Magazine Beaux Arts

Sylvie Laliberté : d'artiste contemporaine à musicienne [FrancoFolies, Montréal : 2012]

Publié le 18 juin 2012 par Paule @patty0green
Je me souviens encore de son passage à l'université lorsque j'étais encore au BAC. Elle donnait une conférence. Elle tentait de dérider un peu le milieu académique. Enfin, les profs et les étudiants d’histoire de l’art. Elle s'acharnait maladroitement à décoller les pages de son exposé. Celles-ci étaient toutes gommées par le chewing gum qu’elle avait posé dans ses documents, juste avant d’aborder son travail artistique. C’était  pour le plaisir de voir nos visages éberlués, j’imagine. Et ça y était, j’étais sous le charme!Sylvie Laliberté : d'artiste contemporaine à musicienne [FrancoFolies, Montréal : 2012]Ce ne fut pas très long avant que certains académiques lui lancent des questions matraques. Des questions qui n’allaient visiblement pas dans le sens de sa pratique artistique pour laquelle il y a toujours une large part d’improvisation. On cherchait les failles là où il y avait de la libre expérimentation. On tentait d'élaborer des théories, là où l’artiste, munie d’une très grande sensibilité, parvenait à toucher quelque chose d’essentiel. Enfin, c’est souvent comme ça, malheureusement. On tue un peu nos artistes en déferlant sur eux nos préoccupations esthétiques déconnectées. On les achève en les amenant sur un terrain totalement infertile pour l’émergence d'un véritable discours qui rendrait justice à leur art.
Sylvie Laliberté : d'artiste contemporaine à musicienne [FrancoFolies, Montréal : 2012]Depuis quelques années, on voit moins Sylvie Laliberté dans le milieu des arts visuels que dans celui de la musique. Mais l’œuvre de Sylvie, c’est bien plus que des installations, des vidéos d’art, des photographies ou de la musique. L’artiste a créé et continu de faire vivre ce personnage enthousiaste qui réconcilie si fortement la candeur et l’ironie incisive. 
Sylvie Laliberté : d'artiste contemporaine à musicienne [FrancoFolies, Montréal : 2012]Hier, aux Francofolies de Montréal, j'ai cru reconnaître la naïve et touchante jeune femme de la fameuse vidéo Bonbons bijoux. Une vidéo pour laquelle l'artiste a remporté le prix de la 44e édition du Festival international du court métrage d’Oberhausen (Allemagne). Je reconnaissais son humour, ses gestes et sa grande sensibilité. Accompagnée de deux guitaristes, parce que « c’est beau des hommes qui se cachent derrière des guitares », elle y a merveilleusement interprété la chanson thème de Bonbons bijoux, Je suis naïve ainsi que Carré d'amour, évoquant du même coup le fameux symbole du carré rouge (la chanson fut écrite bien avant le conflit étudiant). Juste avant l'interprétation de cette dernière, Sylvie a également évoqué la présence du carré rouge dans l'histoire de l'art. Elles sont rares, les chanteuses qui nous parlent d'histoire de l'art!
Sylvie Laliberté : d'artiste contemporaine à musicienne [FrancoFolies, Montréal : 2012]
Reconnaître l'identité comme un processus créatif et fictif me semble être la clé d'un travail artistique qui ne s'épuise jamais. En ce sens, il me semble que le « personnage » est ce qui permet à Sylvie la plus grande des libertés dans ce bas-monde. L'artiste a également (surtout) chanté les berceuses de son troisième et plus récent CD intitulé C’est toi, mon lieu préféré sur terre. Ce titre évoque bien l’idée de l’individu comme lieu d’explorations infinies. Un lieu inépuisable lorsqu'il est investi d'une créativité toujours renouvelée. Et lorsqu'on ne se limite pas à un seul moyen d'expression. Et lorsqu'on le bourre d'amour, comme elle le fait. Le titre de son livre datant de 2007, parce que Sylvie Laliberté écrit aussi (!), Je suis formidable, mais ça ne dure jamais longtemps, évoque également le personnage qui passe sans cesse d’un état à un autre. Qui peut se vanter d'être formidable "longtemps" aujourd'hui? L'impermanence...(À méditer)
Sylvie Laliberté : d'artiste contemporaine à musicienne [FrancoFolies, Montréal : 2012]Enfin, Sylvie Laliberté, c’est avant tout une artiste qui expose la plasticité de la vie par son aisance à naviguer avec fluidité dans un monde plutôt rigide. Par la création de "petites choses", parce que celles-ci l'épatent trop pour en faire des grandes, elle œuvre sa vie avec un véritable doigtée de fée que l'on voudrait tous maîtriser. Elle s’approprie la réalité, SA réalité qu’elle manie si finement que je la soupçonne fortement d'avoir choppé le truc pour ne pas vieillir du tout! Mais alors là, pas du tout!Sylvie, continue de nous échapper!

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Paule 235 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazines