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Lock-out dans la NFL: les enjeux

Publié le 03 mars 2011 par Sixverges
Lock-out dans la NFL: les enjeuxPour le deuxième article de cette série sur le lock-out imminent dans la NFL, on regarde plus à fond les points d’achoppement dans les négociations entre la ligue et la NFLPA. Je ne pense pas avoir besoin de vous dire que tout ça tourne autour de l’argent…. de la bien grosse argent!!!
Ceux qui sont intéressés (et ont du temps à perdre) peuvent prendre connaissance de l’ancienne convention collective ici. Une toute petite lecture de 299 pages, un peu trop long pour votre pause au bureau je crois!
-Le problème principal: le % de participation des joueurs aux revenus-
Si la saison de 18 parties et le plafond salarial des recrues ont davantage attiré l’attention médiatique, le problème majeur à régler est celui du partage des revenus entre joueurs et propriétaires. La NFL est une immense machine à générer du cash, on parle ici de 9 milliards (9 000 000 000 $!!!!) par année. Tous ces beaux bidous sont répartis entre joueurs et proprios selon l’entente suivante: les proprios gardent le premier milliard pour eux, alors qu’environ 60 % des 8 milliards restants vont aux joueurs, principalement en salaires.
Cette entente fut signée et acceptée par les propriétaires par un vote de 30 contre 2 en 2006. Ironiquement, les 2 récalcitrants étaient Ralph Wilson (Bills) et Mike Brown (Bengals), 2 des proprios les plus radins de la ligue. Désavoués par leurs pairs au moment du vote, ces derniers peuvent aujourd’hui rire dans leur barbe, leurs 30 confrères leur emboitant maintenant le pas. En effet, la présente convention collective aurait pu durer 2 ans de plus, une option que les patrons ont choisi de ne pas exercer. De leur côté, les joueurs sont prêts à reconduire intégralement la précédente entente, signe évident qu’ils sont sortis vainqueurs de la dernière négociation.
Les propriétaires désirent maintenant retrancher 1,4 milliard supplémentaire de la tarte avant la redistribution des revenus. Ils garderaient donc les 2,4 premiers milliards et le reste serait partagé au même taux qu’actuellement. Concrètement, les joueurs perdraient 840 millions (1,4 milliard X 60 %), soit environ 25 000 000 $ de moins par équipe sur le plafond salarial. C’est substantiel. Les proprios tentent de faire passer la pilule en affirmant que l’argent épargné irait en promotion et permettrait de créer plus de revenus (donc une hausse des salaires futurs), mais c’est de la poudre aux yeux. Les dépenses de promotion se feront de toute façon. Le nouvel argent servira surtout à générer plus de liquidités pour payer les stades, tel que discuté dans le premier article sur le conflit de travail.
On s’en doute, plusieurs aspects de cette demande déplaisent aux joueurs. Ces derniers demandent avec insistance à leurs patrons d’ouvrir complètement les livres. La NFLPA a accès aux revenus des équipes ainsi qu’aux dépenses salariales, mais c’est tout. Le refus obstiné des proprios de montrer le reste des données financières fait bien entendu craindre la magouille. Sans aller jusque là, un audit indépendant des autres dépenses pourrait étaler au grand jour un autre aspect de cette négo qui horripile les joueurs, soit le partage des revenus entre les équipes. Personne n’est contre l’idée que les équipes les mieux nanties aident celles qui le sont moins, c’est la base même du succès de la NFL. Cependant, le système actuel n’est plus adapté à la nouvelle réalité des stades financés par des fonds privés. En effet, le partage se fait selon les revenus, les 15 meilleurs à ce chapitre sortant leur chéquier à l’avantage des 17 derniers. On peut présumer que c’est cette dépense qui fait chuter les profits des Packers par rapport aux autres équipes (Green Bay est 15e pour les revenus, donc payeurs dans le partage des revenus, mais seulement 27e pour les bénéfices d’exploitation). L’ennui est que ce système ne tient pas compte des dettes. Par exemple, un club classé 12e dans les revenus, mais devant supporter une forte hypothèque doit présentement verser des sommes importantes à un adversaire, 18e au plan des revenus, mais sans dette majeure, donc nettement plus rentable. Un non-sens qui n’est pas facile à régler, chaque propriétaire tirant la couverte de son côté. Les joueurs ont donc raison d’affirmer que la NFL tente de régler sur leur dos un problème qu’ils n’ont pas le courage d’affronter à l’interne. D’autant plus qu’on se doute bien que les propriétaires dont les équipes viennent au 16e, 17e ou 18e rang pour les revenus ne tiennent pas nécessairement à trop progresser à ce niveau et à se retrouver au rang des payeurs.
