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Préventeur IPRP, un métier au service du stress

Publié le 21 mars 2011 par Permutjob

Préventeur IPRP, un métier au service du stressAujourd’hui, nous débutons une série d’interview sur des sujets aussi variés que l’emploi, les ressources humaines et la gestion du stress au travail et j’ai le plaisir d’accueillir pour cette première Sylviane LAURO, Intervenante en Prévention des Risques Professionnels au sein du Centre Hospitalier de Digne les Bains. Sylviane LAURO est l’auteur du blog IPRP, un blog certifié HON Code (Health on Net) en collaboration avec la Haute Autorité de Santé qui garantit tout le sérieux et le respect déontologique des textes publiés.

Bonjour Sylviane, pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Bonjour et tout d’abord merci de m’accorder la primeur de cette série d’entretiens sur le blog de PermutJob ! Je me présente donc : Sylviane LAURO, 43 ans, mariée et mère de famille d’une Lily de 11 ans. J’habite dans les Alpes de Haute Provence (04) où je travaille au sein de la fonction publique hospitalière.

Concernant mon parcours : après des études universitaires en psychologie (licence) et un BTS de secrétariat médico-social, j’ai intégré la fonction publique hospitalière en tant que secrétaire médicale. J’ai alors travaillé sur l’accréditation des hôpitaux et ai passé dans ce sens un diplôme universitaire d’assistante qualité en établissement de santé, puis un Master 2 Sciences Technologies et Santé : ingénierie des systèmes de santé, option : communication et gestion du stress, complété par une formation universitaire au département d’ergologie de l’Université d’Aix-Marseille sur les risques professionnels liés aux facteurs psychosociaux. La souffrance au travail étant de plus en plus prégnante dans tous les secteurs d’activité, j’ai également demandé une habilitation d’IPRP (obtenue en 2008 pour les compétences techniques et organisationnelles) et ai parallèlement commencé à mettre en place mon blog entièrement consacré à ce domaine d’activité que sont les risques psychosociaux.

J’ai aujourd’hui la chance de pouvoir exercer mon métier au sein d’un organisme de formation public (OFPAC PRO – www.ofpacpro.fr -) en espérant que cela pourra être aidant pour beaucoup de personnes en souffrance au travail.

Vous êtes Intervenante en Prévention des Risques Professionnels, un métier trop peu connu, pouvez-vous nous en parler ?

Comme je le disais ci-dessus « IPRP » est une habilitation plus qu’un métier au départ. Le métier est celui de préventeur (formateur ou consultant). Cette notion a commencé à être émergente au sein de la réforme de la médecine du travail et de la mise en place de la pluridisciplinarité il y a quelques années déjà, alors que, dans le même temps ce que l’on appelle aujourd’hui « les risques psychosociaux » augmentaient de manière inquiétante et exponentielle. Un métier est avant tout ce que l’on en fait : mon objectif est de faire une réelle prévention sur le sujet, en amont, avant que les choses ne se dégradent…

Etes-vous nombreux à exercer ce métier et comment êtes vous perçus dans l’entreprise ?

Non nous ne sommes que quelques poignées car l’habilitation n’est pas facile à avoir : il faut une solide expérience professionnelle et être diplômé(e) au minimum à Bac +5. De plus, la prévention est encore un peu « taboue » en France, du moins pas une priorité pour certains patrons ou entreprises, ou même fonctions publiques alors cela a un coût, et avant de parler du coût économique, il s’agit avant tout d’un coût humain dont certains ne reviennent pas. Il nous faut agir au mieux dans ce sens, car il s’agit aujourd’hui d’un enjeu majeur en terme de santé publique.

D’ailleurs, quels sont les types d’entreprises qui font appel à des IPRP ?

Tout type d’entreprises, collectivités ou fonctions publiques qui se sentent concernées par la prévention des risques professionnels. Il ne faut pas oublier qu’il s’agit aujourd’hui d’une obligation légale où le chef d’entreprise ou d’établissement a obligation de résultats et a le devoir de préserver la santé physique et morale de ses salariés. Article L4121-1 du Code du Travail : « L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, ces mesures comprennent : des actions de prévention des risques professionnels, des actions d’information et de formation… »

Quels sont les stress les plus facilement détectables ? Ceux auxquels vous êtes le plus souvent confrontée ? J’imagine qu’il existe aussi des stress insidieux ?

Je dis toujours que le stress est un tueur de l’ombre, un tueur silencieux ; c’est dans ce sens en effet qu’il est très souvent insidieux. On emploie souvent ce terme pour désigner l’ensemble des risques psychosociaux, et même s’il est généré par l’organisation du travail, il se manifeste de manière individuelle : ne plus arriver à faire face aux contraintes imposées, aux objectifs de plus en plus inatteignables, aux injonctions paradoxales etc… Sans compter le stress généré par des états de terreur comme on peut le voir lors de cas de harcèlement moral au travail. Le stress chronique est celui que l’on voit le plus souvent car il s’établit sur le long terme et c’est malheureusement aussi le plus destructeur pour les personnes qui le vivent car il menace leur intégrité physique et mentale et peut engendrer des altérations irréversibles (maladies cardiovasculaires conduisant à un infarctus par exemple).

