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« TOTAL RECALL – MEMOIRES PROGRAMMEES » (2012) de Len Wiseman

Par Charlyh

Peut-être est-ce l’été, peut-être est-ce l’âge, peut-être est-ce un manque de titres qui me donnent envie ou peut-être suis-je moins difficile désormais sur mes choix, mais, oui, une semaine après avoir été voir « ABRAHAM LINCOLN, CHASSEUR DE VAMPIRES » de Timur Bekmambetov  -et comme annoncé- je suis allé voir :

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   « TOTAL RECALL – MEMOIRES PROGRAMMEES » (2012) de Len Wiseman
Mais, je crois que pour vraiment et bien en parler, je devrais découper mon avis en trois critiques avant de revenir donner une conclusion finale… qui ne sera peut-être pas la vôtre.
SPOILER ALERT – Attention, risques de spoilers, effectivement, voire de gros spoilers, peut-être mais alors accidentellement, dans cet article. Spoilers qui concerneront les deux films, si vous n’avez toujours pas vu la première version de Paul Verhoeven – SPOILER ALERT

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 « TOTAL RECALL – MEMOIRES PROGRAMMEES », LE FILM
Alors qu’en 2002 le film de SF « MINORITY REPORT » (déjà avec Colin Farrell), adapté de Philip K. Dick, fut un temps imaginé comme une suite directe au « TOTAL RECALL » de Paul Verhoeven avant que Steven Spielberg ne préfère, en cours de production, en faire un film à part entière, en 2009 le producteur Toby Jaffe (« ROCK STAR ») redécouvre dans une librairie la nouvelle « Souvenirs à Vendre » de Philip K. Dick (qu’il avait lu dans sa jeunesse) en se disant qu’il pourrait en faire une version complètement nouvelle comparée à celle de Paul Verhoeven, prétendant approfondir les personnages et l’histoire elle-même.
Parlant de son projet à son collègue et partenaire Neal H. Moritz, le producteur explosif des sagas « SOUVIENS-TOI L’ETE DERNIER », « SEXE INTENTIONS », « URBAN LEGEND », « FAST & FURIOUS » et « XXX », et avec qui il a travaillé sur « LE BAL DE L’HORREUR » de Nelson McCormick en 2008, les deux hommes confient en juin 2009 l’écriture du scénario (réécriture d’un remake ou relecture de la nouvelle ?) à Kurt Wimmer, réalisateur et scénariste de « EQUILIBRIUM » mais aussi simple scénariste de « LA RECRUE » (avec Colin Farrell, pour qui il réécrit peut-être inconsciemment le personnage double de Doug Quaid ?), « ULTRAVIOLET » et « SALT » récemment.
Mark Bomback, scénariste qui a rédigé le dernier film du regretté Tony Scott (« UNSTOPPABLE ») mais aussi « RETOUR EN ENFER » de Len Wiseman, s’y attèle à son tour avant que James Vanderbilt, scénariste semblant spécialisé jusque-là à l’univers des comics (le spin-off/prequel « X-MEN ORIGINS : WOLVERINE », le récent reboot « THE AMAZING SPIDER-MAN » mais surtout le superbe, surprenant et excellent « THE LOSERS » de Sylvain White), ne vienne l’affiner –comme dans le cas de tant de films et projets écrits et réécrits voire plusieurs fois chaque année avant d’être produits.
Juin 2010, Original Film (société de production de Neal H. Moritz, qui ne m’a pas l’air si originale que ça sur ce coup-là) engage le réalisateur Len Wiseman, qui a beaucoup aimé le scénario d'autant plus que dans cette version l’histoire ne se devrait pas se dérouler sur Mars, contrairement à la version de 1990.
Peut-être qu’à la veille de l’arrivée du petit module Curiosity sur la planète rouge imaginer la colonisation de celle-ci par des humains était encore trop fantaisiste et revenir à quelque chose de plus crédible -sans tomber dans les travers d’un Christopher Nolan qui s’attèle à la trilogie du Chevalier Noir de Gotham- fut ce qui a plu au réalisateur Californien de trente-sept ans alors.
