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Mohamed Salah BEN AMOR commente un texte de Patricia LARANCO.

Par Ananda

Comme d’habitude, la poétesse projette inconsciemment et spontanément  son intérieur sur un espace externe réel  et se met à le décrire comme si elle lisait dans un livre tant la concordance entre  l’ontique et l’ontologique est totale. Mais si  cet état  chez  l’homme commun est  indubitablement clinique  puisqu’il  n’est observable que chez  les individus atteints   de  psychoses paranoïaque  ou schizophrénique ,  il est  par contre chez certains vrais  artistes   poètes ou autres une source de créativité qui leur permet d’y puiser une multitude d’écarts surprenants et peut donc être considéré comme une faculté ou une compétence .

Cependant, ce qui attire tout particulièrement l’attention dans ce texte est que le paysage décrit comporte une grande partie plongée dans le noir et quelques points lumineux. Et  ces derniers ne sont pas reçus par la locutrice comme des replis pleins d’espoir,  comme le notent Leibnitz et Gilles Deleuze,  pour quitter le gouffre ténébreux mais en tant qu’éléments négatifs eux aussi nuisibles pour son psychisme. Et  elle le dit expressément : Les points lumineux de phosphore qui ponctuent, tels des planètes tragiquement froides, solitaires...Ils me font penser à des comètes figées, des astres de givre à l'immobilité cruelle. Ce qui montre qu’il ne s’agit pas ici d’un acte compensatoire  mais plutôt d’un plongeon dans  le passé lointain et plus précisément  dans le canal utérin de la mère, lieu où le futur nouveau né peut être pris de panique si les pressions qui s’exercent sur lui sont  trop fortes. En tout cas, quel que soit la vraie nature de cet état psychique ou psychanalytique, le plus important est qu’il a  porté ses fruits sur le plan du style  avec cette série  d’images déroutantes  et ce rythme  saccadé très plaisant .

Mohamed Salah BEN AMOR

Quais de gare la nuit, dans leur lueur soufrée. Leur vide lisse et noir de membrane huileuse.

Obscurité glacée, trouée de blancs halos.

Luisance sourde des faisceaux de lignes parallèles : lignes de béton, lignes de rails, lignes de hauts câbles obscurs...silhouettes allongées des auvents, des abris...Toutes ces lignes prisonnières de la même ligne de fuite !

Les points lumineux de phosphore qui ponctuent, tels des planètes tragiquement froides, solitaires...Ils me font penser à des comètes figées, des astres de givre à l'immobilité cruelle.

La banlieue s'égrène en un long, souple glissement...un immense désert ferroviaire en dérive...

Que faire, sinon scruter encore, encore, toujours ce magnétisme inaccessible, nu qu'on traverse ?

Et laisser les néons rectilignes qui diffusent leur éclairage mat, anémique dans le wagon prendre en étau vos mâchoires devenues trop pesantes...

Patricia Laranco

 

Mohamed Salah BEN AMOR commente un texte de Patricia LARANCO.

 Photo: P.Laranco.


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