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Drive (2011) de Nicolas Winding Refn

Publié le 06 octobre 2011 par Flow

Drive.

(réalisé par Nicolas Winding Refn)

La claque.

 

 

On ne va pas tortiller du cul pour chier droit, Drive EST LA claque de l'année, le film à ne surtout pas rater. Je vais tenter (même si c'est vain) de vous retranscrire les différentes facettes de ce long métrage atypique et unique. Même si un deuxième visionnage s'impose clairement pour apprécier à sa juste valeur ce bijou rare.

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Le driver (on ne saura jamais son nom) arpente les rues de Los Angeles au volant de sa voiture, tel un fantôme. Sa vie peu attrayante est partagée entre le travail de cascadeur pour le cinéma le jour et celui de chauffeur pour braqueurs la nuit. Cet homme qui semble apathique tombe sous le charme de sa voisine et de son fils. C'est le début des ennuis...

Une réalisation magistrale.

Je n'avais jamais vu un film de ce réal danois mais je crois sincèrement que c'est une erreur à corriger tant le travail fourni ici est un véritable coup de maître. Pour qu'un film fonctionne, il faut que la caméra capte l'essence de l'histoire (une ambiance et l'interprétation des acteurs). C'est pas compliqué, Refn est toujours là où il faut. Pas étonnant qu'il ait obtenu le prix de la mise en scène à Cannes (même si je lui aurai refilé la palme d'or). Il faut le vivre pour comprendre mais il pond un film stylisé qui justifie l'emploi d'une telle technique (ce n'est souvent pas le cas). Ralentis, long passages sans dialogues, jeux de lumière (Los Angeles n'a jamais été aussi belle la nuit), séquences musicales lyriques à en chialer (ruez vous sur la BO). Tout est parfait. Je retiendrais surtout la scène d'introduction silencieuse et angoissante, on y suit le driver dans une poursuite avec la police en forme de chassé-croisé, et la scène du baiser dans l'ascenseur (la plus réussie). On est immergé du début à la fin et on se croirait presque au volant de la voiture. La maîtrise de l'environnement dont fait preuve Refn est totale (on pense à Carpenter), ce qui rend encore plus prégnant le fait que le driver y perd peu à peu pied à mesure que le film avance. Ville tentaculaire et nuit sans fin oppressantes (je n'avais pas ressenti ça depuis Heat de Michael Mann), sensation de crépuscule permanent et pessimisme jusqu'au boutiste, ce film est une tuerie graphique et contemplative comme il n'en existe aucune autre. Rien que pour ça, il vaut qu'on le regarde.

Une histoire passionnante.

Le scénario n'a rien d'original. Et pourtant, on a l'impression de ne l'avoir jamais vu avant. Braquage qui tourne mal, règlements de compte sanglants, histoire d'amour contrariée et vanité de la vie dans un monde aussi violent. L'histoire brasse des thèmes variés et universels. Le début est intrigant, avec son héros quasi aphone et son histoire d'amour naissante qui se déroule en hors champ. Puis la violence fait son entrée et ça part totalement en couille. Des films violents, on en bouffe à la pelle au cinéma. Mais ici, elle n'est jamais gratuite et contraste tellement avec la lenteur de la première partie que sa puissance est décuplée et elle en devient encore plus choquante. Le désespoir qui s'en dégage et qu'on lit sur le visage de Gosling fait indéniablement penser à la filmographie des frères Cohen et plus précisément à No country for old men. On ne retrouve pas l'absurde des deux frères sous la même forme (le ton est ici très sérieux) mais l'essence est là: un regard désespéré sur la violence et la cupidité des hommes, une incompréhension de la haine qui régit nos sociétés.

Et surtout un (super) héros magnifique.

Ceux qui n'étaient pas convaincus par Ryan Gosling jusqu'à présent peuvent changer de camp. Ce type est génial. Un putain d'acteur, une putain de gueule. Il porte le film sur ses épaules. Bien-sûr, le reste du casting est très bon (Carey Mulligan, Ron Pearlman, Bryan Cranston) mais c'est son interprétation qui marque par dessus tout. Il est illuminé, littéralement habité par son personnage insaisissable. C'est la plus grande réussite du film. Ce personnage rejette toute caractérisation, toute catégorisation. Il n'est ni palpable (il n'est pas défini par un nom, un passé, des dialogues) ni identifiable (on ne peut le classer par rapport à aucune figure archétypale préétablie). C'est un mystère. Pourtant, il écrase le film de sa présence. Un paradoxe total proche du coup de génie. Rien n'aurait été possible sans la prestation de cet acteur qui peut tout jouer (la scène de l'ascenseur, encore elle, en est assez révélatrice). Tour à tour apathique, à la limite de l'autisme, avec un visage naïf et enfantin puis violent, implacable tel un sociopathe. Dans la première partie (avant son premier excès de violence verbale dans le bar), il ressemble un peu au Leland de The United State of leland. Il n'est pas impliqué dans le monde. Il erre tel un fantôme toujours en mouvement. Puis il y a un basculement. Alors qu'il n'avait rien à voir dans l'histoire du braquage, il en devient le principal moteur. Il se met à parler, s'implique émotionellement, explose d'une rage inattendue et impossible à contenir. Monsieur tout le monde qui pète un câble. Ce contraste est la force du film, je le répète (une dernière fois).

Mais on a tout de même des pistes pour l'analyser. J'en ai vu deux mais je suis certain qu'il y en a d'autres. Tout d'abord, il a tout du super-héros. Son identité est secrète, il est une force inamovible et implacable, il vole au secours de la veuve et de l'orphelin et surtout, il a un costume. Son manteau qu'il porte constamment avec le scorpion dans le dos. Tous les symboles de cette figure sont là. Le scorpion est un animal mystérieux qui symbolise la transition, la Mort, le sexe, la solitude, la passion et la protection... Une aubaine pour le super-héros qui n'a rien à envier à la chauve souris de Batman. La deuxième interprétation possible renvoie encore à John Carpenter. La scène de la plage (magistrale elle aussi) fait immédiatement penser à Halloween. Le tueur avance masqué vers sa proie, sur une musique mystérieuse et sans mot dire. Si Myers représentait le Mal présent de manière sous-jacente dans nos sociétés modernes, le Driver symbolise plutôt la Vengeance et notre violence intrinsèque.

Un personnage atypique et magistral comme il en existe peu au cinéma.

Le film à voir cette année. Un bijou graphique à la réalisation impeccable, un personnage mystérieux et inédit interprété de manière hallucinante par un Ryan Gosling au sommet de son art, une ambiance prenante et lancinante. Bref, j'y retourne et faites en autant!

Note:

Pastèque royale


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