Réalisateur (décrié) venu des effets spéciaux –essentiellement pour Roland Emmerich (chez qui il œuvre comme assistant au département artistique de « STARGATE, LA PORTE DES ETOILES », « INDEPENDANCE DAY » et « GODZILLA »), autre réalisateur explosif et sur-vitaminé des nineties- et passé par la pub et le clip (dont « Crush’em » de Megadeth et un clip non identifié de Static-X, fuckin’ yeah !), Len Wiseman va connaître un succès qui va déplaire à certains avec la saga vampiro-lycanthropique réadaptant l’éternelle histoire d’amour (à la base tragique) de Roméo et Juliette « UNDERWORLD » (sur laquelle il rencontre sa future femme l’actrice britannique Kate Beckinsale) avant de se voir proposer d’enterrer la saga « DIE HARD » en confrontant John McLane à un hacker dans le quatrième volet « RETOUR EN ENFER » en 2007 –quoique la dépouille doit encore être assez frémissante puisque John Moore réalise actuellement le cinquième volet « A GOOD DAY TO DIE HARD »…
Après un passage télévisé –pour ne peut-être pas perdre la main mais se retirer du grand écran- où il réalise le pilot du remake de « Hawaï, Police d’Etat » : « Hawaï Five-0 », et avoir cédé la réalisation de la prequel de sa saga : « UNDERWOLRD, NOUVELLE ERE » aux Suédois Mans Marlind et Bjorn Stein, il va pouvoir commencer à travailler à la pré-production de son nouveau film comme réalisateur –aux cotés, entre autres, de son complice et ami à la ville le chef décorateur Parisien d’origine Grecque Patrick Tatopoulos, avec qui il a déjà travaillé sur six films (les Emmerich et la saga « UNDERWORLD », dont il réalisera le troisième opus, « LE SOULEVEMENT DES LYCANS », en 2009).
Son épouse Kate Beckinsale n’étant confirmée qu’en mai 2010 par les producteurs dans le rôle de Lori, Len Wiseman pourra également retrouver Bill Nighy, qu’il aura dirigé dans sa saga « UNDERWORLD », dans le rôle du chef rebelle Quatto, alors que depuis octobre 2010 il sait que ce sera Colin Farrell qui a raflé le rôle principal de Doug Quaid, au détriment de Tom Hardy (dont sa participation au « DARK KNIGHT RISES » de Nolan lui aura coûté un nombre de rôles, en plus de celui d’un Président chasseur de vampires) et Michael Fassbender embarqué dans l’expérience prequel de « PROMETHEUS » de Ridley Scott.
Désireux de s’investir pleinement dans le rôle, l’acteur Irlandais qui semble commencer à se spécialiser dans les remakes (après « FRIGHT NIGHT », non ?) mais espère surtout « conserver un équilibre dans cette lutte permanente entre les émotions et l’intellect [puisque cela] touche à la définition de l’individu et de l’identité, du moi et du surmoi » arrive, donc, le 30 mai 2011, avec le reste du casting à Toronto pour commencer le tournage du film.
Doté d’un budget conséquent voire faramineux estimé à 200 millions de dollars (alors que des  blockbusters attendus comme « PROMETHEUS » et « TDKR » ont coûté chacun, pour donner un ordre d’idée, 130 et 250 millions, il est vrai) et allant profiter des toutes nouvelles caméras Red Epic digital (dont se sert actuellement Peter Jackson pour sa prequel « THE HOBBIT »), le réalisateur et le chef décorateur, venus des effets spéciaux et désireux de travailler à l’ancienne, font le choix de placer le plus possible d'éléments physiques sur les plateaux des studios Pinewood de Toronto où vont être tournés la majorité des scènes (comme l’appartement de Quaid dans lequel Farrell aurait passé une nuit pour s’imprégner du personnage - rien de vraiment exceptionnel, vous me direz) lorsqu’ils ne font pas construire des versions "en dur" des véhicules futuristes pour les scènes de course-poursuites -tournées dans les rues de Toronto. Les techniciens des effets spéciaux de Double Negative et The Third Floor (qui ont travaillé sur « CAPTAIN AMERICA » ou « LES RELIQUES DE LA MORT ») concevant de nombreux blocs d'immeubles visibles au premier plan et à mi-distance avant de les reproduire informatiquement et de manières aléatoires pour les multiplier dans les plans d’ensemble afin de donner l'illusion d'une ville vaste et complexe.
