La vérité selon micheline lanctôt

La réalisatrice et scénariste, Micheline Lanctôt, y allait ce matin (lundi, 1er août), dans le cadre de l'émission radiophonique Sans préliminaires à la première chaîne de Radio-Canada, d'une chronique sur la vérité qui m’a fort intriguée. Intrigué, je le fus; mieux, perplexe, au sens où en niant l’existence de la vérité madame Lanctôt me paraît tomber exactement dans le piège du terrorisme lequel consiste à ruiner nos propres convictions. Le terrorisme, qu’il soit d’obédience intégrisme chrétien ou musulman, vise à ébranler notre conviction en la vérité. C’est d’ailleurs ce que montre admirablement bien le récent film de Xavier Beauvois, Des hommes et des dieux. Ces moines ne renoncèrent pas à leur «vérité» face à la violence sans retenue des terroristes islamistes. Je crois qu’en condamnant la vérité, quelle qu’elle soit, nous faisons exactement le jeu du terrorisme : nous nous aliénons de nous-mêmes et le terrorisme a dès lors beau jeu de nous imposer ensuite dans la gorge leur «vérité». En matière de vérité, je suis la maxime de Diderot : «On doit exiger de moi que je cherche la vérité, mais non que je la trouve.» (Pensées philosophiques #29) Par ailleurs, j’aime bien distinguer la «vérité» de la «véracité». Je loue ceux et celles qui, de manière tenace et lucide, tentent d’établir la vérité. Claude Robinson, par exemple. L’auteur de Robinson Curiosité croit en la vérité contre les mensonges de ses adversaires. C’est un modèle à imiter, tout comme le sont les moines Tibhirine. En condamnant le terrorisme, ne condamnons pas, je vous prie, la vérité. Ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain. Puisque madame Lanctôt terminait sa chronique en citant une boutade de ce je ne sais plus qui, je soumets cette pensée de Blaise Pascal : «La vérité est si obscurcie en ce temps et le mensonge si établi, qu’à moins d’aimer la vérité, on ne saurait la connaître.» Je souhaite à Micheline Lanctôt cette vertu de l’amour de la vérité, qui est celle du philosophe.