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Les politiques et la délicate équation de l'immigration

Publié le 29 juin 2012 par Letombe

Les politiques et la délicate équation de l'immigrationJe ne pense pas spécialement grand-chose de la position de Manuel Valls à propos de l’immigration. Le sujet est très compliqué et il déchaîne des passions des deux côtés de l’échiquier politique entrainant des malentendus qui n’ont même pas le mérite d’être rigolos.

Il faut être pragmatique. D’un côté on ne peut pas accueillir toute la misère du monde et tout ça et de l’autre, il faudrait voir à ne pas oublier qu’il s’agit d’êtres humains et on ne peut pas blâmer des braves gens qui pensent qu’ils pourraient vivre chez nous que dans l’espèce de dictature tiers-mondiste d’où ils viennent. Amen.

Manuel Valls a parlé dans le poste ou plus exactement dans Le Monde. Il a dit des trucs qui ont énervé des gugusses de la gauche de la gauche qui ont probablement oublié de lire l’article en entier.

Nos camarades n’ont lu que deux phrases. Une de Manuel Valls : « être de gauche, ce n'est pas régulariser tous les sans-papiers » et une de Jean-Luc Mélenchon : « Manuel Valls valide une thèse du Front national ». Nous allons laisser Méluche temporairement. Il pourrait apprendre à tourner sept fois sa langue dans sa bouche avant de parler. M. Mélenchon a échoué dans sa bataille contre le Front National et ça ne plait pas du tout à ses alliés du PCF qui pourraient commencer à préférer la stratégie du PS…

Donc, laissons Manuel Valls (et Madame Taubira) gérer l’immigration paisiblement, on verra l’état du Front National ensuite. Dans l’attente, j’invite tous mes camarades de gauche à lire l’ensemble des propos tenus par M. Valls dans Le Monde (ne serait-ce que pour me faire un résumé).

A propos de résumé, exceptionnellement, je vais donner la parole à Didier Goux qui a laissé une réponse à Dorham qui demandait un résumé : « en gros, il a dit que les sans-papiers seraient régularisés “au cas par cas” et non massivement comme le souhaitent les officines appointées. Et, du coup, il commence à se faire taper dessus. Je ne sais plus qui a dit qu'en partant, Sarkozy avait oublié un ministre sur place. Vous voyez l'ambiance ? »

Didier Goux n’est pas un mauvais bougre. Il a un copain noir. D’ailleurs, c’est moi qui le lui ai présenté, il s’agit de Tonnégrande. Il a fait un un billet pour défendre pour Manuel Valls.

Restons sérieux.

L’immigration a été au cœur des campagnes en y rentrant par la porte et par la fenêtre. Elle est entrée par la porte avec la campagne de l’UMP (vous savez, celle qui a été « droitisée »…), au bout de plus années de stigmatisation de voleurs de poules et prieurs dans la rue. Elle est revenue par la fenêtre dans les campagnes des seconds tours pour terroriser l’électeur à propos du projet du PS d’accorder le droit de vote aux immigrés aux élections locales.

Il est temps d’apaiser les esprits.

Par exemple, se moquer de l’UMP permettra de réjouir les partisans de François Hollande.

Les pauvres. Ils ont commencé par taper sur Manuel Valls. C’est de bonne guerre. Mais ils ont fini par se rendre compte que leurs coups ne faisaient pas mouche puisqu’ils ne pouvaient critiquer que des aspects techniques dont tout le monde se fout. Par exemple, Jean-François Copé a déclaré, hier, que le « cas par cas » ne veut rien dire : « Ca peut cacher un projet d'une très grande rigueur ou d'un très grand laxisme, en fonction du nombre de cas et des critères retenus. » Ca va bien aider les électeurs, ça ! Eric Ciotti et Xavier Bertrand « avaient également critiqué les mesures sur l'immigration de Manuel Valls en parlant de "politique dangereuse" et de "double langage" pour le premier, de "rideau de fumée" pour le second. »

Etre dans l’opposition, ça n’est pas une sinécure, hein ! 6 ans et demi de blogueur d’opposition, j’ai fait. Je peux rigoler, maintenant… Il faut qu’ils se rendent compte, tout les trois, qu’ils viennent de dire aux électeurs, tous les trois, que la politique de Manuel Valls était probablement très bien mais qu’il fallait attendre pour juger.

Remercions-les… Parfois, il vaut mieux ne rien dire…

Heureusement que l’UMP a François Baroin… J’ai déjà dit ici que ce gars m’était très sympathique et expliqué les raisons « personnelles ». Toujours est-il que c’est le premier cador de l’UMP a avoir exprimé une position intelligente et presque compréhensible par les électeurs. « J'ai trouvé que les positions de Manuel Valls étaient à la fois courageuses et logiques ». « En tant que ministre de l'intérieur, il n'est pas là pour favoriser l'ouverture des frontières. La France, ce n'est pas l'hôtel des courants d'air. Donc, il est normal qu'il tienne ces positions, elles sont cohérentes avec sa ligne. » «la régularisation au cas par cas, c'est la méthode la plus logique, la plus naturelle, la plus humaine aussi parce qu'elle tient compte du parcours de la personne qui est venue chez nous et les critères qui sont retenus par Valls sont également excellents. » « Chacun a sa sensibilité dans son expression politique. Moi, il se trouve que j'ai été ministre de l'intérieur et ministre de l'outre mer et cette question de l'immigration clandestine, je la connais plutôt bien. Le cas par cas, c'est le seul moyen et j'ajoute qu'on l'a toujours fait. »

Les autres cadres de l’UMP sont restés dans la position qu’il fallait tenir avant les élections et sont maintenant dans une stratégie de reconquête de l’UMP pour un congrès à l’automne en vue de la Présidentielle de 2017, persuadés que l’immigration sera au thème de la prochaine campagne et que la droitisation est de plus en plus de rigueur.

Pendant ce temps, François Baroin montre qu’il est un gugusse raisonnable, posé, … Il rappelle aussi que le cas par cas est la seule solution possible (à part, bien sûr, les régularisations massives), ce qu’ont fait la plupart des gouvernements. Il rappelle surtout que parmi tous les prétendants, c’est le seul à connaître vraiment la question puisqu’il a fait un passage (éclair, il a remplacé Nicolas Sarkozy fin mars 2007, pendant la campagne).

Tiens ! Dans les propos qu’il a tenus, il a également dit que l’idéal était de ne pas dépasser 30000 régularisations par an… Et la seule année où cet « objectif » a été atteint depuis 2004, est celle où il passé 6 ou 7 semaines à l’Intérieur.

Tiens ! Alors que l’UMP qui perdait fixait des objectifs minimum d’expulsion favorisant une politique du résultat, François Baroin fixe des objectifs maximum de régularisation favorisant une politique plus réaliste, plus humaine…

Ca serait amusant que « la gauche modérée » parvienne à sauver une « droite modérée ».

Je ne sais pas comment Manuel Valls arrivera à gérer ce dossier, un des plus complexes que puisse avoir à gérer un ministre. Il deviendra peut-être seul contre tous dans son propre camp, tout en ayant à subir la logique opposition de Christiane Taubira, qui a aussi un job à faire.

J’espère que ces deux ministres phares sauront travailler ensemble !

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