Mais, au-delà de toutes ces bonnes intentions, qu’en est-il de ce « TOTAL RECALL – MEMOIRES PROGRAMMEES » ?
Personnellement et en ne s’en tenant qu’au film (sans le comparer à la version précédente, ce que je ferai plus bas), Len Wiseman réussit à offrir aux spectateurs estivaux un honnête divertissement, qui, certes, ne risque pas de plaire à tout le monde mais remplit son contrat de vous occuper pendant près de deux heures.
A la fin de ce siècle, plusieurs conflits chimiques ont dévasté la planète au point d’en faire comme richesse principale et supérieure l’espace vital, seuls deux territoires étant restés épargnés mais surpeuplés : l’Angleterre et ses iles voisines désormais connues sous le nom d'Union Fédérale Britannique, puissance économique de l’hémisphère Nord, et dans l’hémisphère Sud opposé l’Australie, qui comme au XVIIIème siècle est redevenue la Colonie, où se concentrent les ouvriers, les pauvres et autres laissés-pour-compte de cette nouvelle société.
Chaque matin, là-bas, Douglas Quaid (Colin Farrell) se rend de l’autre coté de la planète -via l’extraordinaire et spectaculaire moyen de transport qu’est la Chute (une immense tour qui me fait penser à l’une des premières tours que l’on aperçoit dans le « BLADE RUNNER » de Ridley Scott et que Patrick Tatopoulos prétend avoir désigné sur un énorme 747 mais qui est en fait un ascenseur qui relie via le noyau terrestre et en ligne droite les deux hémisphères !)- pour aller assembler dans une usine anglaise des policiers synthétiques, en attendant d’être promu à un poste supérieur et enchainant pour cela les heures supplémentaires.
Mais si sa vie semble « merdique », il est pourtant marié à la belle Lorie (Kate Beckinsale), amie d’enfance et membre des forces de secours d’urgence, qui travaille de plus en plus ces derniers temps avec la recrudescence des attaques de groupes terroristes opposés à la politique du gouverneur Britannique Vilos Cohaagen (Bryan Cranston).
C’est dans ce quotidien monotone que Doug rêve aussi de vivre autre chose et céderait bien finalement aux sirènes de la société d’implants de souvenirs virtuels, Rekall, pour s’offrir une pause… sur Mars.
Et alors que son ami et équipier, Harry, le met en garde contre des accidents schizophréniques, Marek (Will Yun Lee, connu désormais pour son rôle de Sang Min dans « Hawaï Five-0 »), un nouveau venu que Quaid forme sur la chaine de montage, lui conseille de demander son ami McLane (John Cho, méconnaissable depuis son rôle d’amateur de MBAB dans « AMERICAN PIE ») chez Rekall pour obtenir ce qu’il désire le plus.
Et ce qu’il désire le plus pourrait d’être un agent secret travaillant pour les deux camps sur Mars… si ce souvenir factice lui avait été bien implanté, avant que débarque la police de Cohaagen et que ça finisse dans un bain de sang !!
Et je ne vous demanderai pas comme je ne me demanderai pas si tout cela est bien réel ou est tout simplement imaginaire, comme le propose l’affiche actuellement placardée sur tous les culs de bus et murs de vos villes, puisqu’en dehors d’une aiguille plantée dans le coude de Quaid pour l’anesthésier, je ne me souviens pas avoir vu, à aucun moment que ce soit, McLane (lol !) planter l’aiguille du souvenir avant de dégainer son arme et menacer leur client quand débarquent ces dix hommes armés énoncés juste au-dessus.
Vous pourrez avoir aperçu la suite dans la bande-annonce et comprendre que les souvenirs enfouis d’agent surentrainé et tueur de Hauser ont ressurgi en Quaid et vont lui permettre de s’enfuir avant de se retrouver poursuivi par les agents spéciaux de Cohaagen, jusqu’à ce que réapparaisse dans sa vie Melina (Jessica Biel, qui a remporté le rôle face à Eva Green et Diane Kruger, et garde ses cheveux bruns à la demande du réalisateur et en opposition au scénario initial pour accentuer la ressemblance avec Lori et accroître le sentiment de piège autour de Quaid), la femme dont il rêve chaque nuit et qui s’avère être une rebelle !
