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Touche pas à mon Poste

Publié le 08 janvier 2011 par Jlhuss

poitou.1294478617.jpgOn était le lundi 3 janvier 2011. En dépit d’une température frisquette (-5° Celsius) le soleil avait définitivement triomphé des brumes matinales et, au volant de sa puissante conduite intérieure, Chambolle (1) traversait le seuil du Poitou via l’autoroute A 10 (dite l’Aquitaine pour les intimes). Je ne sais pas si vous connaissez le seuil du Poitou, mais l’horizon y est aussi plat et aussi dépourvu d’inattendu qu’un discours de Conseiller Général inaugurant la salle polyvalente d’un chef-lieu de canton (2). La somnolence gagnait notre homme. Alors, désireux de ne pas alourdir la cotisation payée annuellement par les sociétaires de la mutuelle d’assurance militante dont il est un fidèle depuis de trop nombreuses années, il décida de mettre en route l’autoradio dont un constructeur avisé a équipé son luxueux véhicule.
Manque de chance, France Musique diffusait deux symphonies de Mahler, compositeur qui ne fait pas partie de mon panthéon personnel. Sur France Culture, la Fabrique de l’Histoire interviewait, par téléphone, une Américaine inaudible. Europe 1 était incaptable, France Bleu Auxerre hors d’atteinte et le 107.7 autoroutier en proie à un accès de promotion touristique, sauce com’, des plus indigestes. Restait France InterPascale Clark recevait Jérémie Assous, avocat de son état.

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Autant l’avouer tout de suite, je n’aime pas Pascale Clark. Mon aversion pour cette animatrice remonte à l’époque où, chargée d’une revue de presse, elle ignorait systématiquement TOUS les articles parus dans Marianne (ou l’Evénement du Jeudi, ma mémoire défaille), et l’Humanité. Etaient également condamnés au néant Régis Debray, Chevènement et tout ce qui, à tort ou à raison, ne faisait pas allégeance à  « la seule politique possible ». Rien de tel qu’une bonne petite détestation pour tenir éveillé un conducteur dont les paupières s’alourdissent. En avant donc pour « Comme on nous parle » titre à la fois moderne et convivial de l’émission de la chère Pascale.
Jérémie Assous  est un des avocats de Julien Coupat et du groupe de Tarnac lesquels sont accusés d’avoir saboté les lignes de la SNCF à l’aide de fers à béton. Le baveux (3) fait son boulot à la perfection. Il déglingue l’enquête de police et l’instruction qui a suivi avec une énergie et un talent remarquables. Pascale boit du petit lait. Au cas où l’auditeur peinerait à comprendre qui sont les gentils et qui les méchants, elle n’hésite pas à souligner au crayon rouge les arguments les plus saignants de son interlocuteur.  Autant dire que flics, crosseurs et chats fourrés (3) sortent de là en fixe-chaussettes. Le tout dure trois quarts d’heure à l’issue desquels, on n’est plus du tout tenté de faire confiance à la justice de son pays (la police, j’en cause même pas).
I
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l est temps de passer à la suite, vu que, quand  Jérémie Assous ne défend pas que la veuve, l’orphelin et les adeptes de « l’insurrection qui vient » (4),  il s’emploie à faire requalifier en contrats de travail légaux les conventions signées par les « candidats » des jeux de téléréalité. Il a d’ailleurs obtenu quelques jolis succès en la matière puisqu’il a déjà fait cracher TF1 des sommes plutôt rondelettes et qu’il s’apprête à remettre ça.  La jubilation de Pascale est à son comble. On la comprend, quand une chevalière blanche, rencontre un chevalier blanc, ça lui fait vachement plaisir d’entendre raconter des histoires de chevaliers immaculés luttant pour la Justice et la Liberté et le Salut de l’Humanité souffrante (les majuscules sont indispensables). Aussi, avec les quelques réserves qu’impose la morale dominante sur les émissions visées, elle en remet une louche à propos des malheureux exploités de l’Ile de la Tentation et de Kho Lenta.
Erreur fatale ! Jérémie, qui plaide plus vite que son ombre (il a raison, on approche de la fin de l’émission) laisse tomber tentateurs et aventuriers et enchaîne sur les CDD abusifs de Radio France en général et d’Inter en particulier. On apprend donc, dans les minutes qui suivent, que le Service Public de l’Audiovisuel est tout aussi doué que les canailles du privé pour prendre ses aises avec le code du travail.  Cette charge, menée sabre au clair, laisse, très brièvement, sans voix Madame Clark. Mais elle se reprend fissa et là le ton change. Finie la connivence, terminée l’empathie. Au grand théâtre des marionnettes de Radio France, il est permis et même recommandé de taper sur le gendarme, sur le juge (sauf quand il est petit) et, pourquoi pas, sur Gnafron (s’il est privatisé et travaille chez Endemol) mais défense de dire que Guignol, lui aussi, est manipulé. L’ambiance des dernières minutes de l’émission est du genre glaciale et l’on se dit que le gars Jérémie a eu raison d’en profiter : ce n’est pas sûrement pas demain qu’on va lui redemander de nous montrer « Comme on nous parle ».
Juste après, je suis tombé sur une émission où quelqu’un parlait, très bien, de feu Benedictus Spinoza lequel aurait dit « Croyant se battre pour leur salut, les hommes se battent pour leur esclavage ».  Décidément, le hasard et le seuil du Poitou ne font pas mal les choses.

Chambolle

(1) J’aime bien parler de moi à la troisième personne du singulier : c’est mon côté Alain Delon
(2) Je dis ça, par pure jalousie, vu qu’en dépit de campagnes répétées, je n’ai jamais pu me faire élire conseiller général. Pourtant j’aurais tant aimé inaugurer la salle polyvalente d’un chef-lieu de canton même poitevin et horizontal.
(3)  Ceci n’est pas une insulte, mais un hommage attendri à la série noire d’il y a cinquante ans
(4) Certains des « mis en cause » se seraient référés à cet opuscule.


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