Tout cela n’ébranle pas le front uni des propriétaires qui tiennent mordicus à la réduction de la part versée aux joueurs. Les plus ardents défenseurs de cette position (Robert Kraft, Jerry Jones, Mike Brown) sont d’ailleurs sur le comité de négociations, une preuve claire de la détermination de la ligue. Toutefois, personne n’est plus agressif dans ce débat que Jerry Richardson des Panthers. En avril dernier à la rencontre annuelle des proprios, il y est allé d’un discours senti, urgeant ses collègues à « reprendre le contrôle de notre ligue » et à récemment envoyé paître Peyton Manning et Drew Brees, deux des joueurs les plus respectés. Sans surprise, ce faucon siège aussi au comité de négociations. Il faudra peut être le mettre en cage pour espérer régler ce conflit!
Comme d’habitude dans ces dossiers, beaucoup de faux ballons seront lancés, juste pour biaiser l’opinion publique. Le dernier en lice provient des joueurs. Ils ont proposé de séparer tous les revenus 50-50 dans le futur. Sur papier, ils semblent accepter une diminution salariale de 10 %, ce qui serait une concession majeure. Dans les faits, le 50-50 est sur la totalité des revenus, incluant le milliard déjà réservé aux proprios. Cette proposition revient donc à une réduction salariale globale d’environ 250 000 000 $, ce qui est loin du compte.
-Le plafond salarial pour les recrues-
Dans ce dossier, c’est la ligue qui beurre épais. Sachant qu’il s’agit là de son point le plus vendeur dans l’opinion publique, Roger Goodell ne manque jamais de rappeler l’énormité des salaires versés aux recrues « qui n’ont encore rien prouvé ». Dans les faits, la NFLPA a déjà fait une proposition en ce sens.
Les joueurs seraient prêts à instaurer une limite sur les contrats signés par les recrues, mais voudraient en contrepartie que ceux-ci n’aient qu’une durée de 3 ans (5 à 6 ans actuellement). Les joueurs seraient donc agents libres beaucoup plus tôt, mais estiment que la ligue sauverait ainsi 200 M$ par année en contrats garantis. Le syndicat propose de créer un fond qui permettrait d’ajuster les salaires des joueurs de 2e ou 3e année, selon la performance. Le but étant de récompenser les méritants après le fait. Car on oublie que si les choix hâtifs signent des contrats astronomiques, ceux des rondes subséquentes sont aussi engagés à long terme, mais à faible coût. L’exemple le plus utilisé est celui de Chris Johnson qui ne devait gagner que 550 000 $ après sa saison de 2000 verges en 2009. Un tel système lui permettrait un ajustement de salaire immédiat et automatique plutôt que de placer les parties impliquées dans une position comme l’an dernier où Johnson avait menacé de ne pas se présenter au camp d’entraînement pour obtenir une augmentation méritée. Selon la proposition soumise, 150 des 200 millions économisés iraient dans ce fond, la balance devant servir à améliorer le régime de retraite et le plan de santé des joueurs. La durée proposée des contrats (3 ans) ayant fait bondir la partie patronale, le syndicat s’est dit prêt à accepter des ententes de 4 ans. Pourtant, en raccourcissant la durée des contrats, les équipes pourraient effacer plus rapidement, et à moindre coût, leurs erreurs au repêchage.