Course-poursuites de voitures volantes ou plutôt magnétiques qui heureusement n’atteignent pas la longueur laçante de « MATRIX RELOADED », gunfights épileptiques que ne renierait pas Quentin Tarantino (le montage de Christian Wagner, monteur pourtant de « TRUE ROMANCE » et « DOMINO » mais aussi de « BAD BOYS », « FAST & FURIOUS » et « BATTLE : LOS ANGELES », associé aux FX me fait encore me demander qui a descendu McLane et Hammond ?!), chorégraphies incluant un parkours à la « QUANTUM OF SOLACE » gérées par le cascadeur Casey Adams, venu de la TV (« Prison Break », production Original Film, « NCIS : Los Angeles », « True Blood », « Californication » ou « Sons of Anarchy »), sont les moments d’actions qui pourraient vous tenir éveiller et d’essayer peut-être de chercher à comprendre jusqu’où va fuir Doug Quaid…
Car oui, au-delà d’une stylisation très manichéenne de l’univers du film à travers les décors et la lumière du directeur de la photographie Paul Cameron (l’UFB, représentée par une Londres futuriste, étant toujours gorgée de soleil et dans laquelle celui s’immisce à travers de gigantesques structures de verres, en opposition à une Colonie portuaire et plongée dans une semi-obscurité éclairée aux néons qui relient de vieux immeubles brinquebalants superposés les uns sur les autres, sous une pluie qui semble éternelle et accentue la référence à la cité sombre et polluée du « BLADE RUNNER » de Ridley Scott) et quelques bonnes idées et effets visuels (le téléphone implanté à même la paume des utilisateurs ou ces tatouages lumineux), et malgré des facilités scénaristiques qui permettent de démêler trop facilement des erreurs et vides (qu’on m’explique la présence réelle et les motivations de Hammond dans cette version), ce «TOTAL RECALL » restera un bon petit film d’action, stylisé et sympathique… jusqu’à la dernière partie, où Bryan Cranston, qui avait réussi à se faire connaître en incarnant un père modèle Américain du même acabit que Homer Simpson au sein de la famille middle-middle-crasse de « Malcom (in the Middle) » avant de confirmer son talent en prof de chimie en phase terminale qui va devenir trafiquant de drogues dans « Breaking Bad », grille ses espoirs cinématographiques dans ce rôle de bad guy –à l’instar de Michael C. Hall de « Dexter » dans « ULTIMATE GAME ».
Mais, pourtant, je dois reconnaître et admettre que, si vous n’êtes pas trop difficile ou avez envie de vous détendre, la dernière « bouse » (selon certains) de Len Wiseman est, en elle-même, un bon divertissement qui peut vous en mettre plein la gueule à défaut de vous faire mal aux couilles.
Et si vous passez sur le grand nimportenawak de la traversée finale de la Chute que ne renierait pas Brian de Palma avec Quaid et Melinda qui remontent par l’extérieur cet ascenseur lancé à près de 375 kilomètres/minutes (selon un calcul personnel et basé sur l’annonce de la traversée de dix-sept minutes d’un hémisphère à un autre : ce qui donne tout de même 22 485 km/h, si le bac A3 que j’ai passé ne se trompe pas !!) et sans aucun effet de souffle à leur sortie du bâtiment.

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 « TOTAL RECALL », L’ADAPTATION
Et si je voulais être plus fidèle à la nouvelle originale de Philip K. Dick, j’aurais dû intituler ce chapitre « Souvenirs à Vendre, l’adaptation », mais en dehors de puristes gardiens du temple, je pense que vous ne m’en tiendrez pas rigueur.
Basés tous deux sur « We Can Remember It for You Wholesale », nouvelle de SF de l'écrivain paranoïaque et toxicomane Américain Philip Kindred Dick, publiée en avril 1966 (et qui a été depuis éditée sous trois titres différents en France et dont je vous présente l'horrible couverture de l'édition la plus récente et réactive ), quel film en est le plus proche ? Celui du Mad Dutch ou cette nouvelle version estivale ?
Comme vous avez pu le lire, Len Wiseman a accepté et adoré le script de sa version, car l’action ne devait pas se dérouler sur Mars, contrairement au film de 1990.
