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Pourquoi la France manque-t-elle d'entrepreneurs ?

Publié le 19 avril 2011 par François Némo @ifbranding

Business-plan

Pourquoi, malgré la performance de ses multinationales, la France souffre-t-elle d’une croissance faible et d’un important déficit commercial ? Contrairement à l’Allemagne et aux Etats-Unis, où les entreprises intermédiaires sont les piliers de l’innovation et de la compétitivité économique, il manque en France l’équivalent de 10 000 entreprises de 300 salariés (CAE). Ces PME, dont la vitalité et la réussite reposent pour la plupart d’entre elles sur les convictions et l’engagement d’une femme ou d’un homme. Un entrepreneur.

 Qu’est-ce qu’un entrepreneur ?

 Bien sûr qu’un entrepreneur est motivé par la réalisation de bénéfices, mais l’essentiel n’est certainement pas là, ses mobiles sont beaucoup plus irrationnels. Selon Schumpeter à qui nous devons beaucoup sur la compréhension de l’entreprenariat,  entreprendre, c’est d’abord prendre des risques, être capable de jouer sa carrière et sa sécurité financière pour mettre en œuvre une idée. C’est une femme ou un homme qui développent  leur vision et leur stratégie tout au long d’un processus partiellement conscient d’intuitions, de perspicacité, qui trouvent leurs racines dans l’expérience. L’entrepreneur incarne le pari de l’innovation, bouscule la routine, dépasse la crainte et l’habitude.

 L’entrepreneur a en lui cette nécessité de construire, le besoin d’aventure animé certainement par le besoin d’indépendance et de réalisation, sinon de volonté de puissance. Schumpeter encore développe la notion  de « destruction créatrice ». L’entrepreneur détruit des marchés et des secteurs de l’économie pour les remplacer, contribuant ainsi au dynamisme et à la croissance à long terme. L’entrepreneur privilégie l’avenir à l’état présent. L’entrepreneur ne doit pas être confondu avec le chef d’entreprise qui, lui,  administre et gère l’existant.

L’entreprenariat n’est pas dans notre culture

Fondée sur les Lumières et l’influence Saint-simonienne, notre culture économique s’appuie sur le savoir plutôt que sur l’expérience. C’est la France des grandes inventions, des grands projets, des grandes écoles, des grandes administrations qui génèrent des esprits hautement rationnels, cartésiens, méthodiques, d’excellents ingénieurs, gestionnaires ou administrateurs. Des dirigeants qui s’appuient sur des modèles de hiérarchie verticaux et cloisonnés qui ont fait leurs preuves pendant de nombreuses générations mais qui aujourd’hui trouvent leur limite dans ce nouveau monde ouvert, multiculturel modelé par les réseaux et les nouvelles technologies. Une culture élitiste et sélective profondément ancrée dans les institutions politiques et économiques et qui bloque l’émergence des idées créatives souvent portées par les entrepreneurs. En France, l’entrepreneur dérange. 

La France, culture technologique vs culture de l’idée

Lorsque l’on parle du développement des PME et d’innovation en France, les institutions et les milieux économiques n’abordent le sujet qu’à travers les moyens, l’organisation, le financement. On fait référence à la technique et à la technologie. On amalgame inventer et innover. Alors que la véritable problématique ne réside ni dans le financement ni dans la technologie. Elle réside dans le projet, la proposition de valeur qui fonde le business model, l’investissement immatériel. Trop de temps, trop cher, dit-on. C’est pourtant un outil concret de pilotage stratégique et opérationnel de la valeur de l’entreprise. Un outil de management pour donner sa légitimité et son sens au produit, au marketing, aux relations internes, à la relation client, etc. Qui permet d’ouvrir l’entreprise aux dimensions culturelle, sociale, créative…,  à ces valeurs essentielles pour se faire entendre d’un nouveau public informé, volatil et exigeant. C’est à travers la créativité de leur business model que les entreprises françaises trouveront leur place dans le monde.

Les entrepreneurs en phase avec le monde contemporain

N’est-ce pas les entrepreneurs qui sont les plus aptes à capter les enjeux de la mondialisation ? N’est-ce pas eux qui, au sein des structures légères que sont les PME, ont le pouvoir de construire en transversal de vrais projets. Mission quasi impossible dans les grands groupes à cause de leur lourdeur. N’est-ce pas sur eux que la France devrait investir pour faire face aux pays émergents. Développer la culture de l’entreprenariat en France pour répondre à ce monde interdépendant dans lequel il devient impossible de tout contrôler, de marquer son territoire par la puissance et par des frontières claires. Ce monde dans lequel les valeurs séculaires de puissance, de domination laissent progressivement leur place à la concertation, au lien, à l’envie, l’engagement, l’expérience.

 N’est-ce pas eux qui peuvent changer les règles du jeu, initier des changements radicaux, repenser les ressources et les savoir-faire existants, élargir la demande et le champ de vision, repenser le produit au-delà de sa fonctionnalité, repenser la relation client, répondre aux nouveaux défis sociaux, culturels, économiques. Initier des approches qui s’appuient sur l’expérimentation, les prises de décision rapides et l’abandon de processus de planification trop longs.

Associer le savoir et l’expérience

Apprendre aux nouvelles générations à manier le savoir et l’expérience avec le même plaisir, la même générosité. Leur apprendre l’audace et l’engagement pour redonner à la France son enthousiasme et une bonne dynamique de croissance. Faire de ce fameux « savoir » français un véritable avantage économique en l’adaptant au nouveau contexte économique, en l’élargissant. Avoir cette capacité d’appréhender les relations économiques pas seulement à travers les prismes technologique et financier, mais aussi à travers ceux de l’histoire, des sciences humaines, de la philosophie, de l’analyse socio-culturelle. N’est-ce pas une garantie d’un monde moins dangereux ? « Ce qui est bon pour la société est bon pour l’entreprise », nous dit le célèbre économiste M. Porter. C’est peut-être ce levier qui fera émerger en France de nouveaux entrepreneurs.

Pour conclure, cette phrase d’Albert Camus (1950 ?) relevée sur le profil de l’un de nos followers twitter, Clément CocoLapin Huyghe : Bas du formulaire

« Le monde change, et avec lui les hommes et la France elle-même. Seul l'enseignement français n'a pas encore changé. Cela revient à dire qu'on apprend aux enfants de ce pays à vivre et à penser dans un monde déjà disparu ! »

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