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Mankell est inquiet

Par Interlignesmartigues

Par Jean-Marc Cuccuru.

Fin de vies, fin d’un monde : les deux derniers romans du romancier suédois, best-seller international, semblent raconter la même histoire d’un siècle qui n’en finit pas de mourir, malgré quelques notes d’espoir.

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L'homme inquiet ; Les chaussures italiennes / deux romans de Henning Mankell (Eds. du Seuil, 2009, 2010)

Dans L’homme inquiet on retrouve, pour un ultime récit, le personnage de polar qui a fait la gloire d’Henning Mankell : le commissaire Kurt Wallander. Ultime récit car, à la fin du roman, Wallander meurt. Roman en forme de récapitulatif d’une vie et d’une série policière qui compte 9 titres : plusieurs personnages, croisés lors des précédents romans, refont leur apparition, comme un par soucis de commémoration, alors même que le héros est sujet à des pertes de mémoires inquiétantes… La mort, le deuil, le chagrin, le peu d’espoir en l’avenir imprègnent ce roman, plus sombre que noir… 

Dans Les chaussures italiennes, roman de facture plus classique, on retrouve une forme d’alter ego à Wallander : Fredrick a passé la soixantaine, il a des soucis de santé, et comme pour le commissaire le passé surgit soudain devant lui, l’obligeant à un retour douloureux sur lui-même, son parcours, sa vie…

Fredrick, comme Kurt, vit dans un lieu isolé du monde, tentant désespérément de vivre une autarcie illusoire, sans d’autres souvenirs que météorologiques, renvoyant au lendemain toute implication synonyme d’un à-venir. Kurt est victime d’alzheimer, Fredrick feint d’avoir oublié le passé, deux faces d’une même lâcheté condamnée par l’auteur … A force de vivre parmi les ombres, de s’échapper du monde comme il ne va pas, Kurt et Fredrick deviennent eux aussi des spectres.

Ces deux romans marquent une sorte de rupture à venir dans l’œuvre de Mankell : l’espoir, dans ces livres, ne vient pas des héros vieillissants, mais d’une jeunesse en colère décidée à affronter le monde pour le changer. Les chaussures italiennes est l’un des meilleurs livres de Mankell, d’une grande tristesse, émouvant, il ne cesse d’évoquer constamment la mort (celle des proches, celles d’animaux de compagnie, chien, chat, celles d’adolescents perdus, celles de mers qui se transforment en marécages nauséabonds), la peur de la maladie, la peur de la vieillesse, la peur de la solitude…

On trouve cependant dans ce très beau et très mélancolique roman quelques motifs d’espérer, toujours incarnés, ce n’est pas un hasard, par des figures féminines fortes. On ne sait toujours pas si « la femme est l’avenir de l’homme », mais pour Mankell, le doute ne semble plus permis… 

« Après, il n’y a plus rien. Le récit sur Kurt Wallander s’arrête. »

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