Oui, j’ai écrit que le Doug Quaid qu’incarne Colin Farrell rêve d’aller sur Mars et accepte qu’on lui implante le souvenir virtuel d’une mission double sur la planète rouge, mais comme leur version de papier, il va vivre toute son aventure sur notre bon vieux plancher des vaches, voire un peu en-dessous.
Et ce sera tout ce qui relie le plus cette nouvelle version à la nouvelle initiale, contrairement au film de Paul Verhoeven qui en extrayait et conservait la durée de quinze jours, quinze jours, quinze jours… heu, quinze jours du séjour, une supposition d’existence extraterrestre sur Mars mais aussi et surtout le coup des crédits remboursés à Quaid/Schwarzie avant de le renvoyer comateux dans un taxi après la découverte chez Rekall que sa mémoire était toute salopée puisque déjà effacée.
On ne peut, hélas, pas dire que le film de 2012 soit encore plus fidèle que la version explosive de 1990.


« TOTAL RECALL », LE REMAKE
Et puisque j’ai débordé dans le chapitre précédent en commençant déjà comparer ce film de 2012 avec la précédente version de 1990, en plus d’une comparaison avec l’œuvre littéraire qui est à l’origine des deux productions, autant maintenant aborder distinctement les points communs et différences entre les deux.
Si le film de Wiseman annonce clairement dans son générique avoir été scénarisé par Wimmer, Bomback et Vanderbilt d’après le scénario précédent de Ronadl Shusset, Dan O'Bannon et Gary Goldman, il vous faudra, donc, comme mentionné juste au-dessus, oublier la planète rouge Mars et cette consigne de casser dessus. Si vous le désirez vraiment, découvrez ou redonnez donc une seconde chance au très sympathique blockbuster loupé par tant de monde « JOHN CARTER » d’Andrew Stanton.
Oui, le Douglas Quaid incarné par Colin Farrell n’entre pas clandestinement sur Mars pour y combattre Vilos Cohaagen et sauver la planète rouge en libérant les artefacts aliens qui sommeillent dans ses entrailles et peuvent y créer l’oxygène nécessaires aux mutants de la colonie.
Non, Colin Farrell rêve juste d’aller sur Mars et l’évoque au début du film et ce sera tout, en dehors d’une publicité de Rekall évoquant un voyage sur la planète, dans cette version terrestre de 2012.
Oubliez, alors, également ces mutants évoqués à l’instant du film du Mad Dutch, puisqu’à défaut de se passer sur une colonie extraterrestre, les premiers colons sous ces dômes n’ont pas vu leur enfants naître difformes et atteints de ces mutations qui caractériseront Kuato, Benny, Tony, le rebelle, la petite fille télépathe ou cette hôtesse aux trois seins de 1990. Même si clin d’œil oblige –ou presque (puisqu’en dehors d’une ire des fans du premier, je ne crois pas que quoi ce soit ait obligé Wiseman et Tatopoulos à inclure ce plan)- Colin Farrell croise une prostituée à trois seins, qui lui dit également qu’une troisième main lui serait bien utile (alors que vingt-deux ans plus tôt elle s’adressait à Benny, le guide martien de Doug Quaid), lorsqu’il descend dans les bas-quartiers de la Colonie.
Oubliez donc, aussi, Benny et ses cinq gosses à nourrir contre quelques bakchichs en échange d’un guide dans le quartier chaud de Venusville sur Mars. Tout cela ou presque, Quaid/Farrell le trouve autour de lui, sur Terre, dans un recoin de cette Colonie où il survit et où il décide de se rendre pour trouver les locaux de Rekall, traversant les quartiers cosmopolites de son univers où tapine cette prostituée à trois seins et d’autres à coté de tatoueurs qui greffent des dessins tribaux lumineux sous ou sur la peau de leurs clients. Une vision futuriste des quartiers populaires, qui, au-delà de la référence quasi-évidente et voulue par le réalisateur à « BLADE RUNNER » (Wiseman ayant demandé explicitement que la Colonie soit plongée sous une pluie obscurcissante pour se rapprocher de cette référence visuelle), me fait également penser aux quartiers low-tek de l’univers de William Gibson, pape du cyberpunk, et sa nouvelle « Johnny Mnemonic » retranscrite au cinéma par Robert Longo dans le méconnu « JOHNNY MNEMONIC » de 1995.
