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Sarkozy : 4 ans d'immobilisme agricole.

Publié le 21 février 2011 par Juan
Sarkozy : 4 ans d'immobilisme agricole.Il est venu sans Carla, et il n'est resté que 4 heures. Il a caressé des grosses vaches et de petits moutons. Il a mangé du Munster à 9 heures du matin. Christian Jacob, l'ancien syndicaliste agricole qui reproche à Dominique Strauss-Kahn de ne pas incarne la « France des terroirs » accompagnait l'ancien avocat d'affaires de Neuilly-sur-Seine. Le monde semblait content, même les éleveurs en colère. Nicolas Sarkozy a inauguré samedi 19 février le Salon de l'Agriculture à Paris. Depuis un an, il les a cajolé, et sa cote de popularité, paraît-il, remonte. « Le travail commence à payer. Grâce à ces dizaines de tables rondes, les agriculteurs ont compris que le président était prêt à les défendre » a expliqué un conseiller élyséen au Figaro. Pourtant, on a du mal à répertorier les actions concrètes que Nicolas Sarkozy a engagé depuis 2007 en faveur du monde agricole.
2007-2011, quatre ans pour rien
En 2007, Nicolas Sarkozy a bien glissé quelques flatteries ici ou là pour les agriculteurs. Sa cote de popularité dépassait les 85% paraît-il. Mais en matière de réforme, Sarkozy n'avait pas beaucoup d'idées. Il préférait le bouclier fiscal, les peines planchers, et les heures supplémentaires défiscalisées. des concepts qui portent peu en terre agricole, sauf dans les grandes entreprises. L'agriculture restait le terrain favori de Jacques Chirac. Or le président Bling Bling n'aime pas déguster fromage et vins de terroir à volonté. L'homme préfère bâfrer du chocolat quand il reçoit ses invités au chaud à l'Elysée.
En février 2008, pour son premier Salon de l'agriculture, Sarkozy promet de réformer la PAC par anticipation, afin de redistribuer les aides aux secteurs les plus fragiles. Quelques mois plus tard, pendant la présidence française de l'Union européenne, Sarkozy ne fait toujours rien, à part causer. La réforme de la PAC est pour 2013. La crise déboule fin 2008. Elle frappe les agriculteurs plus tôt que les autres, à cause de la flambée des prix de l'énergie dès le début de l'année. En 2010, les prix du blé ont doublé en moins d'un an. Ils frisent un record historique, 300 euros la tonne. Les éleveurs, gros consommateurs de céréales pour leur bétail, souffrent. Sarkozy ne réagit pas. Le monde agricole s'agace, mais proteste peu. Le Sarkozy de l'an I défie un pêcheur qui l'alpague, et traite un visiteur du Salon de « pov'con.»
En janvier 2009, une grosse tempête baptisée KLAUS, couche sur terre suffisamment d'arbres pour que le Monarque soit contraint à réagir. Pour la filière bois, Sarkozy offre en urgence des prêts bonifiés 4 mois après la tempête. Il promet des simplifications administratives (suppression du permis de construire pour les travaux d'isolation thermique des habitations par l'extérieur; augmentation du bois dans les normes des constructions neuves, simplification des procédures d'appel d'offre de la Commission de Régulation de l'Energie ) et, seule mesure financière concrète de moyen terme, une augmentation du tarif de rachat d'électricité pour les unités moyennes de production d'électricité à partir de bois. Deux ans plus tard, les maires de communes forestières sont déçus, voire inquiets par des projets de privatisation de la gestion de leurs forêts.
En juillet 2009, pour montrer qu'il aime les pêcheurs, il laisse Jean-Louis Borloo organiser un Grenelle de la Mer. En octobre 2009, Sarkozy promet un milliard de prêts bancaires et 650M€ de « soutiens exceptionnels de l'Etat. »
On moque ses discours, répétés mot pour mot, sur l'identité agricole française. Tout au long de l'année, les incantations en faveur « d'une véritable régulation des marchés de matières premières agricoles, afin de limiter la spéculation croissante et d'encadrer les produits financiers dérivés sur ces marchés » ont été nombreuses, quasiment à chaque déplacement de terrain.
En mars 2010, Sarkozy sèche l'inauguration du Salon de l'Agriculture. Il a peur des sifflets. Il débarque le dernier weekend, à l'improviste, avant l'ouverture au public, pour une table ronde cachée dans un recoin du salon. Les élections régionales sont proches. La débâcle aussi. Il réitère que l'Etat va augmenter l'enveloppe de prêts bonifiés pour les agriculteurs en difficulté de quelques 800 millions d'euros. Le coût réel pour les finances publiques n'est que de 50 millions d'euros. Les agriculteurs sont paraît-il
En mai 2010, Sarkozy fait signer des accords de modération des marges aux représentants de la filière fruits et légumes et de la grande distribution. Mais aucun prix plancher n'est défini si bien que les producteurs ne sont pas protégés contre des ventes à perte. En fait, la seule obligation faite à la filière est de conclure des contrats. Tout le reste est négociable.
