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Hortefeux, Alliot-Marie : le grand retour des ministres-fusibles

Publié le 03 février 2011 par Juan
Hortefeux, Alliot-Marie : le grand retour des ministres-fusiblesSi Nicolas Sarkozy s'est réfugié dans un silence médiatique pesant sur l'actualité du pays, il n'en demeure pas moins bien actif en coulisses. Après l'affaire Pornic, où il s'est laissé « débordé » par une une émotion incontrôlée, voici qu'il fait recadrer son ami Brice par son fidèle Guéant. Et Michèle Alliot-Marie, sa ministre des affaires étrangères embourbée dans des polémiques tunisiennes depuis la mi-janvier, est emportée dans un double scandale, un voyage privé ... et des bombes lacrymogènes.
Brice recadré
La gronde lui a fait peur. Nicolas Sarkozy a besoin des policiers. Depuis quatre jours, des centaines de CRS se portaient pâle, voire en grève de la faim, pour protester contre la fermeture annoncée de 8 casernes (sur 61). Dès lundi 31, Sarkozy cède. Nicolas Comte, secrétaire général du syndicat des gardiens de la paix SGP-FO, a été reçu à l'Elysée dans la matinée. Quelques heures plus tard, Claude Guéant « recadre » Hortefeux et lui fait annoncer à la presse qu'il n'y aura aucune fermeture. Evidemment, la Présidence dément avoir donné une quelconque instruction.
Mercredi, le ministre s'explique dans les colonnes du quotidien la Provence. La compagnie CRS 54 de Marseille devait être fermée, avant la décision de lundi soir. Hortefeux plaide le malentendu : « Pour que je renonce il aurait fallu qu'il y ait annonce! A aucun moment je n'ai annoncé de fermeture. Il y a eu des rumeurs colportées. C'est naturellement faux. » Mercredi 26 janvier, il avait confirmé que des études pour fermer des casernes CRS étaient en cours. Les CRS grévistes marseillais avaient clairement compris que leur compagnie 54 faisait partie du lot. Il le confirmait à nouveau ce mercredi (« Des études ont effectivement été menées sur le redéploiement de deux compagnies.») Et il annonce même un renforcement des moyens policiers à Marseille (140 hommes) : « il y a trois compagnies de CRS basées à Marseille, soit 420 policiers actifs et aucune de ces compagnies ne sera supprimée



MAM sacrifiée ?
MAM va mal. La révélation, mercredi, par le Canard Enchaîné, que la ministre des affaires Etrangères avait utilisé en décembre le jet privé d'un proche de Ben Ali tunisien lors d'un déplacement intérieur. Michèle Alliot-Marie avait reconnu avoir passé quelques jours de congés à Noël en Tunisie « comme des millions de Français » avec son compagnon et secrétaire d'Etat aux relations avec le parlement Patrick Ollier. Les manifestations contre le pouvoir en place avaient débuté, depuis l'immolation par le feu d'un jeune le 17 décembre à Sidi Bouzid. Le cabinet de la ministre a immédiatement confirmé le voyage (« C'était à l'invitation de Aziz Miled, un ami depuis plusieurs années, qui est le propriétaire d'une compagnie aérienne appelée Nouvelair. Aziz Miled était dans l'avion et les a emmenés, avec ses parents et son conjoint »), mais en précisant que l'homme d'affaire n'était pas un proche de Ben Ali: il se serait fait chiper 20% de sa compagnie aérienne par Belhassen Trabelsi, beau-frère de l'ex-président Zine el Abidine Ben Ali, qu'il a récupéré depuis le changement de régime. En fait, il est bien difficile de distinguer ce qui relevait du racket du reste dans les relations d'affaires, nombreuses et anciennes, de M. Miled avec le clan Trabelsi/Ben Ali. Et là n'est pas la question : deux ministres de la République ont accepté, lors d'un voyage privé, une invitation en jet d'une compagnie contrôlée par la famille Ben Ali.
Mais ce n'est pas tout. François Fillon a répondu lundi dernier par écrit à une question de Jean-Marc Ayrault, président du groupe socialiste, relative « aux exportations et autorisations d'exportations de matériel de maintien de l'ordre à destination de la Tunisie.». Et la réponse laisse pantois tant le premier ministre, que l'on aime décrire comme courageux, se défausse sur ses ministres quand il confirme le pire : primo, il valide ce que l'on craignait. Le gouvernement français, le 12 janvier dernier, a bien délivré, en urgence (i.e. en 24 heures), deux autorisations d'exportations de grenades lacrymogènes à son homologue tunisien.
Secundo, Fillon prend soin de préciser qu'il n'y est lui-même pour rien : en tant que premier ministre, ce type d'autorisation ne lui serait pas remontée. Il indique que cette exportation a été avalisée par les ministères de l'intérieur (Hortefeux), de la Défense (Juppé) et des Affaires Etrangères (MAM). Tertio, vendredi 14 janvier, Ben Ali a fui la Tunisie, quand un lot de grenades parvient aux Douanes de Paris pour un contrôle habituel. Les douaniers ont la présence d'esprit de bloquer le chargement en demandant si l'autorisation d'exportation vaut toujours compte tenu du changement de régime. Les services de Michèle Alliot-Marie répondront par l'affirmative... le 18 janvier. 
Voici donc MAM, l'une des ministres à l'incroyable longévité gouvernementale, qui semble sacrifiée sur l'autel de l'efficacité électorale. 


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