Lettre ouverte à monsieur le maire de Lomme

Au Moyen Age, le territoire de Lomme était contrôlé par quatre seigneurs : celui de Lomme tout d'abord, qui contrôlait le secteur du Bourg et d'une partie de la Délivrance ; les chanoines de la collégiale Saint-Pierre de Lille, qui étendaient leur influence sur le bord du Bourg et la Mitterie ; les moines de l'abbaye de Loos, qui exerçaient leurs droits sur une grande partie de la Délivrance et du Marais ; les chevaliers de l'Ordre du Temple enfin, qui possédaient une ferme, la Haye du Temple, sur le reste du territoire du Marais (de la rue Winston Churchill à l'avenue de Dunkerque) et sur Canteleu. Les croix pattées de l'ordre du Temple  qui ornent encore certaines façades sont là pour en témoigner.
On peut ne pas approuver leur domination féodale. La Révolution française, en instaurant la démocratie, en a d'ailleurs eu raison. Il n'empêche qu'ils mirent en valeur ce terroir et lui permirent de trouver sa place dans l'économie locale. ce secteur, après avoir été très industriel au siècle précédent, subit aujourd'hui une forte mutation : mise en place d'Euratechnologies, construction du quartier des Rives de la Haute-Deûle, transformation du site de l'ERCAT.
Au cours de la réunion publique qui s'est tenue ce mardi soir à la mairie, j'ai découvert que la nouvelle voie qui traversera ce site sera baptisée rue Victor Schoelcher. Cette personne qui a lutté pour l'abolition de l'esclavage est un bienfaiteur de l'humanité et a un juste droit à sa reconnaissance. Néanmoins, je trouve dommage qu'aucune dénomination de rue qui nous a été proposée ou annoncée jusqu'à présent ne fasse allusion au passé de cette partie du Marais. Quel inconvénient y aurait-il à dénommer l'une de ces rues la rue de la Haye du Temple, la rue de la Ferme du Temple ou la rue des Templiers. Les cartes montrent qu'en 1935 et 1955 encore, ces dénominations étaient reconnues. Le site de l'ERCAT était d'ailleurs appelé Le Grand Temple. Il subsiste aujourd'hui aux Archives départementales, sous la cote 164 H, un fonds de documents de cette ferme à l'époque des XVII° et XVIII° siècles. Cette ferme a également été photographiée de nombreuses fois avant sa destruction en 1923.
Monsieur le maire, l'historien (je suis maître en histoire et membre de la commission locale d'histoire) n'est pas un nostalgique du passé. Il sait aussi montrer les univers du possible. Les visites guidées que j'ai pu mener auprès des enfants des écoles ou des collèges, auprès des adultes m'ont montré que le marquage du passé dans le territoire est important, qu'il donne à celles et ceux qui sont dans le doute un sol plus ferme sous leurs pas, un tremplin pour mieux rebondir vers l'avenir.
C'est pour toutes ces raisons, monsieur le maire, que j'espère que vous voudrez bien donner une suite favorable à cette demande, qui est l'expression d'une notable partie de la communauté lommoise.
Je vous prie de croire, monsieur le maire, en l'assurance de mes sentiments les meilleurs.
Frédéric Faucon