[Critique Cinéma] Blue Valentine

La chanson du désamour. Le blues du désespoir. Je ne sais pas trop pourquoi ce très beau film à la noirceur tamisée  me fait penser à une ballade. Qui commence forcément très bien, quand la demoiselle esquisse quelques claquettes pour le jeune homme qui joue du ukulélé. Ils vont s’aimer pendant plusieurs couplets, qui célèbrent la naissance de Frankie et un mariage à la va-vite.

Mais le premier refrain  déchante déjà un peu.  Cindy bosse dans un cabinet médical, pendant que lui se la coule peinard. Des petits boulots par ci par là, le goulot de bon matin, et beaucoup de cigarettes. La rengaine.

Cindy se lasse et tout sonne maintenant faux. Elle se souvient des jours heureux et elle pleure. Lui ne retourne jamais trop en arrière, comme le fait pourtant si bien le réalisateur Derek Cianfrance , quand il donne à son héroïne les arguments de sa défense.

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Deux époques se chevauchent ainsi intelligemment sous l’œil d’un cinéaste qui en biaisant parfois, et même en étirant son propos (c’est sur le final un peu longuet et mélo), sait pertinemment que pour sa chanson il a trouvé le bon tempo.  Pour rythmer le désenchantement et l’amour qui s’étiole . Les heurts et les peines. Une mise en scène d’une constante fluidité, où l’amour et la haine s’entrechoquent avant de se briser dans des éclats de violence aussi inattendus qu’inappropriés.Au centre du drame ,pour la coda ,Frankie ,la petite fille  .La déchirure. L’innocence détruite, comme ce couple avorté avant l’heure

Si pour son premier film Cianfrance est quasiment sans reproche, il doit aussi une fière chandelle à Michelle Williams et, Ryan Gosling , un duo extraordinaire qui sublime le désenchantement  à la façon d’un Tom Waits éructant «  Blue Valentine » . Une très belle chanson, un très grand film.