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La maison sans neige sur le toit…

Publié le 19 décembre 2011 par Notil

La maison sans neige sur le toit…

Loin d’ici, très loin d’ici, dans une contrée où seul souffle le vent d’hiver, ou seuls les flocons  remplacent les feuilles aux branches des arbres, un village d’à peine quelques maisons reposait sur la plaine enneigée. Mais

de ces maisons, une avait la particularité de n’avoir jamais de neige sur son toit. Pourtant rien ne la différenciait des autres demeures au toit recouvert d’un manteau blanc. Là où l’hiver durait toute l’année, on aurait pu croire que le temps s’en tenait encore au printemps lorsque l’on approchait la maison. Pourtant, comme pour les autres, l’hiver froid et rigoureux se sentait aux odeurs de bois brulé qui s’échappaient de la cheminée. Mais elle n’avait pas de neige sur son toit. Elle était habitée par un vieil homme que personne ne connaissait plus pour ne plus l’avoir vu dans les rues depuis des années. Les vieux se souvenaient encore de lui mais jamais n’en parlaient. Quant aux jeunes ils ne posaient plus de questions, sachant que les anciens leur répondraient évasivement sans jamais s’apesantir. Pourtant l’homme qui vivait là, dans cette maison sans neige n’était pas n’importe qui. Il fut un temps pas si éloigné que cela où tout le monde le respectait, un temps où tout le monde le saluait dès qu’il apparaissait sur le perron de sa demeure. Puis un jour plus rien…

….

- Papa, osa doucement l’enfant, je peux sortir de table, s’il te plait?

« As-tu fini ta soupe fiston » lui répondit le père.

L’enfant regarda son bol et sanglota. Le bol n’était pas vide. Il n’aimait pas cette soupe. Une soupe servie sans amour par un père qui ne l’avait plus appelé par son prénom depuis des semaines, des mois, se contentant de l’appeler « fiston ».

« Finis ta soupe et tu pourras sortir de table. En attendant, laisses moi tranquille ».

Le ton du père n’appelait aucune objection et l’enfant s’en serait bien gardé de toute façon. Il jeta un coup d’oeil par la fenêtre. La neige tombait à gros flocons sur le village. Sur le village mais pas sur la maison d’en face, celle du vieux monsieur. De cette maison l’enfant ne connaissait que le contour d’une barrière de bois vermoulu et  ce petit portail en fer qu’il s’était promis de pousser un jour. Ce jour était venu. Il lui fallait quitter la table. Mais pour quitter la table, il lui fallait finir son bol de soupe. Une soupe qu’il n’aimait pas.

« Manges au lieu de bailler aux corneilles » lui lança le père, « et depêches-toi que je puisse me reposer ».

L’enfant jeta un dernier coup d’oeil vers la maison sans neige et se saisit alors du bol. Entre deux hoquets et quelques hauts-le-coeur, les larmes aux yeux, il finit son bol. Son père se leva et prit possession de son fauteuil au tissu jaunissant sur lequel, l’enfant le savait, il n’allait pas tarder à s’endormir. Il fallait que le père s’endorme. Alors l’enfant pourrait sortir à la nuit tombée et se diriger vers la maison sans neige sur le toit. Là-bas, il pousserait le portail de fer et entrerait là où personne n’osait plus s’aventurer depuis des lustres. l’enfant voulait savoir qui était ce vieil homme. Ce qu’il avait entendu des gens du village ne l’avait jamais convaincu. Il voulait savoir et il saurait.

… Les étoiles brillaient dans le ciel et le vent soufflait. La neige tombait à gros flocons et l’enfant entendait les ronflements du père. L’enfant se tenait là, assis à la table, une main sur le bol, vide à présent, l’autre tapant nerveusement sa cuisse. Il devait savoir, et c’était ce soir. Demain il serait trop tard….

A demain, portez-vous bien…


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