Oubliez George et le mutant télépathe Kuato qu’il cache sous sa chemise (et non une jolie tumeur comme a aimé le placer dans son marché Troll de « HELLBOY II » Guillermo del Toro) pour ne garder que Quatto, un vieux chef rebelle qu’incarne Bill Nighy, qui n’apporte guère plus de réponses à la question de savoir qui est Quaid/Farrell.
Oubliez ces méchants coups de pieds dans les couilles que prend à la volée et à répétition Quaid/Schwarzie
Oubliez Rachel Ticotin, même si Jessica Biel reprend bien le rôle de la brune Melina, mais oubliez surtout cette « brune, sportive, avec une grosse poitrine, réservée et cochonne à la fois » qui faisait que Quaid/Schwarzie n’allait pas s’ennuyer lors de son voyage –comparé au public d’aujourd’hui ?
Oubliez le divorce expéditif de 1990, même si on peut y croire encore en 2012 après cet échange de coups de feu dans le couloir : Len Wiseman, réalisateur amoureux transi de son actrice d’épouse (Lori/Beckinsale), n’allait tout de même pas tuer comme ça –même d’une balle dans la tête super graphique et associée à cette putain de punchline- son personnage, non ?
Oubliez, donc, aussi et au passage, la sale gueule de Michael Ironside, qui en 1990 interprétait Richter, le véritable mec de Lori/Sharon Stone et cherchait à rattraper et buter à tout prix cet enfoiré de Quaid/Schwarzie…puisque MEGA GROS SPOILER Len Wiseman a du faire en sorte de remanier le scénario, quoi qu’on en dise, pour mêler en un seul rôle (celui de Kate Beckinsale) les personnages de Lori, l’espionne chargée de surveiller Quaid, et Richter, l’agent de Cohaagen qui doit le ramener vivant, histoire de donner plus de teneur et de participation au film à sa femme –et prouver qu’après trois films comme Selene, la vampire (ne faisant qu’une apparition stock shot dans le 3), elle est capable d’en tenir aux hommes dans les scènes d’action, les échanges de coups dans la gueule et les gunfights. A noter, tout de même, un petit clin d’œil ou plutôt un arrache de bras en prenant un ascenseur en vol à la fin de Richter/Ironside chez Wiseman.
Mais ne désespérez pas d’apercevoir une ronde rouquine passer les douanes de l’UFB, en 2012, pour annoncer sa venue pour « deux semaines » (dont une mauvaise traduction en version française gâche une complète référence textuel au premier film).
Même si vous pourrez regretter de ne pas avoir vu avant d’extraction nasale (ni anale et je ne saurai dire si dans la parodie X de « TOTAL RECTAL », ça se passait ainsi) d’un implant cérébral… qui ne laissait aucune lésion au pif du géant Autrichien mais nous offrait tout de même l’un des pires effets spéciaux du film de 1990. Oubliez, de fait, le même colosse qui traverse les rues une serviette humide enroulée autour de la tête.
Comme vous oublierez la bien utile montre holographique qui fait que vous vous demandiez si c’était bien Quaid/Schwarzie avant qu’il ne sulfate la gueule des soldats dans les sous-sols martiens, puisque je crois pouvoir dire que la prod’ a été avare en gadgets dans cette nouvelle version, alors que Quaid/Farrell trouve juste avant bien plus de trucs qu’en 1990 dans le coffre d’une banque -et non plus d’un hôtel Hilton- dont des billets de 50 à l’effigie d’un Président Noir-Américain actuellement en poste…
Et comme écrit plus haut, oubliez les robotaxis vindicatifs du premier, au profit il est vrai d’une course-poursuite peut-être un plus pêchu qu’un véhicule qui est prêt à se faire encaisser sa course jusqu’au pétage de plombs.
Oubliez également le score formidable de Jerry Goldsmith au détriment d’une béo bien trop répétitive dans l’accompagnement de certaines scènes pourtant signée Harry Gregson-Williams, compositeur attitré de la série « SHREK » mais également des films de Tony Scott depuis « USS ALABAMA » sur lesquels il débuta auprès du grand Hans Zimmer.
