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Brahms - Perahia : rendez-vous manqué ?

Publié le 26 janvier 2011 par Philippe Delaide

Je conviens que le titre de cette chronique peut paraître assez expéditif. Cependant, le dernier enregistrement de pièces de Johannes Brahms par Murray Perahia m'a laissé un petit goût amer.

Il y a incontestablement de beaux moments, surtout dans les pièces qui doivent être jouées "forte" (les deux rhapsodies opus 79 en si et sol mineur, la Ballade des six klavierstücke opus 118, le fébrile et saccadé Intermezzo en en mi mineur de l'opus 119). Le jeu incisif et le toucher charnu de Murray Perahia font sonner le Steinway avec une densité étonnante.

Brahms Perahia 1
En revanche, pour les pièces aux harmonies complexes, enchevêtrées, quasiment insolubles sur le plan de l'interprétation (comme le fameux 2ème Intermezzo de l'opus 118), la volonté de rectitude du pianiste américain contraint de façon exagérée les différentes expositions. Il y a inconstestablement une certaine volonté de lisibilité, de clarté mais elle se fait au détriment de la respiration et, de façon étonnante, de la transparence. On attend plus de relâchement sur ces pièces pour que la richesse harmonique des pièces brahmsiennes puisse se déployer de façon généreuse. C'est là que réside justement le lyrisme chez Brahms. L'exercice est d'autant plus délicat qu'il faut conserver un contour assez net des différents motifs qui se juxtaposent. Il s'agit indéniablement d'une gageure que très peu de pianistes ont réussi à relever (pas totalement toutefois) (Julius Katchen, Peter Rösel, Glenn Gould).

Le Brahms de Murray Perahia est donc droit, autoritaire, imperturbable, altier mais ne nous émeut pas une seconde. C'est là qu'est donc le problème. On est dans un exercice avant tout pianistique, plus que dans une lecture narrative, engagée qui aurait pu nous faire voyager dans les nombreux méandres que, pourtant, Brahms nous propose à maintes reprises (les photos du disque et du livret trahissent d'ailleurs cette approche : un Murray Perahia dans un environnement d'une dénuement total, type ambiance studio, histoire de nous faire comprendre qu'on n'est pas là pour se laisser distraire...).

Le comble est la série de vingt-cing variations sur un thème de Haendel opus 24 : je n'ai pas pu aller au delà de la troisième.

Attendons le prochain disque du maître.

Johannes Brahms - Variations sur un thème de Haendel opus 24, deux rhapsodies opus 79, Klavierstücke Opus 118 et 119 - Murray Perahia (piano) - Label Sony Classical.


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