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C'est moderne qu'on vous dit !

Publié le 29 mars 2008 par Dagrouik

Voici une nouvelle contribution du tovarich Vogelsong, j'ai un peu de scrupules à publier son texte. Ce serait plus efficace dans Libération par exemple à la place d'une n-ième tribune étron d'un succube comme Duhamel. Mes seuls contributions sont le choix des photos truquées ou non, des dessins ou de la mise en page. Mes notes sont sous la forme NDLR.

C'est moderne...

Parmi la multitude de formules creuses qui figurent dans l'outillage idéologique des séides de l'UMP, il en est une emblématique et récurrente : "La modernisation". Elle est employée à tort et à travers. C'est le terme fourre tout. Un leitmotiv matraqué par les "fast-thinkers" de l'UMP, probablement pondu lors de séminaires sur la communication publique.

Historiquement, les "mouvements" progressistes se sont cristallisés en réaction à l'ordre "libéral" imposé après la révolution industrielle. Ils sont post-capitalistes, donc moins anciens. Aujourd'hui ils sont affublés du sobriquet d'"archaïques". C'est anachronique. Et pourtant, les hystériques du marché rêvent secrètement d'un grand retour vers le XVIIIème siècle, que l'on nomme sans complexe, "modernité". Ce tour de passe-passe s'effectue grâce aux vecteurs brutaux que sont les médias dominants et par le biais d'un discours apprêté, passé à la centrifugeuse du marketing et des gourous de la communication.

Le taciturne François Fillon veut "tout" modernise

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r. Il le dit. Le dit encore. Le dit à chaque fois. Il n'est pas une interview, pas un article, une citation, un propos sans que ce terme ne soit lourdement assené. Dans la bouche de ce politicien issu de l'aile sociale du RPR (sic !) cela veut dire libéraliser l'économie (et donc le social). Pour le Premier ministre et ses cohortes, rogner les droits sociaux, paupériser les citoyens, c'est moderniser.

Politiquement, pour François Fillon et ses sbires (comme le court Yves Jégo), la gauche est frappée d'archaïsme. Ce qui gêne le macabre Premier ministre, c'est qu'il reste encore un peu de gauche au sein de la gauche française. Louant sans retenue Anthony Blair, José Luis Zapatero, Romano Prodi et le "fameux" Bad Godesberg du SPD, ce triste sire fantasme une opposition positionnée idéologiquement à droite. Moderne quoi !

Le 15 janvier 2008, les "partenaires" sociaux sous la férule du ventripotent Xavier Bertrand signent un accord qui permettra la rupture du contrat de travail à l'"amiable". Cette disposition mettra une pression supplémentaire sur le salarié si son employeur souhaite le liquider. Dans la novlangue libérale, on appelle ça "modernisation". Ou fluidité ; ça dépend. (NDLR: ça fait 20 ans qu'on nous demande d'être flexible)

Sur le plan légal, des dispositions dites "archaïques" sont le prétexte à l'équarrissage du code du travail qui entrera en vigueur en mai 2008. Les trois commis à cette besogne se sont tout simplement affranchis d'un siècle de négociations, de luttes et de sacrifices. Officiellement, ils avaient pour objectif de "rénover" et rendre plus lisible le "codex". Finalement, 10% de caractères en moins mais le doublement du nombre d'articles, et selon des spécialistes du droit du travail, une multitude de chausse-trappes pour les salariés. Ici le pseudo modernisme se marrie avec l'amnésie voire le reniement.

Sur le plan sanitaire, la modernisation implique d'une part l'instauration d'une franchise médicale qui relègue la gestion de la santé publique à celle du management des risques en assurance. D'autre part le désengagement progressif de l'état au bénéfice des fonds de pensions. C'est pour demain. Et c'est l'étape finale de la libéralisation du secteur de la santé. Sans aucun doute, une grande avancée pour les citoyens les plus pauvres...

Pour l'éducation, les mois de cogitation au sein du gouvernement Fillon ont accouché d'un nouveau programme pour l'école primaire. Il est édifiant. La modernité pour Xavier Darcos et des didacticiens UMPiste, c'est l'enseignement de la politesse (les parents apprécieront), le "retour" de l'éducation physique. Ebouriffant. L'occupant de l'Elysée rajoute une couche en proposant d'apprendre l'hymne national et de se lever pour montrer son "respect". Nos bambins qui n'ont pas (eu) la chance de fréquenter les mornes casernes sauront finalement ce qu'est un matin glacial au son des tambours. Un relent glauque du patriotisme à papa.

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Spirituellement, le chanoine à talonnettes prône un retour du religieux, et déclare, toute imbécillité aux vents : "le drame du XXème siècle" n'est "pas né d'un excès de l'idée de Dieu, mais de sa redoutable absence". Abyssal et séculaire.

Dans le domaine pénal, il y a d'abord la mise en place des peines de rétention illimitée, passées à la "hussarde" et validées partiellement par les "sages". Ces dispositions nous ramènent à l'aube des pratiques d'incarcération. On met les gêneurs à la poubelle ad vitam et on nie leurs capacités à s'amender, se réinsérer. Enfin, notre "démocratie" accepte dans les CRA en France, au mois de février de l'an 2008 après Jésus Christ, qu'un marmot de seize mois et sa mère soient internés dix-sept jours. Au pays des droits de l'homme.Une infamie.

Lors de son discours d'investiture devant la représentation nationale, le chef du gouvernement dit : "...une France qui, au-delà des partis, a voulu affirmer sa volonté de changement et sa modernité".

Pour les "novlinguistes" libéraux, l'important c'est l'impact. En dire le moins, en tirer dialectiquement le maximum. Il est frappant de constater que derrière un terme se cache non pas une idée connexe et biaisée (soit un simple mensonge), mais l'inverse du terme employé, comme un négatif. En somme, dire ce qui n'est pas pour meubler l'espace sémantique et donner l'impression de réalité. (NDLR: même la Miss Tatcher se présentait comme moderne pour faire avaler son TINA)

Il n'y a rien de moderne dans les propositions et les actions de nicolas sarkosy et François Fillon.


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