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Décret RSE : il fallait distinguer selon la nature de l’activité de l’entreprise !

Publié le 05 juin 2012 par Jblully

Décret RSE : il fallait distinguer selon la nature de l’activité de l’entreprise ! © lassedesignen - Fotolia.comLa publication du décret du 24 avril 2012 « relatif aux obligations de transparence des entreprises en matière sociale et environnementale » rappelle à notre bon souvenir que les sociétés françaises doivent tenir compte de plus en plus de l’impact environnemental de leur activité.

On sait que depuis la loi dite « NRE » du 15 mai 2001, les sociétés cotées sont notamment tenues d’indiquer dans leur rapport annuel de gestion, des informations sur la manière dont elles prennent en compte les conséquences sociales et environnementales de leur activité. Puis, c’est la loi dite « Grenelle II » du 12 juillet 2010 (article 225), qui est venue étendre – doublement – cette obligation, en y ajoutant, d’une part, les « engagements sociétaux en faveur du développement durable » et d’autre part en l’appliquant à certaines sociétés non cotées, dont le total de bilan ou le chiffre d’affaires et le nombre de salariés excédent certains seuils fixés par décret. Ne restait plus qu’à publier le texte réglementaire  pour que le dispositif soit complet et définitivement applicable.

C’était toutefois sans compter sur une intense période de négociations entre le gouvernement, les organismes représentatifs des entreprises, les ONG et sur le législateur … défaisant ce qu’il a lui-même construit … (la loi de régulation bancaire et financière d’octobre 2010 a supprimé la possibilité pour les institutions représentatives du personnel et les parties prenantes à des dialogues de l’entreprise de présenter un avis sur le volet développement durable. La loi Warsmann du 22 mars 2012 a quant à elle apporté plusieurs retouches significatives, en particulier pour tenir compte du retard de publication du décret ; créer une distinction entre les sociétés cotées/non cotées s’agissant du contenu de l’information extra-financière ; ou encore pour assouplir les règles applicables aux groupes de sociétés publiant des comptes consolidés).

Au terme de ce parcours, le décret attendu depuis presque deux ans vient finalement préciser :

-   que les sociétés non cotées soumises à l’obligation de reporting extra financier sont celles dépassant les seuils suivants : 100 millions d’Euros au total de bilan ; 100 millions d’Euros pour le montant net de chiffres d’affaires, et 500 pour le nombre moyens de salariés permanents employés au cours de l’exercice ;

-   les deux listes (selon que la société est cotée ou non) d’informations à mentionner dans le rapport de gestion ;

-   les conditions de vérification par un organisme tiers indépendant ;

-   l’entrée en vigueur au 31 décembre 2011 pour les sociétés cotées ; et pour les sociétés non cotées, une entrée en vigueur échelonnée, selon leur taille, entre 2011 et 2013.

L’objectif initial de cette mesure, qui s’inscrit dans la politique plus générale du Grenelle de l’environnement, est bien entendu d’inciter les entreprises à lutter contre les changements climatiques, à maîtriser la demande d’énergie ou encore à instaurer un environnement respectueux de la santé. Son effet sera bien réel pour celles dont les activités ont un impact direct sur l’environnement (transport, traitement des métaux, énergies fossiles, etc.). Mais, qu’en sera-t-il pour les autres ?

On peut penser notamment à celles qui ont des activités principales de bureau (audit, conseil, communication, gestion, etc.) qui, a priori, sont non polluantes. Mais à y regarder de plus près, on peut déceler un impact sur l’environnement (utilisation de ramettes de papier, électricité consommées par les ordinateurs, mise en place de navettes de transport entre la gare de RER et le lieu de travail, etc.) qui devra être traduit dans le rapport de gestion. Ainsi, ces entreprises, lorsqu’elles répondront aux seuils prévus par le décret devront alors indiquer notamment « les rejets de gaz à effet de serre », « la consommation de matières premières et les mesures prises pour améliorer l’efficacité dans leur utilisation », ou encore « la consommation d’énergie, les mesures prises pour améliorer l’efficacité énergétique et le recours aux énergies renouvelables ».

Pourtant, il n’est pas certain que ces nouvelles obligations suffisent à infléchir les pratiques de ce qui constitue le quotidien des salariés eux-mêmes. On risque alors bien de rencontrer en pratique une approche de « box-ticking », qui consiste pour l’entreprise à répondre aux formalités qui lui sont imposées sans pour autant s’intéresser sur le sens même de ses obligations, et donc sans chercher à réduire son impact sur l’environnement. En ce domaine, des démarches basées sur le volontariat, l’information et la sensibilisation du personnel seraient bien plus efficaces qu’un rapport de gestion que les salariés ne consultent pas…

C’est pourquoi, afin d’éviter à certaines entreprises de supporter des coûts administratifs liés à des obligations dont l’effet paraît plus qu’incertain sur leur activité, il aurait été souhaitable que le reporting environnemental s’applique en distinguant selon la nature de leur activité principale ! On peut regretter que cette idée n’ait pas retenu l’attention du législateur…


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