vais y aller à pieds pour le plaisir! Et tant qu’à ne pas verser dans l’inconfort, comment refuser quand on vous prend en véhicule climatisé (il fait dans les 35° vers 14h, t’en veux du climat continental, j’vais t’en donner moi), qu’on vous dépose sur le sîte avec un guide qu’on est pas obligé d’écouter selon l’humeur, qu’on vous ramène toujours motorisé à proximité de vos draps de soie? Je suis vite convaincu, demain j’affronte une armée entière de terre. Sans perdre de temps. Je flotte sur l’hyperactivité comme une pierre dans l’eau.
Au matin, le soleil du jour a remplacé celui de la veille. Le petit déjeuner compense l’absence de celui de la veille. J’ai de l’énergie à revendre à bon prix.
Un minibus arrive, l’appel est fait. Les affaires tournent bien, le véhicule est plein.
Il est 10h, prochain stop : l’armée des sous-terre-man. En principe…
En principe seulement. 
Car la Chine, en temps que premier pourvoyeur mondial de daubes à moins d’un euro pièce, n’est pas née de la dernière pluie. A Xi’an on vend du rêve. A Xian on vend du bonhomme en terre certes, mais aussi avec des épées, des boucliers, de fiers destriers, etc. A Xi’an, on vend de la légende. En un mot (deux), à Xi’an, on vend du Star Wars. Et qui dit rêve, épées et petits bonhommes, dit aussi :
- « alors voilà, nous allons prendre notre pause déjeuner dans ce ravissant endroit. Sur votre droite vous avez l’exquis restaurant, et sur votre gauche, les délicieux rayonnages de notre subtil magasin de souvenirs dont vous pourrez bénéficiez avec félicité sur plus de 800.000m². Profitez étrangers, il n’y en aura pas pour tout le monde! »
La bonne blague!! Je ne l’avais pas vu venir la fourbasse!! Deux heures à se faire poursuivre par des répliques comme « si, si, achète, c’est bon pour toi! ». Et à les entendre, les répliques miniatures des soldats c’est bon pour le moral, pour le teint, pour l’arthrose, les ganglions et le diabète!
A les entendre, je retourne près du bus avec les autres boudeurs. Devant nous passent régulièrement les chinois qui ont fait leurs courses de souvenirs de la semaine et en remplissent leur coffre de voiture. Eux sourient, nous, on fulmine un peu.
Ce n’est qu’un début.
Sur le bref chemin qu’il nous reste à accomplir jusqu’au site, un nouvel obstacle se dresse en travers. En travers de nos gorges. C’est qu’après avoir bailler à s’en détacher la mâchoire au supermarché de la daube, il faut encore rendre visite aux artisans, ceux qui à coups de scalpels habiles fabriquent les reproductions, disons le, les plus chères. Nouvelle couleuvre à avaler. Celle-ci étant moins indigeste que l’autre, mais quand même… La révolution est proche.
Tout à coup, un membre de notre groupe de bailleur du fond attrape une hallebarde dont personne ne s’est alors posé la question de savoir ce qu’elle faisait là. Le type, appelons le Toni, fait alors tournoyer l’arme au dessus de sa tête avec la dextérité d’un moine Shaolin. Elle tourne, tourne, tourne, puis vient se planter dans le torse surpris de notre guide qui ne l’est pas moins. Le sang jaillit, pourrissant le travail d’une dizaine d’employés. Tout le monde est révolté.
Non, sans déconner, tout le monde est révolté j’vous dis. Un deuxième arrêt… Non mais c’est dingue… Que fait la Croix Rouge nom d’un chien?
On re-décolle avant que ça tourne au vinaigre. C’est que c’est pas tout ça mais on est quand même nettement plus proche de la tombée de la nuit que lorsque nous avons débuté notre tour du rance. En route messieurs et cette fois ci, pas de blague, on a gardé la hallebarde!!! Le minibus repart.
Sur la route, de nombreux panneaux imagés nous rappelle ce pourquoi on est là. Puis, le guide se lève, prends le micro, et de sa voix la plus mélodieuse nous annonce enfin : « On y est!! On y est!! ».
On avait vu, le bus est arrêté à la guérite précédant le parking. Merci pour l’info. Si si, euh, il est bien notre guide!!
Il nous remet un ticket à chacun. Sur le parking, quand plus haut je vous parlais de légende, je me rends compte du phénomène. Des emplacements innombrables sur lesquels sont stationnés des bus qui, si il voulait bien se donner la main, on ne serait pas loin de la lune. C’est la Chine. C’est juillet. C’est juillet en Chine. C’est* les chinois en vacances. Et quand les chinois en vacances débarquent, ça rend la crainte de voir les anglais débarquer à la limite du ridicule. Au pire, quand les anglais débarquent, c’est à 60 millions. Mais si les chinois s’y mettent, ça va être du sport croyez moi!!
* Alors certes, c’est + pluriel = c’est moche. Ca me ferait presque même autant tiquer qu’un « malgré que », c’est dire… Seulement là c’est du comique de répétition. Si je dis, je cite : «  C’est la Chine. C’est juillet. C’est juillet en Chine. Ce sont les chinois en vacances. », je vais passer pour quoi moi après??
Là-dessus, je vais vous laisser, parce que même si c’est plus court, ça ne me prend pas moins de temps.
Je vous tiens au jus sur ce qui s’est passé il y a plus d’un an plus tard.
Bises.
(Les photos viendront plus tard, je n’ai pas fait de clichés des stands de crèpes.)


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