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[ Critique dvd] Regarde les hommes tomber

Par Gicquel

Quand Jacques Audiard se lance en 1993 dans la réalisation de son premier long métrage, l’ombre de son père Michel Audiard ,avec qui il signe le scénario de « Mortelle randonnée » est omniprésente. Un handicap dont il s’affranchit allègrement en posant sa caméra de manière très personnelle pour un cinéma de genre, le film noir, habituellement plus conformiste.

Elle est déjà entièrement au service de l’histoire et de ses personnages qui s’inspirent du roman de Teri White « Triangle »;  si elle fait l’intéressante (contre-plongée, ras du bitume ou autre flou plus ou moins artistique…) c’est toujours pour donner un point de vue, une signification ou une direction à venir. L’esthétique pour l’esthétique repassera.

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Sur cette préoccupation se greffe alors presque naturellement une attention toute particulière pour les comédiens. Cette fois, la direction d’acteurs n’est pas un gros mot ( des réalisateurs réfutent l’appellation ,alors que certains acteurs n’ont «  pas besoin d’être dirigés » ) :elle est entièrement inscrite dans la mise en scène du réalisateur.Tout en nous racontant, à sa façon sur un montage alambiqué (César pour Juliette Welfling ), une histoire de voyous, Jacques Audiard dresse de formidables portraits.

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Notamment autour de ce couple inénarrable , que le cinéaste arrive pourtant à nous présenter de fort belle manière,avec le jeunot de l’époque, Mathieu Kassovitz ( César du meilleur espoir 1995) qui dans son rôle de chien perdu sans collier est tout bonnement stupéfiant. Il n’a de cesse de coller aux basques d’un individu étrange, qui va de ville en ville, écumer les tripots et les arrière-boutiques afin de tenter sa chance au poker. Si au fil de leur filmographie de grands acteurs ont une fâcheuse tendance à se répéter (Arditi, Dupontel, Bacri…) Jean-Louis Trintignant, lui se régénère face à l’innocence de son jeune compagnon, et à la verve bienfaitrice de ce réalisateur plein de promesses, qui lui confie les frusques d’un personnage haut en couleur, et bas en sentiments.

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Il est donc question d’une filiation père-fils,contre-nature ,d’un regard déviant sur la transmission pour ce vieux baroudeur symptomatique.On ne sait trop ce qu’il cherche dans une quête parallèle à un autre zozo tout aussi bizarre, qui pour venger l’assassinat d’un ami, sillonne lui aussi  les routes de France .Il faut voir Jean Yanne, tapoter sur son petit piano une vague mélodie jazzy, au fond d’une camionnette bringuebalante pour saisir la tempête intérieure qui le chavire.

Comme dans les meilleurs polars (et celui-ci demeure une référence) les parallèles sont faites pour se rencontrer, la collision est alors inéluctable.Point d’orgue fatidique à un road movie savoureux, aux dialogues souvent étincelants  d’ironie et de naïveté. Chez les Audiard, on ne se refait pas.


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