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Umar TIMOL : " L'HOMME QUI NE POUVAIT S'EMPÊCHER DE RIRE " (suite).

Par Ananda

 

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Finalement après de nombreuses cogitations je me suis décidé à me rendre chez un psychologue, un psychanalyste pour être plus précis. Il est utile de savoir que je ne comprends rien à l’univers de la psychologie, encore moins à la psychanalyse, il paraît que c’est une tentative d’explorer la psyché humaine. Etant donné que la mienne se trouve dans un état de délabrement avancé je me suis dis pourquoi pas. J’ai cherché dans l’annuaire ( ce mot sonne terriblement désuet à l’ère du net !) et je suis tombé sur la charmante secrétaire d’un psychanalyste Monsieur R, diplômé d’une célèbre université américaine. Elle m’a accordé un rendez-vous pour le lendemain.

Je me suis retrouvé donc, vingt-quatre heures plus tard, dans le cabinet de cet honorable explorateur de l’âme humaine. Je n’arrive pas à trouver le mot approprié pour décrire ce lieu : amorphe me semble excessif, on dira plutôt ennuyeux. Les rideaux, les carreaux de céramique et les meubles datent vraisemblablement du vingtième siècle, je n’ose pas dire du début du vingtième siècle. Il est vrai aussi que les patients qui attendaient dans la salle d’attente s’accordaient parfaitement au lieu, ils avaient ce même air lugubre et désespéré. Au bout d’une heure le psychanalyste Monsieur R m’accueillit de façon fort chaleureuse. C’était un gros bonhomme, élégamment vêtu, qui respirait le sérieux et l’intelligence.

Je n’ai pas le temps de résumer notre conversation (il s’agit là plutôt d’un monologue suivi d’un autre monologue ), qui dura plus de deux heures mais on retiendra que je n’ai rien compris à ce qu’il m’a dit. Je suis loin d’être bête, il m’arrive d’être brillant, il m’arrive même parfois de comprendre les élucubrations de mon directeur mais cet homme-là, lui, était incompréhensible. Dans un premier temps il m’a demandé de parler de ma relation avec ma mère chérie et de ma maladie. Je me suis exécuté, j’ai parlé de maman chérie et j’ai décortiqué les mécanismes de mon fou rire mais le bonhomme s’est contenté de m’écouter pendant toute la durée de mon exposé. Ensuite, en se gratouillant la barbichette, il m’a livré sa théorie au sujet de ma maladie. Il m’a expliqué, je le cite et je n’invente rien : il nous faut explorer votre petite enfance, le phénomène communément appelé la rétention anale afin de disséquer votre mal être et encore d’autres charabias que la pudeur m’interdit de nommer. Donc, si j’ai bien compris, cette partie précise de mon anatomie, et les activités qui y sont associées, sont la raison d’être de ma maladie actuelle. Je crois avoir signalé que je ne suis pas un homme violent ; je suis doux comme un mouton et s’il m’arrive de tuer quelquefois des cancrelats, c’est pour la bonne cause, celle de l’hygiène, mais il n’empêche : j’ai failli casser sa gueule à cette grosse créature, ou plus exactement j’ai failli enfoncer mon poing dans cette partie de son être qui se situe sous son estomac et y fait office de ventre ! La grossièreté dont cet individu peu banal avait fait preuve a cependant, fort heureusement, suscité en moi l’amorce d’une crise de fou rire et c’est cela, plus que toute autre chose, qui m’a permis de m’extirper en vitesse de son cabinet sans me livrer à des actes de violence.

Voilà pour ce qui est de la psychanalyse. La prochaine étape sera celle du longaniste, dont on m’a dit le plus grand bien.

Umar Timol

(à suivre)


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