Magazine Société

Les chômeurs c'est la classe !

Publié le 23 décembre 2010 par Unpeudetao

Chaque année des dizaines de milliers d’emploi disparaissent. Plus que jamais, depuis que la gauche est au pouvoir, la “bataille de l’emploi” est une illusion perdue. La réduction du temps de travail, c’est très bien pour ceux qui en ont un, pas pour nous. Les syndicats réclament des emplois (une fois salariés, pourquoi pas l’adhésion ?) qui ne peuvent exister. Et ils négocient à la baisse notre situation. Une vague de froid et la droite invente les nouveaux pauvres.
Comme pour faire oublier que nous l’étions déjà sous son règne.

Et tout le monde de parler de nous, de parler pour nous.

Nous en avons assez d’être plaints. Nous sommes nombreux.
Et nous voulons être payés ! la richesse sociale s’accroît sous nos yeux et grâce à nous, toujours disponibles, quant il le faut, de petits boulots en missions d’intérim et travail au noir. Nous sommes producteurs ! Et pourtant nous sommes de moins en moins assurés d’avoir les moyens de vivre.

La seule solution, parler et agir pour notre compte.

Le fric que l’État distribue déjà (sinon bonjour le bordel !) et qu’il saura trouver, nous le voulons tous. Sans discriminations, sans contrôle en échange. Pas en bons de rationnement ou en baguettes de pain, de l’argent, comme tout le monde !

Les emplois disponibles ?
Flics, matons, vigiles, armement et autres autres schtroumpferies, non merci ! Ces travaux comme d’autres sont parasites, nuisibles et même suicidaires. Nous ne voulons pas les prendre et encore moins les partager.

Nous avons d’autres choses à faire. De ces activités utiles, pour nous, pour tous, que l’État, les patrons ne songent pas à rétribuer. Autre chose que des TUC de misère, pour tous ceux qui tentent de survivre hors des rapports salariaux. Autre chose à vivre que la prison comme menace permanente ! Une galère où croupissent et crèvent 110 000 d’entre nous chaque année. Autrement que coincés en famille ou mal logés face à des apparts hors de prix qui nous sont interdits.

Plus que ce revenu pour chacun, nous voulons aussi, et il faudra bien le donner du fric pour nos activités collectives : crèches sauvages, musique, vidéo, etc. .. ET toutes ces choses qui restent à imaginer, à concrétiser. Il nous faut nos propres lieux pour y inventer une vie que le travail est loin de permettre.
Notre socialisation particulière. Ces activités culturelle, sociales, productives, plus utiles que bien des emplois actuels, l’État doit en payer le prix

Revenu garanti : 2/3 du SMIC minimum pour tous

Pour une maison des précaires à Paris

Association des précaires
rue des 5 diamants, Paris (13e)

Tract diffusé à la manifestation des chômeurs du 30 mai 1985

Archives de l’université ouverte

On se propose de documenter quelques questions abordées à l’UO, en particulier ici celle des contre-conduites, de ce qui refuse d’être gouverné, et en l’espèce de publier le texte ci-dessus, issu d’un mouvement de chômeurs passé.

Des éléments de contexte

L’association des précaires de Paris éditait le journal CASH, où l’on trouve, en 1988, ce qui semble être la première occurrence du néologisme précariat, aujourd’hui en usage. Contrairement à ce que fait supposer le “2/3 du SMIC” qui précède, CASH défendait un revenu garanti au moins égal au SMIC mensuel et réussit à l’époque à fédérer sur cette base un grand nombre d’associations et collectifs locaux de chômeurs, qu’il soient ou non rattachés aux organisation nationales existantes (Syndicat des chômeurs, Fédération nationale des chômeurs).

Indiquer un tel plancher, qui s’appliquerait à qui est en âge de travailler sans être majeur, scolarisés compris, soit dès 16 ans, ces “2/3 du SMIC” visent à préserver à la fois l’hétérogénéité du mouvement en cours (certains supposés “réalistes” se refusent à réclamer le SMIC) et celle d’un mouvement potentiel que ce courant mouvementiste appelle de ses vœux. Ce mot d’ordre permet en outre de garder ouvert le débat sur les définitions du travail productif (de valeur) et de l’égalité (des salaires). Cette prise en compte théorique des 16 à 18 ans n’avait déjà alors rien de naturel et devra sans cesse être rappelée, y compris au sein de mouvements qui eux-aussi tendaient à refouler/négliger “l’entrée dans la vie active”.
Il s’agit de refuser un “gommage biographique” qui sépare chacun de sa propre expérience, gommage qui renforce le mécanisme de demande d’intégration dans l’emploi (une des expressions du présentéisme).

C’était peu après l’accession de la gauche au gouvernement. Près d’une décennie après le “Plan Barre” de 1976 qui avait institué les stages du même nom, prototypes d’une “insertion” contrainte et sous payée dont bien des variantes seront par la suite mises en œuvre à une échelle de masse et par delà “les jeunes” eux-mêmes (TUC, SIVP, CES, CAE, CUI, etc.). Les sociologues finissaient par débattre de “segmentation du marché du travail”. Depuis 12 ans, “la crise” était l’occasion d’une restructuration de longue durée de la production (fermetures de mines, ports, usines sidérurgiques, développement de l’intérim et multiplication des CDD).

Ces mouvements de chômeurs et précaires se regroupaient autour de la revendication d’un revenu garanti. D’être énoncée en tant que besoin de conquérir des “supports sociaux” (comme les nomme Robert Castel), de disposer d’une base matérielle afin d’être en mesure de résister à l’exploitation et au commandement capitalistes (emploi/entreprise/salaire) et comme moyen d’expérimenter et de développer des formes d’activités libres, cette revendication comportait une dimension offensive.

Jeunes marginalisés et exploités. Chômeurs stigmatisés et appelés à disparaître

En octobre 1988, lors d’un rare moment de consensus avoué, d’un ampleur absolument inusitée à l’Assemblée nationale, un projet de loi socialiste traduit cette exigence politique de garanties sociales en instaurant un RMI dont le texte est voté à l’unanimité moins une voix. Le P.S a pris soin d’interdire celui-ci aux moins de 25 ans. L’apprentissage de et par la précarité devait se poursuivre…

La publication de CASH ne se sera guère prolongée au-delà de la victoire à la Pyrrhus qu’aura été cette adoption du RMI en octobre 1988. Il faudra ensuite attendre 1994, avec les marches lancées suite à la création d’AC !, pour que des chômeurs s’organisant apparaissent à nouveau “en grand” sur la scène sociale.

On trouvera également du même journal CASH sur internet
•Les Bourses du travail, berceau de l’identité ouvrière (n°2, mars 1986)
•L’idéologie est la première arme des exploiteurs
 n°3, juin 1986).

Nous publierons prochainement d’autres documents sur les tentatives d’organisation des chômeurs et précaires des années 80.

À gauche poubelle, précaires rebelles (1998)

Intermittence et précarité, conférence de presse avec Jean-Luc Godard, Bunker du festival de Cannes (2004)

Nous refusons que tout au long de la vie la durée d’emploi gouverne nos existences et les soumette toujours plus au commandement de l’argent

Pour ne pas se laisser faire :
-  Intermittence du spectacle, permanence CAP, Conséquences de l’Application du Protocole Unedic
-  Permanence Précarité
Lundi de 15h à 18h, à la coordination des intermittents et précaires, 14 quai de charente, Paris 19e, M° Corentin Cariou, ligne 7, Tel 01 40 34 59 74

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 Pour aller plus loin :

http://www.cip-idf.org/


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