En juillet 2010, la loi de Modernisation agricole est votée. Ses décrets d'application sont publiés le 31 décembre. Pour « garantir le revenu des agriculteurs et des pêcheurs » et renforcer leur compétitivité, la loi allège les contrôles environnementaux, créé un fonds national de gestion des risques, prévoit de reverser 35% du produit de la taxe sur les installations éoliennes offshore au comité national des pêches maritimes et des élevages marins, et impose une contractualisation des relations entre les producteurs et leurs acheteurs dans les secteurs du lait et des fruits et légumes.
En octobre 2010, Sarkozy glisse un régime dérogatoire pour la retraite des agriculteurs. Le chantre de la suppression des régimes spéciaux en a créé un ... pour l'agriculture.
En novembre 2010, Sarkozy est tout heureux de recevoir les premières propositions de la commission européenne pour la réforme de la Politique Agricole Commune (PAC) à compter de 2013, avec notamment le maintien du soutien des prix.  En janvier 2011, en Alsace, il promet l'instauration d'un prix attractif de rachat de l'énergie produit par méthanisation, mais cela fait des mois que la décision tarde.
Au final, il a beaucoup parlé, s'est beaucoup agité, mais a peu donné. Les résultats sont minces, voire inexistants. Mais au moins, à un an des élections, il « écoute ».
2011, le candidat Sarko flatte les croupes
Ce samedi 19 février, Nicolas Sarkozy est venu à 8h25. Il s'agissait d'éviter le vrai bain de foule. Sa visite fut quand même bousculée. Il parcouru les travées du salon à la rencontre des éleveurs, encerclé par une nuée de journalistes, des gardes du corps, et quelques officiels de circonstance (le ministre de l'Agriculture Bruno Le Maire, le président des députés UMP Christian Jacob, le nouveau président de la FNSEA Xavier Beulin). Il avait sorti le costume italien rayé noir. Difficile de l'approcher. Son épouse Carla n'était pas là. Huit heures un samedi matin au milieu du crottin, c'est sans doute trop tôt, et pas assez glamour pour l'extatique épouse du Monarque. On pouvait lire qu'il faisait une « visite à la Chirac », car son ancien mentor contre lequel il se fit élire avait institué ce marathon agricole de janvier Porte de Versailles comme une tradition républicaine.
Deux heures plus tard à peine, le président français s'était réfugié dans un recoin, pour une table ronde avec 7 agriculteurs que ses conseillers avaient sélectionnés. Dans la tribune, l'assistance était composée de fonctionnaires du ministère de l'agriculture. Sarkozy ne voulait pas de syndicalistes grincheux ou de contestataires professionnels. Sur place, on retient qu'il n'avait pas apprécié la récente campagne « particulièrement déplacée » de France Nature Environnement (FNE) contre les OGM, les pesticides et les algues vertes. L'homme du « casse-toi pov'con » de 2009 a pu s'exclamer : « Je ne laisserai pas insulter les agriculteurs. On n'oppose pas les Français les uns contre les autres (...) On ne combat pas l'intolérance en étant intolérant
Il s'est aussi félicité : « La France est le seul pays du monde à dénoncer la spéculation. » Sarkozy s'indigne beaucoup. Certains esprits crédules confondent encore cela avec de l'action. Et sans rapport avec les préoccupations de l'assistance, il a déroulé quelques thèmes de sa campagne : les méchantes 35 heures de la gauche et leur « détestation du travail », les futurs débats sur la  laïcité et l'islam qu'il a demandé à l'UMP de lancer : « Je n'accepterai pas que l'on mette en cause nos compatriotes musulmans et en même temps je n'accepterai pas un islam qui ne corresponde pas à aux valeurs de la République et de la laïcité. Et toujours pareil on essaie de monter les uns contre les autres, moi j'essaye de rassembler ». Le candidat Sarkozy est en roue libre.
Ce déplacement au Salon de l'agriculture n'était qu'électoral. Les champs sont si éloignés de l'Elysée. Nicolas Sarkozy aime les agriculteurs quand ils votent... pour lui.  Ce samedi, Alain, un éleveur du Cantal, eut cette conclusion lucide : « Il ne faut pas penser à l'agriculture à un an seulement des élections. Cela fait quatre ans qu'il fallait y penser. Jusqu'à présent, il ne nous a jamais entendus. (...) Il est de la ville et la campagne, il aime pas ».


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