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petit message personnel @SardineMorano

Publié le 09 janvier 2012 par Mister Gdec

petit message personnel @SardineMoranoHumoriste, un job pas toujours facile

Par SOPHIA ARAM Humoriste, chroniqueuse à France Inter

Qu’ai-je bien pu dire mercredi dernier, pour qu’une ministre de la République tombe subitement dans les bras de Guy Carlier alors que celui-ci terminait justement de lui cirer les godasses ? Sur l’antenne d’Inter, j’ai tenté d’expliquer à Nadine Morano que les musulmans ne parlaient pas forcément verlan et qu’une casquette à l’envers n’était pas un insigne religieux. Puis, après lui avoir rappelé qu’il n’était pas du meilleur goût de cuisiner une pizza à la béchamel pour symboliser le liquide séminal de DSK, j’ai terminé sur les troubles affectifs de Guy Carlier qui l’auraient amené, dans son livre consacré à Nadine Morano, à confondre «populaire» et «vulgaire».

C’est quoi le scoop ? Que Guy Carlier cire les pompes d’une ministre ou le fait qu’il qualifie de populaire tout ce qui ressemble à de l’inculture, à de la dysorthographie et à de l’humour graveleux ?

Sa réaction est immédiate, Nadine Morano ne me trouve pas drôle. A cet instant, je suis d’accord avec elle. Comment voulez-vous rivaliser avec des comiques troupiers tels que Morano, Lefebvre, Douillet, Mariani, Vanneste, Luca, Brunel et j’en passe.

Quand Morano tweete «qu’elle tape plus vite que ses doigts» ou quand Lefebvre explique sur Europe 1 que «dans certains pays les poupées vaudou sont considérées comme des armes de guerre». Que voulez-vous ajouter ? La vanne est déjà à l’intérieur de la déclaration. Qualifier leurs propos lénifiants, c’est prendre le risque de se faire traiter de rabat-joie ou de donneur de leçons, les grossir, c’est les plonger dans la science-fiction.

Le même jour, Nadine Morano balance benoîtement à Patrick Cohen, sur France 5, que Philippe Val se serait excusé pour mes propos «vulgaires et indécents» puis récidive le lendemain sur RMC. D’un côté, je me réjouis qu’elle ait enrichi son vocabulaire de deux mots nouveaux, de l’autre, je tombe de l’armoire. Comment imaginer que Philippe Val, avec qui je venais d’échanger sur la difficulté de conclure sur l’erreur de jugement de Carlier sans écorcher l’objet de son erreur, soit aussi prompt à me désavouer ?

Même en admettant que je puisse représenter pour la direction de France Inter un potentiel d’emmerdes non négligeables, jamais personne ne m’a invitée à retenir mes coups. Mises à part les atteintes au physique, ma liberté à l’antenne est totale et le soutien de mes collègues sans faille. J’en profite pour leur dire merci, parce qu’ils sont amenés à défendre des chroniques qu’ils ne doivent pas toujours trouver à leur goût.

L’annonce de Morano me surprend. S’excuser pour si peu, ça ressemblerait à un désaveu assez cinglant pour que je laisse la place sur la Matinale. Et puis, j’attends. Une intuition. Serait-elle menteuse ? Je veux dire en plus du reste.

Le soir, après son démenti, Philippe Val me confirme par téléphone qu’il n’a «jamais présenté ses excuses à Nadine Morano». Il lui a téléphoné. Par politesse, pour lui expliquer qu’il comprend son émotion mais qu’il n’est pas nécessaire de dramatiser le propos. Donc… Nadine Morano ment. Je sais qu’à cet instant certains imaginent qu’il soit possible que ce soit Philippe Val. Mais, sincèrement, même ses détracteurs les plus zélés peuvent comprendre que s’excuser puis démentir son excuse une heure après, c’est moyen moins.

Du coup, Nadine Morano ment. C’est ma conviction. Alors, oui je sais, ça peut surprendre, mais j’aimerais me hisser au niveau d’ampleur que Nadine Morano a voulu donner à cette tempête dans un verre d’eau tiède en montant à mon tour sur ma caisse en bois pour demander solennellement la démission de Nadine Morano du gouvernement. Qu’elle se reconvertisse au Théâtre des Deux Anes, ou qu’elle ouvre une pizzeria, mais qu’elle démissionne. Et puisqu’elle prend le temps de discuter de mon cas avec ses collègues à l’heure où l’on aimerait que nos impôts servent à rémunérer des individus compétents et concentrés sur le bien public et bien… qu’elle emmène ses collègues de bavassages avec elle. Ça leur donnera le temps de discuter de tout ça ! Je vous serais également reconnaissante, Monsieur le Premier ministre, de ne pas prendre ces quelques remarques pour un «mépris de classe», et encore moins pour un sectarisme gauchiste à l’égard de la droite.

Parce que lorsqu’Henri Guaino, qui est issu d’un milieu certainement aussi modeste que le mien, entre dans les studios d’Inter, il ne viendrait à l’esprit d’aucun journaliste de simplifier ses questions pour qu’il les comprenne et encore moins de lui présenter Bernard Guetta…

Parce que oui, j’oubliais. Ce mercredi-là, à peine arrivée dans les studios, Nadine Morano a demandé qui était Bernard Guetta. Le temps d’intégrer l’idée qu’une responsable politique puisse ne pas connaître Bernard Guetta, Thomas Legrand a tenté de résumer l’interminable CV de notre prix Albert-Londres. Mais, devant l’attention flottante de la ministre, Thomas lui explique grossièrement qu’il s’agit d’un journaliste qui a le «06» de Lech Walesa. Puis, par désespoir ou pragmatisme, il finit par lâcher dans le vide : «C’est le frère de David.» Mais ce n’est pas pour son ignorance crasse que je trouve Morano vulgaire. La vulgarité, c’est aussi une catégorie politique. Par exemple, faire croire que l’on peut définir politiquement ce qui relève ou non de l’identité nationale, je trouve ça vulgaire. Organiser un débat sur la laïcité, c’est noble, le réduire à l’islam, je trouve ça vulgaire. Se moquer de DSK, c’est souhaitable, mais symboliser son foutre par de la béchamel, c’est immonde. Ce que je pense, mais cela n’engage que moi, c’est qu’on a tout à fait le droit de considérer que Nadine Morano est une fille formidable et populaire mais que j’ai aussi celui de la trouver vulgaire.


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