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"L'enfance de Jésus" de Joseph Ratzinger - Benoît XVI

Par Francisrichard @francisrichard

Qu'est-ce que Noël? A cette question il n'est pas de meilleure réponse, et de plus opportune, que le dernier livre de Joseph Ratzinger, qui, davantage qu'à son enfance prise dans son ensemble, est surtout consacré à la naissance de Jésus.

Dans son avant-propos, le pape Benoît XVI dit d'emblée qu'"il ne s'agit pas d'un troisième volume, mais d'une porte d'entrée à [ses] deux précédents ouvrages consacrés à la figure et au message de Jésus de Nazareth".

Avec ce livre l'auteur tente humblement d'interpréter, en s'inspirant de travaux d'exégètes, ce que les évangélistes, plus précisément Mathieu et Luc, ont voulu dire à leur époque, mais aussi ce que cela peut signifier pour le lecteur d'aujourd'hui.

Ce texte, paru initialement en allemand, a pour principale vertu de mettre à la portée d'un vaste public le fruit de réfexions personnelles, mûries au fil du temps, qui demanderaient autrement des années d'études à celui qui s'y lancerait.

Ainsi montre-t-il, s'il en était besoin, qu'il n'y a pas, entre Ancien et Nouveau Testament, contradiction mais accomplissement:

"C'est seulement au moyen des nouveaux événements que les Paroles acquièrent leur sens plein et, inversement, les événements possèdent une signification permanente, parce qu'ils naissent de la Parole, qu'ils sont Parole accomplie."

Ainsi souligne-t-il, s'il en était besoin, que le royaume de Jésus, "roi des juifs", expression non hébraïque - "dans le milieu hébraïque on aurait dit "roi d'Israël"" - n'est pas de ce monde, tout en étant ouvert à tous les hommes:

"Ce règne différent n'est pas construit sur un pouvoir mondain, mais il se fonde uniquement sur la foi et sur l'amour."

Tous les textes relatifs à la naissance et aux premières années de Jésus sont ainsi reliés au passé, mis en valeur et en perspective. Et l'auteur a, de temps en temps, recours à l'étymologie pour les éclairer.

Quand l'ange annonce à Marie qu'elle sera la Mère de Dieu, il lui adresse la formule grecque chaïre qui signifie: "réjouis-toi !":

"Avec ce souhait de l'ange - pouvons-nous dire - commence, au sens propre, le Nouveau Testament."

Evangile ne signifie-t-il pas "bonne nouvelle"?

Joseph Ratzinger ajoute:

"En grec, les deux mots, joie et grâce (chara et charis), sont formés à partir de la même racine. Joie et grâce vont de pair."

Il revient sur l'expression "premier-né", qui a fait couler beaucoup d'encre malintentionnée:

"Le mot "premier-né" ne renvoie pas à une numération qui se poursuit, mais indique une qualité théologique exprimée dans les recueils de lois d'Israël les plus anciens."

Paul emploie d'ailleurs les expressions de "premier-né d'entre les morts" et de "premier-né d'entre les créatures" et Benoît XVI va dans ce sens paulinien quand il écrit:

"Dans la nouvelle naissance de la Résurrection, Jésus n'est plus seulement le premier selon la dignité, mais celui qui inaugure une nouvelle humanité."

Parce qu'il est non seulement Benoît XVI, mais d'abord Joseph Ratzinger, l'auteur se pose des questions, suggère, précise souvent qu'il s'agit d'une opinion personnelle. Qui n'engage que cet homme, dont la vie s'illustre par la recherche de la conciliation de la foi et de la raison.

A propos des anges qui chantent l'avènement du Sauveur:

"Gloire à Dieu au plus haut des cieux ..."

l'auteur rappelle que, pendant longtemps, la suite était traduite en ces termes:

"et sur la terre paix aux hommes de bonne volonté",

évoquant la liberté humaine, alors qu'actuellement la paix est souhaitée:

"aux hommes qu'il aime",

ce qui évoque plutôt la prédestination.

Joseph Ratzinger ne trouve pas justes ces deux traductions, qu'il considère comme extrêmes:

"Il me semble que la traduction littérale - "de la bienveillance" (ou de "sa bienveillance" respecte mieux ce mystère [de la condition humaine], sans le dissoudre dans un sens unilatéral."

Qui sont les hommes de la bienveillance? Les "personnes qui ont l'attitude du Fils - des personnes conformes au Christ".

Pour ceux qui l'ignorent, Joseph Ratzinger explique encore que le titre de Nazôréen, inscrit sur l'écriteau de la Croix, vient de nazir qui signifie "totalement consacré à Dieu" et de nezer, qui sgnifie "le rejeton", sous-entendu de la lignée de David et de Jessé.

De l'importance des mots...et, cependant, de la primauté de l'esprit sur la lettre.

Je terminerai par deux citations qui ont retenu mon attention.

La première a trait aux deux faits sur lesquels repose la foi chrétienne et "qui représentent un scandale pour l'esprit moderne", qui n'admet pas cette intrusion dans le monde matériel:

"La naissance par la Vierge et la résurrection du tombeau, dans lequel Jésus n'est pas resté et n'a pas subi de corruption."

La deuxième a trait à la liberté des enfants de Dieu:

"En tant que Fils Jésus apporte une nouvelle liberté, cependant pas celle de celui qui est sans aucun lien, mais la liberté de Celui qui est totalement uni à la volonté du Père et qui aide les hommes à parvenir à la liberté de l'union intime avec Dieu."

Inutile de dire que le grand pécheur devant l'Eternel que je suis a besoin de beaucoup d'aide de sa part...

Francis Richard

L'enfance de Jésus, Joseph Ratzinger - Benoît XVI, 192 pages, Flammarion

Voir également mon article du 25 avril 2011 sur Jesus de Nazareth (deuxième partie) du même auteur, aux Editions du Rocher


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