Comme vous oublierez l’idée de comprendre si Quaid/Farrell rêve tout cela ou le vit, alors que les mésaventures de Quaid/Schwarzie traduisait le thème cher à l’auteur, K. Dick : perte de repère, ne plus distinguer la réalité de la fiction –et dans le cas de cette nouvelle et de ce film de savoir quels sont les souvenirs réels et les rêves factices, les souvenirs implantés, et se perdre soi-même avant de peut-être sombrer dans une lente mais douce folie intérieure irréversible, cet accident schyzophrénique dont le menace Harry et qu’avoue avoir filmé le Hollandais en commentaire du dividi (le fondu en blanc qui se repete, etc). Non, vous ne vous demanderez pas si Quaid/Farrell a peur à un moment que tout cela ne soit qu’un rêve (même si un plan dans la scène finale peut un moment le laisser croire) contrairement à Quaid/Schwarzie avant d’emballer Melina sur cette montagne martienne bercée par ce tout nouveau vent sous ce ciel bleu.
Oui, si vous voulez jouer au jeu des sept erreurs cinématographiques, n’allez pas voir « TOTAL RECALL – MEMOIRES PROGRAMMEES », sous peine de craquer en le comparant sans cesse au « TOTAL RECALL » de Paulo. Vous risqueriez en plus de vous gâcher le plaisir –ou non- de le découvrir et peut-être en profiter. Ou allez le voir une première fois, en faisant le vide dans votre tête et vos souvenirs cinéphages –et ce sans aide d’implants mémoriels artificiels- et retournez-y une seconde fois pour cette fois-là comparer vos souvenirs et cette version (ce que j’avoue ne pas avoir fait tout de même, pensant connaître par cœur le film de Verhoeven que j’avais découvert en salles il y a vingt-deux ans et revu en VHS avant de le décortiquer et de l’analyser un nombre incalculables de fois en dividi).

Mais il faudra que je conclue cet article en rappelant que malgré tous les griefs que peuvent avoir certains (critiques et publics, qu’ils soient cinéphiles ou non) à l’encontre du cinéma de divertissement et peut-être un brin trop commercial à leur(s) gout(s) de Len Wiseman, il lui aura fallu énormément de talent (ou de couilles) pour pouvoir conclure son film, onze ans après ces attentats du World Trade Center qui ont traumatisé le monde mais surtout définitivement déformé la vision du monde et des choses des « sauveurs » Américains, sur un sous-texte politique qui fait d’un traitre et de terroristes le héros et les libérateurs d’un peuple, d’une (future) nation (la Colonie qui trouve dans ce final son indépendance).
L’explosion et effondrement de cette Chute (ce système d’ascenseur aux allures de gigantesque tour en plein cœur de la ville et qui relie les deux cotés de la planète pour ceux qui seraient venus lire directement ma conclusion ou ont oublié le premier chapitre ou toujours pas vu le film) pouvant renvoyer certains spectateurs voire proches de victimes du 11 Septembre ou témoins directs ou plus sensibles à ce genre d’image à celles diffusées en boucle des heures durant et des jours entiers de la chute des tours jumelles new-yorkaises. A la différence qu’en dehors de Bryan Cranston (Cohaagen) et quelques soldats de sa garde rapprochée et de Lori (Kate Beckinsale), les vilains de l’histoire, ce ne sont que des robots, des êtres synthétiques qui vont mourir dans cet effondrement fictif.
Et ce message politique –faisant de terroristes des héros libérateurs, je me répète- pouvant aussi et heureusement rappeler l’Indépendance américaine, un peu plus que la vision de Roland Emmerich de 1996, surtout lorsqu’on se souvient que les soldats et politiques Américains qui ont combattu également l’envahisseur Anglais pour gagner leur liberté et celle de leur pays (composé alors de treize colonies, futurs Etats) étaient considérés par les politiques et aristocrates de la Couronne comme des terroristes.


Page IMDB (en français) du film de Len Wiseman


Maintenant si vous n’avez pas pris peur par cette conclusion, je vous invite tout d’abord à aller voir le film de Len Wiseman (même si je crains de peut-être vous avoir gâché quelques éléments de surprise, s’il y en avait vraiment) et à peut-être revenir me lire une prochaine fois… sauf si tout cela se passe dans votre tête et que vous êtes encore assis sur le fauteuil de Rekall.


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