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O tempora, o mores 1a

Par Claude_amstutz

Bloc-Notes, 12 mars / Les Saules

actualité; politique

On dit souvent que les périodes d'élection présidentielle ne sont pas propices à faire surgir, dans le domaine de la littérature, de jeunes talents, des oeuvres audacieuses et des événements qui pourraient graviter autour de ces créations. Faute de couverture médiatique, bien souvent, ou parce que l'intérêt se porte ailleurs. On le dit. Nous verrons dans les semaines qui viennent, qu'il n'en est rien, sauf - probablement - au niveau des ventes, je le concède. Ainsi, l'attention de bon nombre de lecteurs se porte aujourd'hui vers l'actualité politique, la presse, la télévision, et on peut les comprendre. Après tout, une part de leur destin personnel, national et international se joue peut-être, au-delà des clivages idéologiques. 

L'édition française, dans ce moment historique, n'est pas en reste, même si la plupart des ouvrages disponibles ne présentent aucun intérêt: ni sens critique, ni originalité de ton, ni profondeur. Ou alors, c'est la peopolisation à outrance qu'on peut retrouver ailleurs, sans débourser un seul centime. Pourtant, parmi ces publications, certains titres méritent davantage que d'autres, une lecture en perspective. Je ne reviens pas sur le livre de Eric Brunet, qu'on peut entendre tous les jours sur RMC, Pourquoi Sarko va gagner - déjà objet d'un article dans ces colonnes: voir mon Coup de gueule du 27 février - sinon pour relever qu'il s'agit sans doute du seul texte qui, revisitant le quinquennat qui s'achève, s'attache aux réussites de Nicolas Sarkozy. Un ton vif, mordant, tonique qui ne cache pas son admiration et rééquilibre un peu les propos moins amènes tenus par les défenseurs des autres candidats à la Présidence. Lisez-le: il ne ressemble à aucun autre!

Autre approche que celle de Olivier Mazerolle, chroniqueur entre autres activités journalistiques, sur BFMTV, en compagnie de Ruth Elkrief. Dans Vue imprenable sur la campagne, il tient un journal de certains moments-clés entre le 14 mai 2011 et le 2 janvier 2012. Ainsi qu'il définit très bien lui-même sa démarche, Olivier Mazerolle choisit de mettre l'accent sur les ambitions, les projets, les programmes des uns et des autres, plutôt que sur les petites phrases ou incidents de parcours. Sans doute l'approche la plus honnête, sensible et respectueuse parmi les parutions récentes, ce qui n'empêche pas son auteur de dispenser quelques coups de griffes, mais en gentleman! Un livre plein d'esprit et de malice.

Autre personnage bien connu du grand public: Christophe Barbier, journaliste et directeur de L'Express. En une douzaine de portraits, il nous dresse dans Maquillages - Les politiques sans fard - un concentré aussi revigorant qu'une vodka-orange à huit heures du matin - de la vie politique française. Il va à l'essentiel des personnalités qu'il évoque avec une plume qui ressemble parfois à un couteau à double-tranchant. Sa faculté de synthétiser les comportements, les idées et les coulisses de la politique avec une économie de mots tout à fait étonnante, fait de ce récit, le regard le plus original sur cette course à l'Elysée. Presqu'un film, même si l'ego de Christophe Barbier - proche de celui de Eric Brunet - peut agacer, parfois. Mais on lui pardonne: son livre est épatant!

Catherine Nay, journaliste et éditorialiste à Europe 1, est l'auteur de Le noir et le rouge - L'histoire d'une ambition et de Un pouvoir nommé désir. Deux livres pertinents. Le premier était consacré à François Mitterand, le second à Nicolas Sarkozy. Elle nous revient avec L'impétueux, à nouveau consacré à Nicolas Sarkozy, cinq ans plus tard. Des éclairages peu mis en évidence ailleurs sur la personnalité intime et secrète du Président, mais au reste, rien de bien neuf dans cet ouvrage qui aurait pu être plus concis. Une approche plutôt convenue, lisse - une lecture des événements un peu en retrait - pour ce livre bien écrit, mais trop long: on s'ennuie. En revanche, en quelques phrases, c'est à Catherine Nay qu'on doit, il me semble, le portrait le plus court et le plus juste de Nicolas Sarkozy: Les Français auront apprécié chez lui l'énergie, le mouvement, l'imagination, l'authenticité. Mais dans le même temps, ils auront appris à se défier, voire à exécrer son impulsivité, sa logique de défi permanent, sa véhémence, et son inaptitude à maîtriser toujours cette majesté du verbe et du comportement qui sied à un monarque républicain.

Pour conclure, un peu d'humour, afin de nous mettre tous d'accord: il s'agit du livre - le cinquième dans la série - qui pastiche les aventures du petit Nicolas, sous la plume de Gospé et Sempinny, Le petit Nicolas a bien grandi! On y rit de bon coeur. Le style est enjoué, les situations abracadabrantes. L'imagination et la truculence sont au rendez-vous. On s'amuse comme dans une cour de récréation, sans aucune retenue. Attention aux croche-pieds, tout de même...  

Eric Brunet, Pourquoi Sarko va gagner (Albin Michel, 2012)

Olivier Mazerolle, Vue imprenable sur la campagne (Hugo et Cie, 2012)

Christophe Barbier, Maquillages - Les politiques sans fard (Grasset, 2012)

Catherine Nay, L'impétueux (Grasset, 2012)

Gospé et Sempinny, Le petit Nicolas a bien grandi (Mango, 2012)

photo: Christophe Barbier


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