Aujourd’hui avez-vous l’impression que le stress est enfin pris en compte par les entreprises ? et par les salariés ?

Par la force des choses oui et c’est tant mieux. Comme je le disais plus haut, il s’agit aujourd’hui d’une obligation légale et dès que l’on touche à la réputation d’une entreprise par la médiatisation comme cela a été le cas pour France Télécom ou encore récemment pour Renault les donnes changent. Pourtant, cela n’est pas encore rentré dans les mœurs mais les professionnels du sujet y travaillent à chaque instant.

Parmi les causes de stress, une est souvent absente des manifestes : le trajet domicile bureau. Pourtant le temps de trajet et les conditions dans lesquelles il s’effectue est source de fatigue et de stress non ?

Tout à fait. Toutefois, comme les autres types de risques, le risque routier n’est pas encore bien rentré dans les mœurs. Temps trop longs, fatigue accrue, risques d’endormissement, changements multiples de transport, grèves, retards etc… Les facteurs sont multiples et rappelons ce chiffre : chaque année, plus de 600 salariés sont tués dans des accidents de trajet ou de mission !

Si demain une salariée venait vous consulter parce que ses 2h d’embouteillage chaque matin pour venir travailler sont très difficiles, que mettriez-vous en oeuvre pour améliorer sa condition ?

Je ne pourrai lui donner que quelques conseils, mais il faudrait agir en concertation avec son entreprise qui pourrait mettre en place certains types d’actions comme par exemple :
- privilégier les transports en commun avec participation financière de l’entreprise à l’abonnement aux transports en question,
- privilégier si cela est possible le covoiturage,
- aménagement du temps de travail pour les temps partiels par exemple : regroupement du temps de travail sur trois journées au lieu de cinq afin d’éviter les allers-retours, horaires groupés etc…
- télétravail lorsque cela est possible,
- ou comme le préconise PermutJob : un changement de poste avec quelqu’un d’autre où chacun pourrait trouver son bonheur !

Donc vous pourriez envisager un échange de poste (à compétences égales) entre cette salariée et une autre qui habiterait plus près de l’entreprise ?

Bien entendu. S’il s’agit d’une relation gagnant-gagnant pour tout le monde pourquoi pas ? En plus, à l’heure du développement durable, de la réduction du CO2 etc… tout le monde y gagnerait, y compris la planète !

Le bénéfice pour la salariée et donc à fortiori l’entreprise semble évident mais l’entreprise peut être frileuse à engager un tel échange. Comment pensez-vous qu’une entreprise puisse le mettre en place ?

Il faudrait effectivement réfléchir aux types de « passerelles » à mettre en place, travail de longue haleine mais des solutions existent : quelques semaines d’essai par exemple, sous forme de détachement etc… sachant que les types de contrats seront également à revoir (droit public-droit privé) ; cela ira bien plus loin qu’un simple échange, c’est toute la société et le monde du travail qui vont s’en trouver changés ; le législateur devra alors trouver les solutions à ces nouvelles problématiques. Mais l’idée est excellente et nul doute qu’elle fera son chemin dans les années à venir…

Pour terminer un ou deux conseils à nos lecteurs pour gérer une situation de stress ?

Savoir être le gardien de sa propre santé est l’enjeu de chacun(e) à ne pas perdre de vue, ensuite chacun(e) agira en conséquence… Car n’oublions pas que si les causes du stress au travail sont avant tout organisationnelles, le stress est, lui, individuel. Il faudra donc travailler sur les deux paramètres à savoir : revoir de nouveaux modes d’organisations afin que ces derniers ne soient plus pathogènes pour les individus, et pour l’individu savoir « être en santé » face à une situation de stress, sachant que chacun est différent face à ce type de situation. En tout état de cause: prendre du recul le plus possible, analyser, comprendre puis agir sont les maîtres mots, sans oublier de faire appel à des soutiens si cela est nécessaire… mais de manière générale, il n’y a pas de solution miracle, à chacun et chacune de trouver sa stratégie d’adaptation.

Un grand merci d’avoir accepté de répondre à nos question, Merci également à vous, ce fut un plaisir pour moi de répondre à ces quelques questions d’autant plus si elles sont publiées sur le blog de PermutJob. Un projet auquel je crois… Longue vie à lui…

Je rappelle que vous dispensez régulièrement des formations destinées à la fonction publique (domaine médico-social, collectivités territoriales etc…), aux entreprises et au grand public en collaboration avec OFPAC PRO. Les prochaines journées de sensibilisation se dérouleront à DIGNE LES BAINS (04) sur le thème « Risques psychosociaux : comprendre – agir » :
1ère session : Les jeudi 14 et vendredi 15 avril 2011
2ème session : Les jeudi 9 et vendredi 10 juin 2011
Inscriptions

D’autres dates sont disponibles à la demande, n’hésitez pas à demander de plus amples informations sur le formulaire en ligne : www.ofpacpro.fr


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