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"César doit mourir", épopée en prison

Par Sijetaisdeboutsurmatete

Ours d'or au dernier Festival de Berlin, "César doit mourir" est le film d'une mise en scène de théâtre au sein d'un quartier de haute sécurité d'une prison romaine. Nous suivons le quotidien des prisonniers du casting à la représentation.
En adaptant "Jules César" de Shakespeare avec un casting de prisonniers, et en filmant ce travail en cours, les frères Taviani relèvent un double défi : celui que représente l’entrée du théâtre en prison et la catharsis que tout le monde attend, et celui de filmer du théâtre, joué par des amateurs. Double défi réussi, avec talent, poésie et beauté.
Le film est réalisé comme une fiction, à partir d’un scénario, d’histoires rapportées par les prisonniers et de dialogues appris. Au point que l’on se demande si c’est vraiment un documentaire. Les prisonniers sont des acteurs justes et amènent de l’intensité à la fois dans la pièce de Shakespeare (qu’ils traduisent dans leur dialecte d’origine) et dans le film.
La caméra impose forcément son point de vue, et nous pousse à oublier pourquoi ces hommes sont enfermés, et le lieu dans lequel tout le film se déroule. En effet, la prison – plutôt sinistre – devient un espace de poésie et de liberté sans limite. Lors des scènes principales, l’espace se transforme en un lieu hors du temps, où les personnages de Shakespeare possèdent profondément les prisonniers. Cet effet est renforcé par l’alternance des couleurs et du noir et blanc – superbe, contrasté – et la musique – romantique, lyrique, héroïque – qu’il nous arrive d’oublier (donc réussie). 

Le spectateur est donc emmené dans le quotidien de ces comédiens amateurs enfermés, mais trouvant une liberté dans le théâtre. Nous voyons des humains, simplement des humains. Qui, lorsque les répétitions sont terminées, quittent le tumulte de la scène pour le silence de la cellule, se séparent de leurs collègues mais pas de leur personnage, abandonnent la liberté symbolique pour l’enfermement. Néanmoins, le documentaire souligne discrètement leur démarche de reprise de confiance en soi et, par extension, de réinsertion.
« Depuis que j’ai connu l’art, cette cellule est une prison. »
Théâtre et cinéma, réalité et fiction ne cessent donc de se croiser, de se faire écho, de s’enrichir, pour donner un film esthétiquement et symboliquement superbe.

De Paolo & Vittorio Taviani, avec Casimo Rega, Salbatore Striano, Giovanni Arcuri... Sortie le 17 octobre 2012.

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