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Melancholia, la fin du monde selon Lars Von Trier

Publié le 20 septembre 2011 par Vivons_curieux

La première image est saisissante. Une pluie d’oiseaux morts qui tombent littéralement sur le sol. Au centre de l’écran, le visage de Kirsten Dunst, plus déprimée que jamais, incarne avec grâce le personnage de Justine. Justine dite « la mélancolique », celle qui a du mal à trouver sa place dans le monde qui l’entoure.

S’en suit une succession de séquences et de photos plus étranges et intrigantes les unes des autres. Nos repères sont bouleversés, nos bases dérangées. Sur une musique de Wagner (l’ouverture de Tristan et Iseult), on découvre avec effroi les visions de Justine sur la fin du monde. On assiste, impuissant, à une collision cosmique entre la Terre et une immense planète inconnue, Melancholia. La fin du monde est proche. On sait que le pire arrivera.

Évocation de la mort également quand Kirsten Dunst apparaît allongée, voguant sur l’eau, en robe de mariée, un bouquet de muguet dans les mains jointes. Le regard perdu, l’image est sublime. Lars Von Trier ne craint pas la référence : on pense évidemment à Ophélia, le personnage de la tragédie de Shakespeare dans Hamlet, et sa représentation par John Everett Millais, le célèbre peintre britannique.

« J’ai toujours aimé l’idée de l’ouverture, le fait de commencer par quelques thèmes. J’ai imaginé à partir d’effets spéciaux ce qui se produirait lors d’une telle collision. J’ai trouvé amusant de sortir les images du contexte et de commencer par elles », précise le réalisateur danois.

Justine n’a plus rien à perdre. Elle veut en finir avec ses doutes et ses angoisses qui lui minent l’existence. Elle se résout à devenir une femme normale, comme sa sœur Claire (Charlotte Gainsbourg) en se mariant avec Michael (Alexander Skarsgard). Mais le mariage est un rituel, une institution avec ses propres codes et ses propres normes auxquels Justine doit se soumettre. Tout se passe pour le mieux jusqu’au moment où elle ne parvient plus à se confronter à ses propres exigences. Tout le monde lui demande si elle est heureuse. Ce n’est pas une question, c’est une injonction. Justine doit être heureuse. Ce mariage, c’est ce qu’elle a voulu, sa sœur lui a offert le plus beau qu’elle puisse espérer : une cérémonie exceptionnelle, deux cents invités et un cadre prestigieux.

Justine a beau essayer de ne pas se prendre au sérieux, de s’amuser avec les codes du mariage en arrivant nonchalamment deux heures après le début des festivités, l’amertume et la mélancolie ressurgissent rapidement. Les beaux discours, les sourires de façade, le découpage du gâteau, tout ça sonne incroyablement faux aux oreilles de la jeune femme. L’absurdité de son existence lui éclate en plein visage et Justine s’enfonce un peu plus dans la dépression. Quand la nuit de noces arrive, elle ne peut tout simplement pas y faire face.

Structuré en deux parties, le long-métrage de Lars Von Trier s’attache dans un deuxième temps au personnage incarné par Charlotte Gainsbourg. Claire est à l’opposé de sa sœur Justine. Son mode de vie traditionnel la rassure. Parent d’un petit garçon, elle est mariée à John (Kiefer Sutherland), un riche homme d’affaires, personnage prosaïque et rationnel qui aime pouvoir expliquer scientifiquement chaque phénomène naturel, à l’instar de la trajectoire de la planète inconnue dans le système solaire. Mais quand Melancholia s’approche dangereusement de la Terre, les certitudes de son mari volent en éclats. Claire perd alors pied et les fondements sur lesquels elle s’était construite ne tiennent plus que sur un fil. La jeune femme est au bord du précipice.

L’attention particulière accordée à l’esthétique du film participe à la réussite du long-métrage. Elle en fait sa force, elle magnifie un scénario minutieusement travaillé pendant deux longues années durant lesquelles le réalisateur danois a connu la dépression.

Melancholia n’est pas un film. C’est une expérience cinématographique hors-du-commun qui se déroule sous nos yeux pendant plus de deux heures avant de finir en apothéose. La fin du monde selon Lars Von Trier est belle, impressionnante de réalisme et tragique ; en un mot, romantique.

Sortie en salles le 10 août 2011


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