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Don’t feed the @nadine__morano !

Publié le 04 janvier 2012 par Variae

Ce billet va réussir l’exploit de faire ce qu’il recommande d’éviter : parler de Nadine Morano.

 Don’t feed the @nadine__morano !

L’histoire est désormais bien connue. Le symbole « populo » du sarkozysme, équivalent « petit blanc » de Rama Yade ou Rachida Dati côté diversité, s’est mis à Twitter et a trouvé un style particulier, entre beaufrie, agressivité compulsive et 3615-je-raconte-ma-life. L’arrivée comme un cheveu sur la soupe de la Madame-Sans-Gêne de l’UMP a été saluée, comme il se doit, par les railleries des twittos, consternés par les maladresses et les fautes d’orthographe de l’élu lorraine … qui ne s’est pas démontée, loin de là, et a simplement déplacé son activité twittesque aux heures nocturnes. Il est loin le temps d’un Frédéric Lefebvre cassant, se faisant éjecter du réseau et ne parvenant jamais à s’y installer dans la durée.

Un tweet de Nadine Morano contre Pierre Moscovici en particulier, surprenant d’agressivité et de vulgarité – d’une ministre à un député qui plus est – a achevé de faire la légende de l’intéressée.

Moscovici sur RTL en donneur de leçon en dignité… D’après la presse il aurait échanger des SMS salaces avec DSk… Affaire Carlton à Lille

— Nadine Morano (@nadine__morano) Janvier 2, 2012

De quoi nourrir deux positions conjointes à son égard : l’une, que l’on peut lire par exemple sous la plume de Bruno Roger-Petit, faisant de la ministre l’incarnation de la déchéance culturelle et intellectuelle du sarkozysme ; l’autre, mise en œuvre par les twittos et internautes de gauche, consistant à s’acharner sur elle, à lui rendre coup pour coup en misant sur son inexorable décrédibilisation. Bref, dans les deux cas @nadine__morano serait définitivement un boulet pour la campagne du président-candidat, dérapant hors de tout contrôle et méritant de concentrer les tirs de l’opposition.

C’est sans doute là le piège.

D’abord parce Nadine Morano n’a en fait pas raté son entrée sur Twitter. Elle a globalement compris comment utiliser l’outil et comment y prospérer : en développant la seule ligne éditoriale qui fonctionne sur ce genre de réseau, celle du « plus c’est gros, plus ça passe ». Twitter n’est pas une société savante ou un salon mondain. C’est le royaume du buzz et du mini-scandale. On ne peut pas dire non plus que Morano abîme son image ministérielle, ou critiquer son usage peu distingué de l’outil : de toute manière, elle avait déjà une image dégradée, et n’a pas grand-chose à perdre.

Ensuite parce qu’elle s’accroche et ne se démonte jamais, pour le moment. Elle répond, rétorque, en rajoute dans l’outrance et l’énormité. Et je ne suis pas sûr qu’à la longue, son culot ne génère pas une forme de sympathie amusée, et ne finisse pas par mettre (certains) rieurs de son côté. Sans compter que les attaques répétées sur sa bêtise ou sa grossièreté peuvent prêter le flanc à une riposte façon Guy Carlier sur la pauvre petite provinciale en proie au racisme social d’une élite parisienne.

Enfin, parce que c’est probablement exactement ce qu’attend Nadine Morano. Encore une fois, son image est telle qu’elle n’a rien à perdre. Elle a en revanche tout à gagner à attirer dans le caniveau ses adversaires qui se maintiennent à un autre niveau. Elle est un agent provocateur, qui salit et fait diversion. Est-ce un hasard si son agression sur Pierre Moscovici et DSK survient le jour de nouvelles révélations sur Karachi ?

C’est une évidence mais qui mérite d’être martelée, la droite n’a aucun intérêt à un débat approfondi sur son bilan et ses réalisations, d’une part, et d’autre part, vu sa position dans les sondages, sa première priorité est de déboulonner la statue du commandeur Hollande. L’abaissement du niveau du débat présidentiel, sa réduction à un échange d’insultes, de tirs de « snipers », de coups dignes de la cour d’école, servent ce double objectif, et achèvent de dégoutter les électeurs dont la mobilisation est pourtant nécessaire pour battre Sarkozy.  Tout en permettant de gagner du temps d’ici l’entrée en campagne de ce dernier.

La ministre-twitteuse, et les initiatives comparables de l’UMP dont elle est l’avant-garde, méritent donc le même traitement que les trolls : l’ignorance, le mépris. Laissez-les s’époumoner dans le vide, restez sur le fond. Don’t feed the @nadine_morano !

Romain Pigenel


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