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Pierre Lapointe, toute une histoire …

Publié le 16 février 2012 par Bullesonore

Voilà bientôt 8 ans que j’écoute Pierre Lapointe, voilà bientôt 13 ans que j’ai fait l’une de mes plus belles rencontres musicales, voilà bientôt 5 ans et quelques poussières que je pleure cette rencontre, ma blonde, et que je la retrouve chaque jour dans la musique de ce schtroumpf poète populaire et dépressif.

J’ai toujours été fasciné par les torturés, les déprimés, les mélancoliques, les tristes comme le ciel … j’ai été fasciné par Pierre Lapointe . J’ai longtemps admiré ces grands timides qui se sont longtemps drogués, ces tatoués qui ont écrit leurs histoires brûlantes sur un poignet comme des talismans de protection, ces délurés, ces perchés, ces rêveurs comme le vilain -poisseux- canard qui aveuglés par l’espoir, finissaient par s’arracher le coeur… j’ai admiré Pierre Lapointe .

Je me suis baladé dans la musique de ces artistes qui, pour eux avancer était plus qu’un effort, n’ont fait qu’embellir leurs cicatrices au risque de s’en faire d’autres, qui déployaient leurs ailes et vivaient comme un papillon n’ayant à vivre que trois jours d’été … je me suis laissé entraîner par les mélodies de Pierre Lapointe .

Mes yeux brillaient quand je rencontrais ces astres noirsj’ai rejeté l’ennui, le hasard était fascinant et j’ai été longtemps attiré par l’éphémère, la passion et l’horizon… je suis passé entre les gouttes deCoulent les rires et puis… de Pierre Lapointe .

J’ai juste envie de jaser me disait-elle…

Ma rencontre musicale avec Pierre Lapointe , je la dois à une timbrée québécoise, ma blonde. Elle s’appelait Océane, 15 ans et des poussières et vivait donc au Québec, 5 972 km nous séparaient. C’était en fin 1999. Tout nous opposait : Le milieu social, les origines, le vécu, les ambitions. C’était à l’ancienne, un coin correspondance dans un magasine de musique, des artistes qu’on appréciait tous les deux, et l’envie de jaser comme elle me disait.

Il y avait entre nous une musique commune, une douleur partagée et des rêves pleins de poussières. 5 972 km de séparation, on ne devait jamais se rencontrer, on ne voulait pas se voir d’ailleurs, on ne voyait pas l’intérêt, … on ne s’est jamais rencontré. Mais il y a eu 7 belles années de partage, d’évasion, de petit bonheur fabriqué. On ne faisait qu’inventer ce qui existait, rendre l’éphémère plus beau, et donner un sens à une vie banale inintéressante, rien de bien méchant …

Océane disait souvent « Au bout de nos coeurs étoilés, la musique nous guidera ». Aujourd’hui, ça sonne souvent dans mes oreilles comme un clin-d’oeil de l’au-delà.

La musique nous a guidé, on ne communiquait d’ailleurs qu’avec elle, on profitait de ces instants comme on pouvait car on savait qu’elle n’était que de passage, que ma blonde n’était finalement qu’une étoile filante… Je le savais, on le savait, ce n’était qu’une question de temps.

Le schtroumpf triste poète et dépressif était venu un soir d’été 2004…

Comment décrire LA rencontre avec Pierre Lapointe  ? On avait presque fait le tour avec les albums des Smiths, Bowie, Lou Reed, Joy Division, Noir Désir, Les Cowboys Fringants, Mano Solo, Lhasa, Patrick Watson, … Pas de lassitude, juste des découvertes, des plaisirs éphèméres, des albums partagés comme celui envoyé par Océane juste avant le grand départ, juste avant de tourner la page.

