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Je n'ai pas dansé depuis longtemps, de Hugo Boris

Par Carolune

  

pocket

   Après avoir été épatée par l’écriture et la singularité de La délégation norvégienne d’Hugo Boris, j’ai bien sûr sauté sur l’occasion lorsque Newsbook a proposé un partenariat avec les éditions Pocket concernant la sortie en poche de Je n’ai pas dansé depuis longtemps, du même auteur. Merci donc au site et à l’éditeur !

   Ivan est désigné pour être le premier homme à rester plus de quatre cents jours en orbite autour de la Terre. Un homme ordinaire, marié, père de deux enfants, quitte la planète. Tandis que l'Empire soviétique plonge dans le chaos, il tourne sans fin. Pour lui, le Soleil se lève et se couche seize fois par jour. Au fil du temps, il perd le sommeil, l'odorat, le goût. Sa colonne ne le porte plus. Sa raison vacille. Il s'entraînait depuis des années, l'esprit entièrement tendu vers le cosmos. Maintenant, il n'a d'yeux que pour la Terre. Elle lui manque comme une femme.

   Comme dans La délégation norvégienne, j’ai été tout d’abord frappée par le style à la fois chirurgicalement travaillé et très poétique d’Hugo Boris. L’impression est celle d’une sorte de sécheresse mêlée à une douceur du regard, c’est très singulier et surtout très beau… C’est ainsi que les premières pages sonnent immédiatement avec une grande originalité, alors même qu’elles traitent d’un motif assez banal : les adieux à la famille. Dès le début on sait que l’on ne sera jamais dans le cliché, ni dans le style facile aux grosses ficelles de bien des livres actuels, et quel bonheur de ressentir cela !

   Cela a en outre l’immense mérite de rendre très dense et très originale la première partie du roman, qui sans ce style aurait couru le risque de paraître un peu poussive, puisqu’il s’agit des premiers moments d’Ivan en orbite – cela dit, la profusion et la précision des détails techniques (appareillages, conséquences physiologiques de la vie dans l’espace, gestion du quotidien dans la capsule Soyouz puis dans la station Mir…) est telle que cela aurait, même sans style, donné une entrée en matière passionnante et très documentée…mais là, en plus, cet amas de détails devient objet littéraire, et cela force l’admiration…

   Et puis surtout, une fois les premiers temps passés, on suit l’usure de ces hommes enfermés dans leur capsule, et en particulier, bien sûr, celle d’Ivan. Le temps marqué dans les marges – orbite 1 à orbite 6798 – prend alors tout son sens, on partage avec les membres de l’équipage une sorte de vertige pesant (ça a d’ailleurs été un vrai soulagement de retrouver une datation « terrestre » à la fin du livre !)…et la station Mir devient une sorte de monstre technique étouffant…jusqu’à ce que, par un épisode aussi spectaculaire qu’émouvant et symbolique, Ivan redevienne un homme et qu’il prenne la première place du roman, en développant une nostalgie amoureuse de la terre…Et à nouveau Hugo Boris déploie un style incroyablement juste et évocateur, qui donne lieu à de vrais moments d’émotion esthétique et littéraire…

   En un mot : Hugo Boris est un vrai écrivain, singulier, qui travaille un style unique et souple – celui de La délégation norvégienne est ainsi très différent de celui de Je n’ai pas dansé depuis longtemps – et qui mérite infiniment d’être découvert ! Pour ma part, son premier roman, Le baiser dans la nuque, rejoint illico ma table de chevet…


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