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Emir Kusturica ou quand « les films sont d’abord un moyen de relier les êtres et les choses »

Publié le 15 février 2008 par Thibault

Emir Kusturica, ou quand « les films sont d’abord un moyen de relier les êtres et les choses »Avec la sortie de son nouveau film ce mois-ci, il était temps pour nous de vous livrer un gros plan sur ce personnage multi-facettes qu’est Emir Kusturica…
En effet, Kusturica est un touche à tout : on le connaît par ses films mais aussi par sa musique (il rejoint en 1986 le groupe « The No Smoking Orchestra », symbole de son goût prononcé pour la musique tzigane dans ses films). C’est également un scénariste et un acteur ! En effet, en 1999, il se retrouve dans « La Veuve de Saint-Pierre » de Patrice Leconte. De même, c’est aussi lui qui joue le trafiquant d’armes à la fin de son film «
Underground »…

Mais enfin, avant tout, petit retour aux sources… notre ami serbe, avant de nous offrir tous ces films, a d’abord fait des études. Et monsieur ne les a pas faites n’importe où : il a étudié le cinéma à la Famu, LA célèbre école de cinéma de Prague. Passons. Une fois celles-ci terminées, il retourne en Yougoslavie et travaille pour la télévision, exécutant ainsi quelques téléfilms.

L’année 1981 arrive et Kusturica réalise son premier film : « Te souviens-tu de Dolly Bell ? ». Cette histoire d’enfants de Sarajevo dans les années 1960 lui rapporte un Lion d’Or au Festival de Venise.
Conforté dans son succès, il mène un film un peu plus ambitieux sur le sentiment d’angoisse sous la Yougoslavie de Tito : « Papa est en voyage d’affaires ». La poursuite dans cette veine nostalgique sacrera le film Palme d’or au Festival de Cannes en 1985.

1989 est l’année de la consécration pour notre homme : « Le temps des gitans »*, remporte un franc succès et pose assurément la marque de fabrique du cinéaste : mélange de dérision, de poésie, de surréalisme, de poésie, de tragédie, de lyrisme et de musique. Rien que ça !
Les Etats-Unis lui font alors les yeux doux et, en 1993, « Arizona Dream » sera sa première expérience de tournage de l’autre côté de l’Atlantique, en Amérique. Les errances de Johnny Depp sur fond de « In the death car » d’Iggy Pop, lui permettront de recevoir l’Ours d’Argent (Prix Spécial du Jury) lors du Festival de Berlin en 1993 et le Prix du Public lors du Festival international du film de Varsovie en 1994.

1995, seconde Palme d’Or avec « Underground ». Ces 50 ans d’histoires de la Serbie déclencheront une sacrée polémique sur la question du nationalisme. C’était en pleine guerre des Balkans, ne l’oublions pas. Il n’empêche, nombreux sont donc ceux qui n’ont su voir le regard critique du réalisateur derrières toutes ces scènes les plus absurdes et surréalistes les unes que les autres.
Kusturica ressort de cette histoire plutôt dépité et abattu et songe dans un premier temps à arrêter le cinéma. A notre plus grand plaisir, ce souhait ne sera que temporaire puisqu’il fera son come-back en 1998 avec « Chat noir, chat blanc » explosive comédie qui lui permet de renouer avec ses premiers amours : les gitans.
Les récompenses vont recommencer à s’enchaîner. D’abord avec « Super 8 Stories » qui lui vaut la Plaque d’argent du meilleur documentaire au Festival international du film de Chicago.
Puis avec « La vie est un miracle », sorti en 2004. La légèreté nouvelle acquise depuis « Chat noir, chat blanc » lui fait obtenir le prix de l’Education nationale au Festival de Cannes et le César du meilleur film de l’Union européenne 2005.
2005 justement. Kusturica se retrouve président du grand jury du Festival de Cannes. L’occasion pour lui de « placer l’esthétique et l’artistique au cœur de la manifestation ».

Revenons à l’année 2008 et à ce mercredi 30 janvier où est sorti en France « Promets-moi », qui s’inscrit encore bel et bien dans la lignée des précédents.
« Promets-moi » où tout commence justement par une promesse. Cette promesse, c’est celle faite par Tsane, petit bonhomme de 12 ans, à son grand-père : aller à la ville et en ramener une icône, un souvenir et surtout une femme. Cette promesse sera le point de départ d’un voyage et d’une aventure exceptionnels pour le jeune garçon !
En effet, la découverte de la ville, pour celui qui vient d’un patelin paumé dans les montagnes, est plutôt un rude choc. Sa promesse va s’avérer plus difficile, beaucoup plus difficile que prévu…
En bref, l’occasion pour Kusturica de nous livrer un de ses films absolument maîtrisé et absolument bordélique, dont lui seul a le secret…
Absolument maîtrisé car le rythme du film allant crescendo, il ne fait que s’améliorer en avançant. Absolument bordélique car c’est encore un mélange incongru, un joyeux ramdam où la présence de la musique rythme l’action, transformant le violent ou le tragique en burlesque.

En somme, un petit bijou totalement dépaysant dans le panorama cinématographique.
Un Kusturica fidèle à lui-même.

Jamais deux sans trois, on attend la prochaine Palme d’Or…

Charlène Marchand 

* A noter : « Le temps des gitans » a son Opéra, du 22 au 30 mars 2008, au Palais des Congrès de Paris.


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