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L’indifférence étouffe l’indifférence. Oui, je vais acheter ce livre de GRAMSCI

Publié le 21 septembre 2012 par Donquichotte

Editorial (in extenso) du journal Le Monde, ce 21 septembre 2012...

** Alep, un front sans espoir

LE MONDE DES LIVRES | 14.09.2012 à 11h31 • Mis à jour le 14.09.2012 à 13h37

Par Jean Birnbaum

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Un tireur embusqué de l'ALS surveille les mouvements de l'armée syrienne, à Alep, le 1er septembre.

Jour après jour, c'est fou l'indifférence qui écrase l'indifférence qui bâillonne l'indifférence qui étouffe le carnage d'Alep. Certes, les massacres font régulièrement la "une" des journaux. Certes encore, la cascade des communiqués officiels vient rappeler la réprobation des gouvernements. Certes enfin, chacun d'entre nous est horrifié par l'atrocité des crimes commis. Mais, si le cauchemar syrien suscite l'effroi et la pitié, il ne déclenche ni manifestations citoyennes ni mobilisations militantes d'envergure. Pourquoi ?

Une réponse se trouve dans les écrits du philosophe italien Antonio Gramsci (1891-1937), dont les éditions Rivages publient un beau recueil de textes, en poche, sous le titre Pourquoi je hais l'indifférence (traduit et préfacé par Martin Rueff, "Petite bibliothèque", 208 p., 8,65 €). Pour l'écrivain marxiste, "l'indifférence est le poids mort de l'histoire", et l'élan de solidarité envers les opprimés constitue une expérience indissociable de toute vie vraiment humaine. Or, à ses yeux, un tel élan se fonde d'abord sur un mouvement d'identification à ceux qui luttent contre l'injustice. "Dans la vie politique, l'activité de l'imagination doit être illuminée par une force morale : la sympathie humaine", précise-t-il ailleurs.

C'est cette projection morale et charnelle, cette "imagination dramatique" qui conduisent à faire siens des combats menés à l'autre bout du monde, hier dans l'Espagne franquiste, il n'y a pas si longtemps dans l'Algérie coloniale ou en Amérique latine. A chaque fois, il semblait possible de soutenir un camp contre un autre, quitte à prendre le risque de quelques rudes désillusions... Mais aujourd'hui, mais en Syrie ? A qui s'identifier, sinon aux seuls civils, enfants, femmes et hommes désarmés, pris au piège d'une guerre dont l'espérance d'émancipation semble de plus en plus absente ? Quand l'idéal s'éclipse, l'indignation étouffe, l'indifférence menace. Quand l'espoir manque à l'appel, seuls demeurent l'impuissance et l'épouvante.

Jean Birnbaum

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