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Ô Dingos, ô châteaux ! (Manchette & Tardi)

Par Mo
Ô Dingos, Ô Châteaux !

Manchette - Tardi © Futuropolis - 2011

Julie est une jeune femme d’une trentaine d’années. Elle sort d’un long séjour dans une clinique psychiatrique privée. Elle semble guérie de sa psychose mais son passé de délinquante juvénile l’a fortement marquée. La précarité dans laquelle elle a vécu, l’addiction dont elle a eu maille à se défaire, tout cela, elle ne peut pas l’oublier.

Mais aujourd’hui c’est le grand jour. Hartog, son nouvel employeur, est venu la chercher à la clinique. Ce jeune homme, riche industriel, lui a proposé un emploi de nurse. Hébétée, elle découvre son nouveau cadre de vie luxueux et rencontre Peter, le neveu de Hartog. L’enfant de 7 ans, dont son oncle est devenu le Tuteur à la suite de la mort de ses parents, est une vraie peste. Jusqu’à présent, tout le monde lui a toujours passé ses caprices et Julie n’y coupe pas.

Elle prend son emploi au sérieux et dès le premier jour, la nurse propose à l’enfant une balade jusqu’aux Jardins du Luxembourg. Pendant que Peter fait un tour de manège, la jeune femme est menacée par un homme. Intimidée par l’arme qu’il pointe sur elle, elle obéit et demande à Peter de la suivre. Une heure après, Julie fait la connaissance de Thompson. C’est lui qui a organisé le kidnapping. Et si tout se passe comme prévu les premières heures, les ressources que Julie va déployer pour s’extraire des griffes de ses ravisseurs vont les surprendre.

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Après Le Petit bleu de la Côte Ouest et La Position du tireur couché, voici la troisième adaptation d’un roman de Jean-Patrick Manchette réalisée par Jacques Tardi. Jérôme le soulevait déjà dans sa chronique : on est ici face à une œuvre on ne peut plus aboutie.

Ô Dingos, ô châteaux ! (Manchette & Tardi)
Passée une vingtaine de pages consacrées à la mise en place des principaux protagonistes de ce thriller palpitant, on est totalement pris dans l’action. Le rythme de l’intrigue ne s’autorise que très peu de temps-mort et la pression va crescendo à mesure qu’on s’enfonce dans l’album. On le referme après un final époustouflant d’une dizaine de pages… âmes sensibles s’abstenir !

En préface, François Guérif revient sur l’histoire atypique de cette œuvre : Ô Dingos, Ô Châteaux ! est le troisième roman de Manchette, un jeune auteur qui n’avait produit jusque-là que deux romans en collaboration avec Jean-Pierre Bastid (Laissez bronzer les cadavres et L’affaire N’Gustro). On est en 1973 et ce troisième polar de Manchette va créer la surprise en étant récompensé par le Grand Prix de la Littérature Policière. Manchette est le premier à s’en étonné, les puristes crient au scandale (du fait notamment, de son contenu relativement choquant) mais déjà, cette distinction a des répercussions : « Coup dur pour Manchette. L’écriture ne sera plus un passe-temps. Et il va réfléchir sur les tenants et les aboutissants d’un genre dont il vient de devenir, presque malgré lui, une référence ». Car jusqu’à présent, l’auteur lui-même avait précisé qu’il «  connait très mal la vie culturelle policière française », s’inspirant de livres et des films américains.

On se laisse prendre très rapidement par ce récit et l’alchimie si particulière de son ambiance. Un jeune parvenu ambigu, une roturière très fragile jetée en pâture à des criminels, un tueur à gages qui souffrent d’états d’âme… et une situation totalement inédite pour chacun d’eux, à des degrés différents. Chacun défend ses intérêts personnels et ces jeux de personnages créent une ambiance propice au thriller.

Graphiquement… hum… je pourrais opter pour la solution de facilité qui consiste à dire « C’est du Tardi ! ». Mais si les amateurs de l’auteur vont comprendre immédiatement ce à quoi je fais référence, les autres lecteurs risquent d’être déconfits. Pour eux, en espérant que d’autres amateurs me viendront en aide, je dirais que les contrastes entre noir et blanc sont mordants. Ils rendent compte de toute l’agressivité que cette situation produit sur ses personnages, de toute la tension à laquelle ils sont confrontés. Les visuels viennent sublimer l’intrigue. Ce graphisme permet à Tardi de créer des ambiances qui peuvent être en même temps très sombres et oppressantes comme il parvient, à l’inverse, à rendre compte de l’immensité du décor (pour les scènes qui se passent en pleine nature).

Ô Dingos, ô châteaux ! (Manchette & Tardi)
L’histoire de cette œuvre est intéressante. Sous la lumière de cette adaptation de Tardi, il est difficile d’y voir « une œuvre de jeunesse ». Car si Manchette l’a écrite alors qu’il n’avait que 31 ans, si Ô dingos, ô châteaux souffrait peut-être du manque d’expérience de l’auteur à ce moment de son parcours, la BD est tout son contraire. Réalisée par un auteur qui n’a plus à prouver son talent et qui a profité de l’expérience de ses précédentes adaptations (de Manchette notamment mais aussi de Siniac et Véran), « c’est une œuvre de maturité à tous égards » comme le dit à juste titre Guérif…

La page Facebook de l’album et une vidéo dans laquelle Tardi parle de cette œuvre de Manchette.

L’avis de Jérôme, Actualitte, Graphivore et Les Sentiers de l’Imaginaire.

Ô Dingos, Ô Châteaux !

One shot

Éditeur : Futuropolis

Dessinateur : Jacques TARDI

Scénaristes : Jean-Patrick MANCHETTE & Jacques TARDI

Dépôt légal : novembre 2011

Bulles bulles bulles…

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Ô Dingos, ô châteaux ! – Manchette – Tardi © Futuropolis – 2011


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