Je vous emmène dans la fête
Sur le carrousel où se violent les fous
Au milieu des cris de la bête
Vous noyer dans l’océan des gueux

2004, 19 ans, des brûlures sur les mains, le tableau de ma vie que j’avais dessiné en tremblant ne ressemblait qu’à un tas de cendre et puis cet album… Moi aussi, de ma bouche immense sortaient des milliers d’étoiles étiolées, il m’a fait les poches, m’a fait connaitre la passion ! J’ai eu droit à ma Reine Emilie, elle s’appelait par contre Océane sauf que tout le monde ne tombait pas sous son charme. Elle disait souvent qu’elle s’en ira mourir, en attendant le pire … Une Reine Emilie qui avait quelque chose de La Valse à mille temps  de Jacques Brel .

Que je tombe, je tombe en essayant d’aspirer le bonheur
Celui que j’ai laissé trop souvent
Celui que j’ai brûlé de mes 20 ans
En me disant, comme un pauvre imbécile :
« Demain, je serai bien plus heureux demain »

15 ans ! Le pacte fut signé à nos 15 ans … on ne savait pas que la vie était belle, pendant que les autres savouraient leur bonheur, nous dans un plaisir dénudé on se laissait exploser le coeur Tel un seul homme (chanson préféré de la maman d’Océane, qui lui rappelait la chanson The Windmills of Your Mind (Les Moulins de mon cœur) de Michel Legrand ) :

Et si je vous disais que même au milieu d’une foule
Chacun, par sa solitude, a le coeur qui s’écroule
Que même inondé par les regards de ceux qui nous aiment
On ne récolte pas toujours les rêves que l’on sème

Océane avait souvent un cutter à la main mais aussi un piano avec lequel elle pianotait si bien Le Paradis des Billes, et malgré la tristesse et les regards de glace … elle arrivait souvent à s’évader dans son paradis.

Au paradis des billes
Les hommes sont jupons
Les douleurs sont teintées
De dentelles et de rires
Malgré la main de l’autre
De trop près similaire
De couleur de jonquille
Moi, j’ai les yeux qui brillent

Ma blonde souffrait d’un trouble du déficit de l’attention avec hyperactivité  et de pleins d’autres choses qu’on ne pouvait pas guérir, elle était très impulsive plus que la moyenne et à la moindre critique de son Pierre Lapointe , tu pouvais te retrouver au tapis en moins de 5 secondes. Elle a depuis petite su encaisser les coups mais surtout comme disait Mano Solo « Que dans la vie, il faut rendre ce que tu reçois, les mauvais coups comme les plus bas…». Une fois, dans un bar, une discussion autour de Pierre avait mis le feu aux poudres, ma blonde devint rouge de colère. Il a suffit de quelques secondes pour entendre un « elle nous l’a envoyé au tapis ».

C’était toujours comme cela, dès qu’une personne ne parlait plus de « la musique » de Pierre Lapointe  mais s’étalait sur les rumeurs les plus stupides, Océane était là pour cogner. Dès que quelqu’un utilisait le mot « Fif » pour désigner Pierre, Océane était là pour cogner. Dès qu’elle lisait un article sur le funambule chansonnier et qu’elle n’aimait pas les termes utilisés, Océane ne cognait plus, elle prenait sa plus virulente plume et se faisait le plaisir de pondre la plus belle des réponses aux journalistes incompétents.

Le Piano comme seul amant…

Pierre Lapointe, toute une histoire …

On n’était que des enfants avec une hypersensibilité aiguë, toujours nostalgique toujours ailleurs … ça faisait froid dans le dos, on n’avait pas 20 ans et on ressentait quelques effets nostalgiques de ce qu’on venait à peine de vivre, de ce qu’on n’avait même pas encore vécu, ce qu’on ne vivra jamais ! Constamment à fleur de peau, j’écrivais des cartes postales au passé, Océane s’était mise au piano. Elle disait en gloussant « Ben quoiiii, j’ai décidé d’utiliser mon hypersensibilité à des fins créatrices, dans le but de rendre mon existence plus heureuse… comme Pierre Lapointe  ».

Le piano a été une véritable révélation pour ma blonde, des fois elle jouait 10 heures d’affilé, et à défaut de se saigner les doigts à la guitare … elle s’endormait sur le banc, dans le noir totale, se laissant emporter par la mélodie de sa seule relation amoureuse, sa plus intense … avec son piano noir.


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