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Lire en iran

Par Abarguillet

LIRE EN IRAN

Sous l’intolérance des pouvoirs iraniens

Quittant la péninsule arabique, nous rentrons en Iran, terre d’une grande culture où il est, hélas, bien difficile maintenant de rencontrer des écrivains pouvant s’exprimer librement sans risquer leur vie. Nous nous tournerons donc, une fois de plus, vers les auteurs de la diaspora : Saïd installé en Allemagne depuis 1965, Ali Erfan contraint à l’exil en France en 1981 et Freidoune Sahebjam né en France, de nationalité iranienne, qui a rejoint le pays de ses parents où il résida dans les années cinquante. Il fut lui aussi condamné par le régime, celui des ayatollahs en 1981 après avoir écrit le livre que je vous présente ci-dessous. Et, pour nous guider sur le chemin des exilés, nous mettrons nos pieds dans les pas de Chahdortt Djavann qui a connu, elle aussi, l’exil en France en 1993.

Je viens d’ailleurs

Chahdortt Djavann (1967 - ….)

« On me demande souvent d’où je viens. Cette question, je me la suis posée à mon tour, et ce livre est ma réponse. Je viens d’où je parle, je viens d’où je regarde. Je viens d’ailleurs. » Cette petite fille, elle pourrait être elle, Chahdortt Djavann, petite Iranienne d’une douzaine d’années qui rencontre l’histoire, celle qui s’écrit avec du sang et des larmes, un jour de 1979 quand les « pasdaran », les commandos islamiques, surgissent dans son lycée et massacrent les élèves révoltées contre la dictature mise en place par le régime islamique.

Chahdortt raconte dans ce petit livre et en quelques scènes la vie d’une gamine qui devient une jeune fille sous ce régime qui écrase le peuple et surtout les femmes qui sont ramenées à l’état animal, vouées à la procréation d’enfants, mâles de préférence. Ces années « elles m’ont appris que pour survivre il fallait renoncer à vivre ». Après les années lycée et la révolte, viennent les années d’étudiante et la soumission, le temps de l’exil et le retour pour trouver le vide, la culpabilité d’avoir échappé à ce monde, le désespoir, la résignation et un énorme gâchis.

C’est un livre de la révolte, de la douleur mais jamais de la résignation ni de la haine, c’est aussi un acte d’amour envers le pays qu’il l’a reçue et qu’elle a aimé. « Cette langue a accueilli mon histoire, mon passé, mon enfance, mes souvenirs et mes blessures. Cette langue m’a accueillie. Elle m’a adoptée. Je l’ai adoptée. Mais, quels que soient nos efforts mutuels, les vingt-quatre ans que j’ai vécu sans elle laisseront à jamais une lacune en moi. »

Chahdortt nous emmène dans sa douleur et dans sa révolte avec l’émotion, la douceur et la dignité qu’elle doit peut-être à la pratique de la langue perse qui se prête si bien à la poésie, mais qui n’altère en rien la puissance du témoignage et l’indignation qui envahit le lecteur qui croit ressentir jusqu’au fond de sa chair, toute cette violence gratuite et stupide répandue au nom d’un soi-disant dieu qui aurait été bien peu recommandable pour imposer un tel traitement à des âmes aussi innocentes. Un réquisitoire implacable contre tous les intégrismes qui envahissent notre monde.

Pour écouter le passionnant interview de l'auteur par Thierry Ardison, cliquer  LA 

Paysages d’une mère lointaine  de Saïd  ( 1947 - ... )

Né en Iran en 1947, Saïd a étudié en Allemagne, à Munich, où il a milité contre le Shah ce qui ne lui permit pas de revenir dans son pays. A la chute du régime, il put rentrer en Iran mais pas très longtemps car il s’opposa rapidement au nouveau régime qui le contraint à un nouvel exil toujours en Allemagne. Ce livre raconte sa rencontre avortée avec la mère qu’il n’a pratiquement pas connue, car ses parents se sont séparés peu de temps après sa naissance. Elevé par son père, loin de cette mère qui l’a abandonné, il accepte l’invitation d’un frère à rencontrer sa mère à Toronto mais cette rencontre est un échec et le narrateur tout comme Saïd a définitivement perdu sa mère. Saïd est un poète, son livre le dévoile mais les termes sont extrêmement durs envers cette mère qui l’a privé de sa présence et de son affection qui lui manquent tant.

Les damnées du paradis  de Ali Erfan  ( 1946 - ... )

Avec une écriture somptueuse, Ali Erfan propose quatre nouvelles qui mettent en scène des hommes et des femmes confrontés aux horreurs qui envahissent l’Iran depuis bon nombre d’années maintenant, la guerre, le meurtre, la violence gratuite. Des histoires pleines de désespoir qui contrastent avec une écriture jouissive qui inclinerait plutôt à l’optimiste. Des histoires qui l’ont conduit sur le chemin de l’exil, en France, car il a osé mettre en cause Dieu et le Coran comme instigateurs des violences que les Iraniens subissent, et font subir, et le pouvoir des mollahs orchestrateurs de toutes ces tristes manigances.

La femme lapidée  de Freidoune Sahebjam  ( 1933 - 2008 )

Sahebjam est né en France mais il a vécu une dizaine d’années en Iran après y avoir accompli ses obligations militaires dans les années cinquante. Il revient en France pour parfaire ses études et devient journaliste politique en 1979 quand il dénonce le pouvoir des ayatollahs qui le condamne immédiatement à mort. Cette condamnation ne l’empêche nullement de poursuivre son combat contre le régime islamique. « La femme lapidée » le fera reconnaître internationalement, c’est l’histoire véridique des dernières heures d’une jeune femme iranienne lapidée après une condamnation pour adultère. Un film sera tiré de ce roman en 2008, année de la mort de Sahebjam.

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