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[ciné] Limitless : brainstorm

Publié le 11 juin 2011 par Vance @Great_Wenceslas

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Un film de Neil Burger (2011) avec Bradley Cooper, Abbie Cornish & Robert de Niro

Genre : SF

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Date de sortie en salles : 08/06/2011

Séance de 19h45. VF.

L’histoire : Eddie Morra est de ces pauvres types qui auraient pu réussir mais qui manquent de volonté et de moyens. Ecrivain à la manque, il n’arrive pas à fournir la moindre page à son éditeur et sa petite amie finit par le plaquer. C’est alors qu’il croise la route de son ex-beau-frère qui lui propose une pilule miracle, qui serait la réponse à ses soucis. Bien que sceptique, Eddie la consomme… et sa vie se transforme ! Tous les recoins de son cerveau semblent boostés et il résoud le moindre problème à une vitesse phénoménale. Seulement, lorsque l’effet s’estompe, il revevient le médiocre qu’il était. Il décide donc d’aller revoir son dealer…

Une chronique de Vance

L’Illuminatus que je suis ne peut que se délecter d’un film abordant le sujet des pouvoirs surhumains. Cette fois, ce n’est pas à un mutant, ou un jeune homme artificiellement activé, qu’on a affaire, donc exit les scrupules, les regrets, la recherche d’intégration liée à ce qui le rend différent. Mieux : les pouvoirs n’altèrent pas le physique (bien qu’il y ait des effets secondaires liés à la prise de cette substance). Encore mieux : ils ne font que « doper » le potentiel déjà présent en l’individu, ce qui limite le problème lié au changement inévitable de personnalité.

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Ici, il s’agit du fonctionnement du cerveau : le NZT, ce produit dont on ne sait rien, décuple les possibilités de connexion synaptique et donne accès à tout ce qui a été enregistré, parfois inconsciemment, en partant du principe que nous emmagasinons tout ce que nous faisons et ressentons, la seule difficulté étant la remémoration. Or, l’idée n’est pas neuve. En tous cas, pas dans la SF. En 1982, le grand (et regretté) Isaac Asimov avait écrit une nouvelle censée être adaptée par la télévision (ce ne fut finalement pas le cas, il faut dire que le Bon Docteur n’a jamais eu la chance de voir l’une de ses œuvres sur grand ou petit écran de son vivant) ; Lest we remember racontait l’histoire d’un gars médiocre sur lequel la société Quantum teste un produit capable d’augmenter lespossibilités mémorielles. Bien entendu, ce produit fonctionne et transforme cet employé quelconque en redoutable homme d’affaires. La chute est empreinte de cette gentille ironie propre à l’auteur, rarement cynique. Les lecteurs français peuvent retrouver cette nouvelle dans le recueil Au prix du papyrus, aux éditions Denoël (1985) sous le titre « De peur de se souvenir ».

Le film de Neil Burger est calqué sur le cheminement de cet homme (jusque dans sa relation de couple). Il s’agit pourtant de l’adaptation d’un autre texte, le roman the Dark Fields/le Champ de ténèbres d’Alan Glynn.

Le Coin du C.L.A.P. : Il ne s’agissait pas du film prévu initialement. On a changé d’avis parce qu’on avait oublié nos lunettes 3D et qu’on ne désirait pas en repayer une nouvelle paire (c’est quand même un comble que certains films ne puissent être visionnés qu’en 3D !). Du coup, on s’est rabattus sur celui-ci dont le sujet plaisait, tout en étant conscients que ce ne serait pas le film du siècle. L’horaire étant plus tôt, il a fallu se sustenter d’urgence (club sandwich et Magnum amandes) et je n’ai pu lire que deux chapitres de Doomwar, l’excellente mini-série mettant en scène Fatalis contre les Fantastiques, les X-Men et Black Panther.

A partir ce cette idée de départ fascinante, le film du réalisateur de l’Illusionniste se construit très classiquement autour du personnage central et de son destin bouleversé par l'apport de ce produit miracle. Le schéma est connu, reprenant par exemple celui de Very Bad Trip : on commence par une situation critique, avec un homme au bord de l’abîme (dans tous les sens du terme). Puis, flashback sur les circonstances qui l’ont amené là, voix-off à l’appui (plutôt réussie d’ailleurs, même en VF, grâce à quelques commentaires percutants ou désabusés sur le ton de American Beauty).

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Bradley Cooper, qu’il soit filmé de près avec une caméra hésitante ou au centre de ses délires, illumine l’écran. Il n’est pourtant pas à son avantage, surtout au début, avec ses cheveux mi-longs et sales, son teint cireux (bien aidé par une lumière crue) et ses fringues fatiguées. Mais d’un sourire coquin, d’une œillade fulgurante, il sait aguicher le spectateur, et endosser le rôle de l’autre Eddie, celui qui, sûr de lui car sûr de ses performances, se sent de taille à conquérir le monde. L’incontestable réussite de ce film qui ne parvient pas à sortir des ornières de la série B, c’est lui. Les seconds rôles, et même De Niro, en sont réduits aux faire-valoir.

Très vite, bien qu'elles soient toujours évoquées, les implications morales de la prise de drogue – car c’en est une (addiction, responsabilité, légitimité) - sont balayées par la volonté (sans doute imposée par la production) de faire un film fun, décomplexé et tout public. Ainsi, on sent de nombreux raccourcis gênants qui gâchent le plaisir réel que procure le film, et qui s’ajoutent à des choix scénaristiques discutables qui altèrent les motivations des personnages et sèment de nombreuses zones d’ombre. Il n’empêche, le rythme est bon, et les techniciens savent jouer avec les plans et la lumière pour rendre l’ensemble agréable, avec en outre quelques choix de chansons ad hoc. Notons de jolies trouvailles comme ces travellings infinis qui parsèment le métrage, cherchant à conférer une sensation d’étrangeté et d’irréel dans les perceptions d’Eddie : une forme d’omniscience qui se traduit par  une impression d’ubiquité, de dédoublement. Et là où on sentait venir une conclusion impliquant « le prix à payer » pour arriver au sommet par des voies détournées, on a la surprise de voir le film se terminer sur une note étrangement amorale, voire pernicieuse, mais qui a le mérite de bousculer un peu le côté finalement artificiel de la réalisation.

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Plaisant.

Ma note : 3,3/5

Note moyenne au Palmarès : 3,37/5 pour 7 votes.


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