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Les déficients (environne)mentaux

Publié le 13 décembre 2011 par Legraoully @LeGraoullyOff
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Les déficients (environne)mentaux

« Moins vous êtes, plus vous avez »

Karl Marx

Cela fait presque un an qu’on nous assène que la France sans triple A, c’est aussi absurde que la vie sans nucléaire, et voilà soudain que Sarkozy et Baroin suggèrent ingénument que si l’un des A venait à tomber, c’est pas grave, on ferait sans et la vie suivrait son cours dans le meilleur des mondes possibles, cachés que nous sommes à l’abri des ailes de géant de notre Président protecteur. Et tous les plans de rigueur survenus depuis, on va les supprimer alors? Mais non, mais non, il ne faut pas tout mélanger. En Allemagne, le modèle économique de la zone euro, on commence à s’apercevoir que l’espérance de vie diminue chez les catégories les plus démunies de la population. Or c’est précisément parce que l’espérance de vie augmente que la durée des carrières est supposée s’allonger. Quand la pauvreté se sera répandue et que l’espérance de vie globale se réduira, l’âge de  départ en retraite reculera t-il aussi?

Certainement pas, car il est en des mesures de rigueur comme du prix du pétrole à la pompe quand le baril baisse, c’est trop compliqué de faire marche arrière (et pour l’essence, c’est tant mieux: la bagnole, que ce soit du fait de l’exploitation du pétrole ou du bétonnage de toute trace d’espace vert, est responsable de la plus grande partie des calamités du XXè siècle). Quel rapport avec l’environnement? Et bien toutes les péripéties qui ont accompagné la saga du AAA ont permis d’une part d’évincer les questions écologiques qui accompagnent le modèle libéral en vigueur, et ont également posé la problématique de la mesure de la richesse des économies des pays riches. Cette problématique est au coeur de la question écologique: quand la Chine et le Brésil réalisent 10% de croissance en un an, ni Sarko le vendeur de Rafale et de centrales nucléaires ni les évaluateurs fous de Standard & Poor’s ne s’interrogent sur les « externalités », pour reprendre le vocable pudique de la vulgate capitaliste, que sont le déboisement de la forêt amazonnienne ou la destruction et la pollution irréversible des vallées chinoises. Ils se font encore moins de soucis quant au respect des Droits de l’Homme si la balance commerciale n’y a rien à gagner. Heureusement, Indignés et économistes réfractaires au dogme libéral remettent la question au goût du jour

Le récent débat sur les centrales nucléaires qui parsèment notre territoire (qui sera bientôt visible de l’espace tant il sera radioactif) a attesté que l’environnement et la vie, les chefs d’Etat, de gouvernements, et de banques s’en cognent comme de leur premier délit d’initié. Croire par exemple à l’honnêteté d’un « Grenelle » de quoi que ce soit venant d’un homme qui voulait liquider l’héritage de mai 68, c’était vraiment d’une naïveté affolante. Encore une fois, sous le couperet des agences de notation, on n’a pas pris le temps de relever que le PIB ne dispose d’aucun outil pour mesurer l’échange du savoir, la solidarité, la richesse créée par la gratuité ou l’impact d’une future fuite de centrale sur les millénaires à venir. Ni Sarkozy, ni Hollande, ni Le Pen, pour nous résumer aux trois favoris, n’ont évoqué la dangerosité de ces Fukushima potentiels, et s’en sont tenus à de froids calculs sur la croissance, le prix de l’énergie, et le coût en terme d’emplois; les malheureux représentants d’EELV qui promettaient de ne pas conclure d’accord électoral avec le PS sans un engagement sur le nucléaire, ont dû en rabattre tant leurs caisses criaient famine. Ajoutons qu’il s’est tenu à Durban un énième sommet sur l’environnement où tout le monde a estimé qu’il était urgent d’attendre le prochain sommet de 2018 au Qatar pour prendre le moindre engagement contraignant, le tout dans une indifférence quasi-générale. L’Union Européenne aura au moins pu y prouver qu’elle a autant d’influence sur le terrain politique que sur l’économique, et l’arnaque du développement durable a encore de beaux jours devant elle.

Enfin, non seulement les politiques se contrefoutent de l’écologie avec un cynisme rafraichissant (contrairement au climat qui se réchauffe), mais la société civile n’est pas en reste. Bref récapitulatif 2011, toutes catégories confondues: on a déjà chroniqué ici l’ouvrage de Pascal Bruckner, crétin prétendument hédoniste qui devrait relire Epicure pour savoir que celui-ci préconisait une existence heureuse dans la frugalité, et pas dans la débauche consumériste effrénée comme on le croit trop souvent. Ensuite c’est Frédéric Mitterand qui s’est mis en tête d’inscrire l’horrible corrida au patrimoine immatériel de la France (dans la même catégorie que le ministère de l’Intérieur, sans doute), avant que le gouvernement n’essaie de faire passer en loucedé l’exploitation du gaz de schiste. Puis s’est ajouté un article de Patrick Besson qui caricaturait l’accent et le programme d’Eva Joly; le monsieur doit être totalement daltonien pour voir un rapport entre le vert de l’ex-juge et le rouge stalinien qu’il croit y déceler. On a quand même bien rigolé en voyant son patron Franz-Olivier Giesbert hurler au politiquement correct alors qu’il mériterait un Hot d’Or pour l’ensemble de la carrière de sa langue auprès des divers présidents de la Vè République. Plus proche de nous, les responsables de la sécurité nucléaire ont affirmé avoir épargné la vie des militants de Greenpeace qui s’étaient introduit avec une facilité déconcertante dans une centrale (il y a quand même quelques humanistes chez les Jeunes Populaires qui trouvent qu’on aurait dû les abattre). Etonnant, quand on connaît le sort réservé par les CRS aux militants qui voient d’un mauvais oeil le passage de trains chargés de déchets sur tout le territoire. Et le weekend dernier, c’est Miss France qui s’est fait médiatiquement tancer pour avoir affirmé ses convictions antispécistes en disant (maladroitement peut-être, mais l’idée est là) que le sort qu’on réserve aux animaux est révélateur du respect qu’ont certains pour la vie en général.

On déplore que Laurent Ruquier, l’homme qui produit du calembour vaseux comme il respire, n’ait jamais été aussi virulent à l’encontre des sorties fumeuses d’Eric Zemmour, et on l’on s’inquiète du fait qu’Audrey Pulvar ait pu être contaminée d’une crise de gonflement de l’égo par son compagnon. Car si effet, aucune Miss France n’a encore obtenu de Prix Nobel de chimie, autant que je sache, aucun chroniqueur de chez Ruquier ne l’a obtenu non plus. Et c’est tant mieux, car ainsi aucune Miss France ne fabriquera de bombe atomique.

Dans un prochain épisode, nous proposerons à Mlle Delphine Wespiser, lauréate du concours d’Endemol, la citoyenneté d’honneur de la République messine, et le titre honorifique d’Impératrice de la Mirabelle.

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