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Croissance de la nouvelle pauvreté

Publié le 11 décembre 2012 par Copeau @Contrepoints

Alors que se tient aujourd'hui à Paris une Conférence Nationale sur la pauvreté, il est temps de comprendre les raisons de sa recrudescence : l’État Providence qui crée le chômage, développe l’assistanat et tue la charité.
Par Jacques Garello.

Croissance de la nouvelle pauvreté
Ils sont des millions. Ils sont des défis lancés à des pays riches. Ils sont la rançon de l’État Providence. Ils ont besoin et de liberté et de charité.

Hasard de l’histoire : l’expression « Nouveaux Pauvres » est entrée dans le débat public en France quelques mois après l’élection de François Mitterrand. Le Père Calvez avait prêché le Carême à Notre Dame sur ce thème en 1982, et j’avais eu l’occasion d’en débattre avec lui dans les colonnes du Figaro Magazine. C’est dire que les nouveaux pauvres ne datent pas d’hier. Ils ne sont pas non plus seulement de chez nous. Les nouveaux pauvres sont aussi ceux d’Obama, dans la lignée de ceux de Roosevelt.

J’associe volontairement socialistes et nouveaux pauvres, car c’est bien l’État Providence, que Jean Paul II appelait encore « l’État de l’assistance », qui est à l’origine de cette tare de nos sociétés pourtant si riches. De la sorte, si les nouveaux pauvres se multiplient c’est bien dans les périodes d’inconscience collective qui pousse à s’en remettre à l’État pour toutes choses. On incrimine « la crise » pour expliquer la nouvelle vague de pauvreté. C’est à tort si l’on entend par là qu’il y aurait aujourd’hui un lien avec la mondialisation et la finance. C’est vrai si l’on observe que la crise a remis en selle un État omniprésent et omnipotent, dont on avait cru se débarrasser entre 1980 et 2000 : le G20, le FMI et les autres ont eu le génie de demander aux États de réparer les dégâts d’une crise qu’ils avaient provoquée. Plus d’État c’est de nouveaux pauvres par milliers.

Mais comment l’État Providence est-il une machine à fabriquer la pauvreté ?

Il crée le chômage, il développe l’assistanat, il tue la charité.

Le chômage est le sous-produit du dirigisme. La réglementation du marché du travail, la confiscation du profit et de l’épargne, la multiplication des prélèvements et des subventions, l’hypertrophie du secteur public, privent les entreprises privées de toute possibilité d’adaptation et de création d’emploi. L’argent s’investit dans des projets sans lendemain, et la main d’œuvre n’a ni la mobilité ni la qualification voulue pour retrouver un emploi.

L’importance de la redistribution, à travers la fiscalité, les allocations et la sécurité sociale, a progressivement mis une fraction importante des Français en position d’assistés. Ainsi est né un « risque moral » : se croyant (à tort) assurés contre les pertes de revenus inhérentes au chômage, certains salariés se dispensent de tout effort non seulement dans la recherche d’un emploi nouveau, mais aussi dans la formation et l’acquisition d’une qualification qui leur permettrait d’éviter le chômage de longue durée. De plus, l’existence d’un SMIC très élevé, proche du salaire moyen en termes nets, dissuade les personnes peu qualifiées de chercher à améliorer leur position. On s’installe peu à peu dans le chômage : le chômage de longue durée concerne en France 41% des chômeurs. Il concerne les seniors sans doute, mais aussi les jeunes (un quart des moins de 25 ans au chômage). Et l’assistance se généralisant, elle affaiblit d’autant le sens des responsabilités, le goût de l’initiative et du changement.

Mais les mentalités changent aussi au niveau de personnes qui ne craignent pas pour leur emploi et leur revenu. On parle beaucoup de solidarité, mais ce qui existe surtout c’est la solidarité forcée, celle du contribuable ou du cotisant à qui l’on demande sans cesse un effort supplémentaire pour assister les gens en difficulté ou en bas de l’échelle. La solidarité volontaire s’estompe, d’abord parce que ceux qui ont les moyens de la solidarité marquent leur désintérêt pour les autres. Pourquoi s’en occuper puisque c’est l’État qui prend en charge la « justice sociale » ? En payant leurs impôts et prélèvements divers, les Français ont le sentiment d’en être quitte à l’égard de leurs concitoyens. Mais la solidarité volontaire s’estompe aussi parce que les moyens financiers diminuent avec les ponctions pratiquées par l’État. Que reste-t-il pour tendre une main secourable à ceux qui sont dans le besoin ? Les fondations charitables n’ont pas chez nous les dotations qu’elles ont à l’étranger.

À l’opposé de la solidarité forcée se trouve la charité. La charité, c’est l’amour des autres. Elle est une démarche personnelle, et non pas une obligation légale ni une procédure bureaucratique. Les étatistes n’aiment pas les « dames de charité » : n’est-il pas juste et digne d’en finir avec le don de soi pour lui substituer un droit social ? Les structures sociales et institutionnelles obèrent elles aussi la charité. Car la charité s’opère plus facilement dans les communautés familiales, professionnelles, confessionnelles ou autres. Mais n’ont-elles pas été peu à peu sapées, puis détruites par l’État Providence ?

Je ne veux pas terminer ce tableau de la nouvelle pauvreté sur une note pessimiste. Il existe encore, et de plus en plus dans cette période difficile, de vrais sentiments de charité chez un grand nombre de Français. La générosité s’exprime dans les grandes campagnes nationales comme le Téléthon, mais aussi et surtout dans les gestes quotidiens qui marquent le souci de l’autre, du voisin, du malade, du SDF. Cet autre est en souffrance, il faut lui apporter l’espoir. C’est ce que la doctrine sociale de l’Église Catholique a toujours recommandé en parlant de « la préférence pour les pauvres ». Cela ne veut pas dire que les riches sont honnis ou bannis, cela signifie que le croyant doit penser aux autres pour trouver le chemin de la vérité. La foi passe par l’amour, nous dit Benoit XVI. La préférence pour les pauvres nous rappelle que la pauvreté n’est pas l’indignité, que la richesse doit s’accompagner de l’humilité et du service. La période de l’Avent vient de commencer. Elle nous prépare à la Noël, où la Sainte Famille vient parmi les plus pauvres des pauvres pour nous permettre d’entrer dans l’Espérance.

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