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Nouveau Talleyrand

Publié le 17 février 2011 par Malesherbes

Ému par le sort de notre compatriote Florence Cassez, emprisonnée à vie au Mexique, notre Président a déployé des efforts pour aménager sa peine. Il lui a donc fallu engager une négociation, démarche dans laquelle peut se déployer l’habileté d’un homme d’État. Même sur des sujets moins graves que celui-ci, par exemple pour réussir la vente d’un produit, on enseigne que la première étape d’une telle entreprise consiste à tenter de se mettre à la place de son interlocuteur. Non pour adopter sa position mais plutôt pour déterminer comment l’amener à la nôtre. C’est vraisemblablement une approche totalement étrangère au génie absolu qui nous gouverne.

Je vais donc tenter d’éclairer sa lanterne (pas le pavillon de Versailles, bien sûr). Projetons-nous donc à quelques mois ou années d’ici et supposons que Tony Meilhon, l’assassin présumé de Laëtitia Perrais, ait été jugé et que, tous les appels épuisés, il purge en France une peine de réclusion criminelle à perpétuité. Imaginons en outre que cet individu soit de nationalité mexicaine. Comment réagirait Nicolas Sarkozy si le Président Calderon se prononçait publiquement contre le scandale constitué par la détention de son compatriote, arrêté et jugé dans des conditions troubles ? Notre Président n’hésiterait pas une seconde à dénoncer cette insupportable mise en cause de notre justice et cette inqualifiable ingérence dans les affaires intérieures de la France. Accepterait-il qu’au Mexique, le nom de Tony Meilhon  soit en toute circonstance associé à celui de la France?

Allons plus loin. On peut supposer, bien que je ne sois pas en mesure d’apprécier la vraisemblance d’une telle hypothèse, que le Président mexicain éprouve lui-même des doutes sur la culpabilité de Florence Cassez. Même si la sécurité en France est un souci, notre situation n’est en rien comparable avec celle du Mexique où meurtres et enlèvements se comptent par milliers. M. Calderon doit bien prendre en compte son opinion publique qui n’accepterait pas de voir celle qu’il tient pour une criminelle dûment condamnée bénéficier d’une réduction ou d’un aménagement de sa peine. Si l’on veut faire avancer une négociation, il importe tout d’abord d’user de discrétion. Ce n’est qu’à l’abri des regards qu’une évolution pourra se dessiner. Les gesticulations de matamore et les moulinets d’estrade ne peuvent être que contre-productifs.

Autre point : la France est la sixième puissance économique mondiale, le pays des droits humains (enfin, à ce qu’il paraît), un des fondateurs de l’Union européenne, avec un passé glorieux et une culture au rayonnement universel. Mais ses dirigeants pêchent beaucoup trop souvent par arrogance. Souvenez-vous de Jacques Chirac reprochant en 2003 aux futurs nouveaux membres de l’Union, issus de l’ancien bloc communiste, d’avoir « été à la fois pas très bien élevés ». Plus près de nous, lorsqu’en 2008 la France présidait le Conseil européen, Nicolas Sarkozy ne se privait pas de s’entendre avec l’Allemagne, ignorant d’autres puissances aussi négligeables que l’Italie ou l’Espagne et faisait preuve tout récemment de la même incorrection à l’égard de la Pologne. Alors, vous pensez, le Mexique, un pays pas même capable de nous acheter des centrales nucléaires, un pays que ses habitants, coiffés de sombreros ridicules, quittent par milliers, quantité négligeable.  Méprisant devant ceux qu’il considère comme inférieurs, à plat-ventre devant les puissances montantes, telle la Chine, voilà le piètre Talleyrand qui nous dirige.


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