Yves Benoist

Un artisan respecté de la sécurité aérienne disparaît.
C’est souvent dans la coulisse, loin des regards, y compris ceux des médias, que la sécurité de l’aviation se construit jour aprčs jour, grâce au talent et la persévérance d’hommes entičrement dévoués ŕ leur tâche, animés par la vocation. Yves Benoist, qui vient de nous quitter ŕ 70 ans, étaient de ceux-lŕ, spécialiste respecté et unanimement reconnu de la sécurité aérienne.
Ingénieur Ensica (Institut supérieur de l’aéronautique et de l’espace), ensuite formé ŕ l’EPNER (Ecole du personnel navigant d’essais et de réception), il avait rejoint Aerospatiale en qualité d’ingénieur navigant d’essais au moment oů Caravelle terminait sa carričre puis avait fait partie de la premičre équipe d’Airbus, celle de l’A300B. En un deuxičme temps, il avait été chargé d’une tâche délicate, celle de responsable de la réception et de la livraison des avions aux compagnies clientes. ŤIl connaissait l’A300B absolument par cœurť, se souvient Claudius La Burthe, qui fut son collčgue aux essais en vol.
Plus tard, Bernard Ziegler, premier directeur des essais en vol d’Airbus, avait nommé Yves Benoist Ťflight safety officerť, un choix judicieux. Yannick Malinge, l’actuel directeur de la sécurité des vols et de la prévention des accidents de l’avionneur européen, évoque spontanément les positions courageuses d’Yves Benoist dans un domaine qui a toujours été difficile. ŤIl avait une mémoire technique trčs poussée, le souci du détail, la recherche de la perfectionť, souligne Yannick Malinge.
Paul-Louis Arslanian, qui fut pendant deux décennies directeur du Bureau d’enquętes et analyses pour la sécurité de l’aviation civile, met en exergue l’unanimité que suscitait l’homme, Ťpar sa grande compétence en męme temps que sa grande droitureť. Des mots qui reviennent dans les propos que tiennent les uns et les autres, peinés d’apprendre cette disparition prématurée : Yves Benoist avait encore beaucoup ŕ faire, notamment dans le cadre de l’Académie de l’air et de l’espace qui l’avait élu membre correspondant ŕ la mi-2007.
Michel Guérard, qui œuvre lui aussi au sein de la direction de la sécurité d’Airbus, et qui fut par ailleurs directeur de la communication du constructeur, rappelle qu’Yves Benoist est arrivé, venant des essais, Ťau moment oů la sécurité devenait un sujet de communication majeurť. Il fut d’ailleurs ŕ l’origine des Ťsafety conferencesť d’Airbus.
C’était un homme qui alliait une forte présence ŕ un comportement discret. Barbara Kracht, directrice des relations avec les médias, était néanmoins arrivée ŕ le convaincre de rencontrer les journalistes spécialisés, de leur expliquer les efforts déployés par les industriels pour rendre les routes aériennes plus sűres en męme temps que le bien-fondé des choix techniques novateurs d’Airbus. Dans ce contexte, il fit des exposés importants et, de ce fait, trčs utiles.
Finalement, tout bien réfléchi, Yves Benoist était l’archétype de ces hommes sans lesquels la sécurité n’évoluerait pas de maničre résolument positive. Des travailleurs de l’ombre, souvent soumis au feu des critiques mais cherchant soigneusement ŕ éviter les polémiques pour se consacrer ŕ l’essentiel. Ce monde-lŕ, ingrat, exigeant, Yves Benoist l’a remarquablement servi.
Pierre Sparaco - AeroMorning