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Headshot, un film noir de Pen-ek RATANARUANG

Par 3moopydelfy @3Moopydelfy

affiche Headshot © Wild Side Films : Le Pacte

affiche Headshot © Wild Side Films : Le Pacte

Avertissement : des scènes, des propos ou des images peuvent heurter la sensibilité des spectateurs 

Dans la Thaïlande d’aujourd’hui, la corruption fait rage. Tul, un flic intègre, subit le chantage d’un politicien influent et se retrouve accusé d’un crime qu’il n’a pas commis. Désabusé, mû par un puissant désir de vengeance, il est rapidement recruté comme tueur à gages par un groupe mystérieux dont le but est d’éliminer ceux qui se croient au-dessus des lois. Mais lors d’une mission, Tul reçoit une balle dans la tête. À son réveil, après trois mois de coma, il découvre qu’il voit le monde à l’envers, littéralement. Ignorant si son état est purement médical ou la conséquence d’un mauvais karma, Tul commence à se poser des questions sur sa profession. Mais lorsqu’il essaye de démissionner, les rôles s’inversent, et le chasseur devient la proie. C’est alors qu’il rencontre une fille qui va achever de chambouler sa vie !
Tul parviendra-t-il à se racheter de cette violence qui continue à le hanter ?

Headshot a eu de multiples nominations: Festival international du Film Policier de Beaune 2012 (édition n°4)Festival du Film Asiatique de Deauville 2012 (édition n°14)Festival international du film de Tokyo 2011 (édition n°24), et Festival International du Film de Toronto 2011 (édition n°36). Il sort le 31 octobre sur les écrans français.

[N'ayant pu me rendre à l'AVP de ce film, c'est David qui nous offre, le plaisir de partager son avis. N'hésitez à nous dire ce que vous en pensez en commentaires dès que vous avez vu le film !]

Pour certains l’Asie et son cinéma ne sont peut-être qu’une vaste étendue dont les contours restent vagues et les différents moteurs interchangeables. A une époque je voyais sans l’ombre d’un doute les choses ainsi moi aussi, dans le flou et l’appréhension. Or s’il y a un cinéma asiatique, il y a surtout des cinémas asiatiques. D’un œil extérieur, les clichés abondent sûrement pour définir les caractéristiques de chaque pays. L’Inde et ses comédies musicales. La Corée et ses films noirs qui finissent invariablement mal. Et le cinéma thaïlandais, quelle place a-t-il dans l’imaginaire populaire du spectateur ?

Depuis qu’il a glané son étrange Palme d’Or « Oncle Boonmee, celui qui se souvient de ses vies antérieures », Apichatpong Weerasethakul est peut-être le cinéaste à qui l’on pense tout de suite lorsque l’on discute de cinéma thaïlandais. C’est plus que probable. Pourtant l’un des premiers cinéastes qui m’a fait me frotter au cinéma thaïlandais, c’est Pen-ek Ratanaruang. (toi dans le fond, qui a demandé « Very Bad Trip 2,  ça compte comme un film thaïlandais ? », tu sors), et je ne doute pas que c’est le cas pour quelques autres amateurs des salles obscures de ma génération.

C’était dans la première moitié des années 2000, et Pen-ek Ratanaruang (j’adore les noms thaïlandais, pas vous ?) avait une vision continentale du cinéma, faisant tourner devant sa caméra des acteurs japonais (Tadanobu Asano), chinois (Eric Tsang), ou coréens (enfin, coréenne, avec la Kang Hye-Jung de Oldboy). Aujourd’hui le cinéaste a retrouvé son pays et ses acteurs locaux avec son nouveau film Headshot. Me trouver dans cette salle projetant le film, avec une petite poignée d’autres spectateurs, m’a rappelé mes premières impressions du cinéma de Pen-ek Ratanaruang.Je me suis souvenu de ces sensations

[Avis] HEADSHOT, un film noir de Pen-ek RATANARUANG

Headshot film noir?

caractéristiques en découvrant Headshot. Ce sentiment de douceur et de quiétude qui cache une sourde angoisse.

Le film suit le parcours de Tul sur deux époques. Aujourd’hui tueur à gages, il est plongé dans le coma pendant trois mois après avoir reçu une balle dans la tête, et à son réveil, sa vision est perturbée. Il voit les choses à l’envers, comme s’il avait la tête retournée. On suit également Tul quelques années plus tôt, lorsqu’il était encore flic, où l’on découvre ce qui l’amènera, sept ans plus tard, à devenir ce tueur à gages. Avec un synopsis à priori nerveux, et des plans subjectifs où l’on découvre le monde à travers le regard retourné de Tul, on aurait pu croire que la mise en scène de Ratanaruang se serait faite moins calme. Ce n’est pourtant pas le cas.

Si les sensations de ses précédents films sont revenus m’effleurer, c’est parce que l’œil du réalisateur thaïlandais est resté doux et puissant. La vision retournée pourrait n’être qu’un gimmick chez un autre, une excuse pour la jouer stylisé, mais Ratanaruang en fait un tremplin pour poser un regard réfléchi sur son personnage principal, et à travers lui sur les hommes au sens large. Imaginer ce qu’un tel bouleversement engendrerait sur un être, mais également ses implications existentielles, et ses conséquences humaines. Percevoir ce qui nous entoure en sens inverse et trouver par là un nouveau sens aux choses.

Le cœur du film reste la fuite en avant, dans l’inconnu, d’un homme qui avance pour laisser son passé de côté. Mais Pen-ek Ratanaruang prête à son récit un surcroît de densité en faisant s’entrecroiser les époques, qui se chevauchent pour mieux dévoiler le protagoniste par petites touches. Il lui prête une réalisation toujours sobre, glissante, évidente, qui appuie cette atmosphère de moiteur qui est indissociable du cinéma de Ratanaruang, quoi que l’on puisse pointer cela dans de nombreux films thaïlandais. Mais le cinéaste manie si bien cette savante mixture de danger, de quiétude et de sensualité que l’on peut bien oublier quelques instants qu’il n’est pas le seul expert en la matière…


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