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Un Noël à la campagne

Publié le 28 décembre 2011 par Oz

Cela ressemble à une émission de bienfaisance, mais qui ferait du mal. Comme un Téléthon avec son grand compteur, où s’affichent en chiffres lumineux, euro après euro, les dizaines puis les centaines de millions.

Sauf qu’entre dinde et bûche, ce dimanche 25 décembre, le programme n’en appelle pas aux dons des téléspectateurs. Non. Nous sommes devant « Elysée 2012, la vraie campagne », présenté par Serge Moati sur LCP. Le compteur lumineux ne mesure pas la générosité des Français ; il égrène le coût du projet de François Hollande, selon la comptabilité de l’UMP. Une mise en scène orchestrée par les caciques de la majorité pour démontrer, selon eux, « l’imposture » du programme du Parti socialiste, son « irréalité totale ». « La campagne commence », lance àla tribune Jean-François Copé. Les mots et les slogans ont remplacé les chiffres du grand compteur. Ils sont parfois tout autant vertigineux.

C’est que la campagne ne respecte aucune trêve, ne marque aucune pause. Les caméras s’immiscent discrètement dans les réunions, les meetings, s’invitent dans les bureaux, les déplacements. Les candidats rodent leurs formules, testent leurs postures, les micros restent allumés. A l’UMP, en attendant le nom de son champion, on tente surtout de reconquérir un large éventail de l’électorat de droite. Alors, on laisse à Lionnel Lucas et à sa Droite populaire le soin de proposer « une journée du drapeau », « le port d’un vêtement commun dans les établissements scolaires ».

A Hervé Novelli celui de bien s’occuper des libéraux. Quitte à autoriser Alain Madelin à déclarer que la crise signait l’acte de décès de l’UMP. « L’UMP, remarque au contraire un militant, c’est quand même une bonne machine de guerre. »

On voudrait somnoler, en ce jour de Noël, devant son écran. Impossible. C’est que, loin des états-majors, les militants ne polissent pas leurs mots. Caméras et micros nous les retournent dans toute leur crudité, leur brutalité. « D’accord Copé et Sarkozy, mais ils sont où sur l’insécurité ? », interroge ce sympathisant UMP. « Il faut rentrer dans les quartiers, réclame en substance celui-là. Ce sera deux mois de guerre civile, il y aura des bavures mais faut assumer… » A-t-on bien entendu ?

On aurait pu éteindre. Si, au détour d’une visite de Jean-Luc Mélenchon en l’usine de Still-Saxby de Montataire (Oise) menacée de fermeture, au milieu du désarroi des ouvriers, de leurs sanglots, de leurs récits des « dégâts humains » de la crise, de la tentation de certains de se jeter dans les bras du Front national, on n’avait été happé par une confession : « La lutte c’est bon, hoquetait un homme, mais ça laisse des traces. »

On ne comptait plus là-dessus, de toute manière, pour ramener un peu de l’insouciance de Noël dans le foyer. Mais peut-être dans la nuit sur « L’instinct de la musique » (Arte), passionnante exploration scientifique des effets physiologiques des sons et des notes sur les hommes. Du pouvoir de la musique autrement dit. A-t-elle aussi celui d’adoucir les moeurs politiques ?

(Publié dans Le Monde daté du 27 décembre 2011)

Olivier Zilbertin


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