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Pêche enthousiasmante de petits poissons

Publié le 05 mars 2008 par Vanessav
Simon LEYS, dans ses chroniques littéraires, prend à part la culture, la digère et se la réapproprie avec sagacité et pertinence. Il est vrai que l’auteur fait continuellement références aux écrivains, philosophes ou artistes et que pour comprendre en profondeur sa position il nous (me) faudrait chercher plus loin. Seulement, la juxtaposition des pensées d’autrui se mêle à la qualité de la réflexion de LEYS. J’ai pris un malin plaisir à cette lecture de "Le bonheur des petits poissons, Lettres des Antipodes".
D’une part, car il marque un reflet de certaines de mes préoccupations du moment : il ne faut pas oublier que Simon LEYS, ou Pierre Ryckmans, sinologue, est aussi connu pour ses traductions d’artistes chinois, et en cela, je retrouve des prolongements à mon billet sur la pensée avant l'action de peindre. J’ai encore plus envie de m’offrir « Shitao : Les propos sur la peinture du moine Citrouille-amère », dans mes mains un jour et reposé, repris un autre jour et encore reposé.
Mais aussi, parce que ses « lettres aux antipodes », courtes, rappellent une méditation sur la création tout entière. Loin des sentiers battus, cette lecture est salutaire, elle fait le pont entre toutes les formes de création (musicales, littéraires ou artistiques) et allie pensées occidentales et asiatiques. Quelques anecdotes, des incongruités prises ici et là, rendent vivant le rapport de la création au réel : du bon goût, apanage des personnes sensible au beau et non à la proximité créative, des rapports vitaux des écrivains à leurs critiques littéraires (comme une femme nue offerte à la vue, même laide, l’on se surprend à désirer la regarder), aux vies des écrivains non décalquées dans leurs œuvres, en passant par le manque d’inspiration. Soit la recette d’Hemingway, « écrire chaque jour quelques lignes comme on tire de l’eau d’un puits ; après un seau, disait-il, la nappe souterraine reprend son niveau. Mais si vous pompez trop d’eau d’un coup, vous risquez de vous retrouver à sec. » Qu’il est bon de suivre l’auteur dans son plaidoyer pour la lecture salvatrice de romans. Œuvre d’imagination mais aussi œuvre d’un historien du présent, LEYS nous rappelle avec une joie communicative ce qui est sain en considérant, à juste titre, que déjà la conscience humaine est une maladie : « Ce que je voulais souligner est simplement ceci : notre équilibre intérieur est toujours précaire et menacé, (…) et finalement c’est peut-être un personnage de Mario Vargas Llosa qui a donné la meilleure description de notre commune condition : « La vie est une tornade de merde, dans laquelle l’art est notre seul parapluie. » »


Lire d’un seul tenant est jouissif, je n’ai qu’une seule envie, reprendre la lecture pour tous les apports de cet auteur : sa magnifique éloge de la paresse loin de l’oisiveté pourtant ou encore sa philosophie de vie : « Samuel Butler compare la vie à un solo de violon qu’il nous faut jouer en public tout en apprenant la technique de l’instrument au fur et à mesure de l’exécution. » et « quiconque, en fin de parcours, a le sentiment d’avoir réussi sa vie, ne devait pas avoir visé bien haut au départ. » ou encore toutes les miscellanées sur les écrivains, musiciens ou artistes évoqués, ses envies de fumer rien que parce que c'est interdit (et bien plus que cela).

Je me garde de faire un nouveau billet sur la création « cosa mentale ». N'hésitez pas à lire le billet de Flo, elle aussi conquise, et relire l'extrait sorti de son contexte, décrivant le titre ici.


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