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De quelle modernité parlez-vous? (3)

Publié le 09 octobre 2012 par Les Lettres Françaises

De quelle modernité parlez-vous? (3)

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Revue culturelle et littérraire les lettres françaises

Aveugles, de Sophie Calle

L’idée que les femmes ont été maltraitées par l’histoire de l’art est une légende. Et elle a la peau dure puisque le Centre Pompidou a présenté en 2009 « Elles », une exposition aberrante. Il faut se souvenir que Mme Vigée-Lebrun a été le peintre le plus cher de la fin du XVIIIe siècle en Europe ! Et aujourd’hui les femmes ont fait main basse sur l’art, d’Angelica Kaufmann à Suzanne Valadon, de Vanessa Bell à Natalia Goncharova, d’O’Keefe à Frida Kahlo, d’Annette Messagier à Louise Bourgeois, de Leonora Carrington à Aurélie Nemours, de Leonor Fini à Marina Abramovic (il faut se souvenir de la belle exposition « Femmes peintres et salons au temps de Proust », au musée Marmottan en 2010). L’exposition de Sylvie Buisson a une autre intention : celle de mettre en scène les femmes dans l’art, surtout de l’impressionnisme aux avant-gardes du début du XXe siècle. Elle a désiré nous montrer la femme comme artiste (surtout à travers des portraits et des autoportraits) de Berthe Morisot à Marie Petiet, de Jeanne Hébuterne à Niki de Saint Phalle, mais aussi comme modèle. Les ateliers, vers la moitié du XIXe siècle, se peuplent de femmes qui posent souvent nues. Cela replace la femme dans un contexte plus large et plus plaisant de la peinture. Mais le choix d’artistes qu’elle a pu faire montre en tout cas que les femmes n’ont pas été aux marges de la création artistique, et pas seulement comme muses. Femme artiste, célèbre s’il en est, Sophie Calle, à Arles, a montré son travail sur les aveugles, qui est dérangeant. Elle interroge ces malheureux privés de la vue sur l’idée qu’ils se font de la couleur. C’est absurde ! Et même aux limites de l’indécence. C’est un projet qu’elle a commencé en 1986. N’aurait-elle pas lu la Lettre sur les aveugles de Denis Diderot (1749) ? Si elle l’avait fait, peut-être aurait-elle pu construire une oeuvre décente. Quant à faire des pages en braille dans son livre catalogue c’est peut-être amusant pour les inconditionnels de l’art contemporain mais reste un geste d’une esthétique tout à fait déplacée…

Gérard-Georges Lemaire

Femmes artistes, Éditions Alternatives « Art en scène », s.p., 32 euros.
Aveugles, de Sophie Calle, Rencontres d’Arles. Livre/catalogue : Actes Sud, 110 pages, 79 euros.


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