Du côté de la NFL, peu d’offres concrètes ont été déposées à ce jour sur ce point. Les premiers échos font état d’une offre de 100 millions qui iraient à la caisse de retraite, sans changer la durée des ententes. De toute façon, il y a consensus sur la nécessité d’agir à ce niveau, donc on peut présumer que ce n’est pas là-dessus qu’achopperont les négociations. Et on peut aussi affirmer que Sam Bradford aura été la dernière recrue à toucher le gros lot.
-La saison de 18 matches-
Voici un autre sujet fort populaire dans les médias, mais qui ne devrait pas soulever les passions trop longtemps dans les négociations. Considérez-le comme un fait accompli. Les joueurs chialent et traitent la ligue d’hypocrites vu les risques de blessures, mais en analysant le ton, on voit plus clair dans leur jeu. Ils affirment ne pouvoir accepter 2 matchs de plus « tels que proposés » ou « sous le système actuel »… L’équation qu’ils font pour l’instant est qu’on leur demande de jouer plus de matchs pour un salaire moindre. On comprendra que la perspective ne les enchantent pas, mais il semble probable que la NFLPA utilisera l’opposition des joueurs à cet ajout pour faire des gains ailleurs dans la convention. Bref, les joueurs voudront monnayer leur appui, mais il serait très surprenant que la prochaine saison complète de football n’ait pas 18 matchs.
Évidemment, ces 2 rencontres supplémentaires représentent un apport financier non-négligeable dans les coffres de la ligue. L’estimation des propriétaires est de 500 M$, provenant surtout de droits de télé accrus. Il est vrai que l’impact sur les revenus au guichet serait mince puisque le même nombre total de rencontres (10) serait disputé, que la plupart des stades sont tous vendus par billets de saison et que la NFL facture le même prix pour les parties hors-concours que pour celles du calendrier régulier. Néanmoins, l’estimation semble un peu faible, surtout considérant qu’ESPN à eux seuls paieront plus que ça. http://www.6vergesetlesbuts.com/2011/01/pres-2-milliards-par-annees-pour-le.html Comme quoi, dans ce conflit, différencier le vrai du faux sera un aussi gros défi que de négocier une entente!
-Les caisses de santé et de retraite-
On en entend parler ici et là, (Mike Ditka est très attaché à la cause des anciens joueurs), mais toute valable qu’elle soit, cette cause risque encore une fois de passer loin derrière les autres enjeux. Néanmoins, le fait de voir que les 2 parties semblent vouloir diriger des sommes d’argent du « rookie pool » en direction des fonds de retraite et fonds d’aide à ceux qui ont des problèmes de santé causés par le football est une bonne initiative.
-Les égos impliqués-
Souvenez-vous de l’année perdue dans la LNH. L’animosité entre Bettman et Goodenow était telle qu’il a fallu que ce dernier démissionne pour que le conflit se règle. Heureusement, la relation entre Roger Goodell et son vis-à-vis de l’association des joueurs DeMaurice Smith n’est pas aussi mauvaise. Mais elle n’est pas très bonne non plus, les 2 hommes n’ayant aucun atome crochu. Nous sommes très loin du duo Upshaw-Tagliabue dont la relation de travail était presque amicale. Jusqu’à présent, l’ambiance est à la confrontation et la méfiance. Les parties semblent plus vouloir se défier que négocier de bonne foi, ce qui ne peut qu’avoir un impact négatif sur la possibilité de règlement. Il ne faut pas oublier que les 2 belligérants en sont à une première expérience à leur nouveau poste, donc ils voudront se faire une belle jambe auprès de leurs constituants. Il faudra faire attention que ces objectifs personnels ne deviennent pas plus importants que le conflit lui-même!
Comme vous voyez, les deux parties sont encore loin d’une entente. Dans le dernier article de cette série, nous traiterons des conséquences du lock out ainsi que de la bataille juridique qui se dessine.
-ARTICLE ÉCRIT PAR JR-

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