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Un privé à Berlin

Par Lebibliomane
Un privé à Berlin"La trilogie berlinoise" Philip Kerr. Romans. Editions du Masque, 2008.
 Traduit de l'anglais par Gilles Berton.
La vie des détectives privés n'est pas toujours des plus faciles. S'ils excellent à démasquer les coupables lors d'affaires particulièrement alambiquées, leur vie privée est en revanche bien souvent un désastre. Veufs ou divorcés, ils accusent souvent un net penchant pour la bouteille, vice dont ils abusent entre deux filatures. L'entretien de leur domicile, le choix de leur tenue vestimentaire laissent souvent à désirer. Solitaires, désabusés, ils portent sur la société un regard empreint de cynisme et d'ironie. C'est le cas de Bernhard Gunther, le personnage créé par Philip Kerr, un détective privé contemporain des célèbres Philip Marlowe et Sam Spade de Raymond Chandler et Dashiell Hammett. Le contexte de ses investigations se trouve par contre bien loin de la Californie des années 30 et 40 où évoluent les deux célèbres détectives cités plus haut. L'univers de Bernhard Gunther c'est l'Allemagne, et plus précisément Berlin, entre 1936 et 1947 lors de cette période qui verra l'ascension et la chute du IIIè Reich.
Bernhard Gunther, ex-flic, est devenu détective privé suite à sa démission de la Kripo (Kriminalpolizei) au moment où tout fonctionnaire de police se devait d'appartenir au parti National-Socialiste. Gunther est en effet allergique à la montée du nazisme et au fanatisme ambiant qui semblent régner sur l'Allemagne de cette époque, sentiment qui ne lui attirera pas que des amis et lui vaudra même de se retrouver à Dachau.
Réunis en un seul volume intitulé « La trilogie berlinoise », on trouvera dans cet ouvrage – comme son nom l'indique – trois romans : le premier, « L'été de cristal » se déroule en 1936 au moment où se déroulent les Jeux Olympiques de Berlin. Le second : « La pâle figure » nous amène en 1938 à l'époque de l'annexion des Sudètes; et le troisième, « Un requiem allemand » nous fait découvrir Berlin et Vienne en 1947, alors que l'Allemagne en ruines est livrée à la convoitise des deux grandes puissances victorieuses que sont les États-Unis et l'Union Soviétique.Trois romans donc, trois moments de cette sinistre période de l'histoire allemande qui donnent lieu à trois enquêtes où se mêlent meurtres, corruption, espionnage, disparitions et chantages, trois enquêtes se déroulant dans un climat lourd et oppressant qui fait toucher du doigt au lecteur ce que pouvait être la vie quotidienne dans l'Allemagne du IIIè Reich. On y suivra Bernhard Gunther dans ses investigations qui le mèneront des résidences les plus huppées des hauts fonctionnaires nazis aux taudis les plus abominables, des cabarets louches aux sinistres geôles de la Columbia Haus. On y fera également la rencontre de personnages devenus tristement célèbres : Hermann Goering, Heinrich Himmler, Reinhard Heydrich, ainsi que le très controversé « archéologue » Otto Rahn qui apparaît ici sous son vrai jour, celui d'une fripouille arriviste dénuée de tout sens moral.
Avec cette « Trilogie berlinoise » Philip Kerr nous gratifie de trois polars de haute volée dont le contexte – original s'il en est – n'est pas que le seul attrait. La maîtrise de la narration, la complexité des enquêtes, leur insertion et leurs implications dans le contexte historique et politique de l'époque en font des chefs-d-oeuvre du genre. Le polar étant un genre littéraire auquel je ne m'adonne malheureusement que trop rarement, je ne voudrais pas m'ériger en spécialiste du genre et juger quels sont les bons et les mauvais auteurs dans cette catégorie. Je ne peux cependant que conseiller cette trilogie qui m'a passionné de bout en bout.



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