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Le cas Instagram : peut-on vendre les photos des utilisateurs d’une application mobile ?

Publié le 14 janvier 2013 par Mediassociaux-Academy

Fin décembre, Instagram annonçait un changement dans ses conditions d’utilisation lui permettant de revendre les photographies publiées par les Utilisateurs de l’Application mobile, notamment à des fins publicitaires. On imagine aisément comment les propriétaires de l’Application en sont arrivés à prendre une telle décision.
Assis sur une mine d’or : des millions de photographies prises par les usagers d’Instagram, ils ont voulu monétiser ce trésor, de la manière la plus élémentaire qui soit : en revendant tout simplement les images les plus étonnantes/belles/originales/symboliques… Manifestement sans en avertir leur service juridique, ils ont mis en application cette brillante idée, s’attirant les foudres des utilisateurs de l’Application et provoquant une vague de désinscription.
L’objet de cet article n’est pas d’analyser les retombées en terme de communication de cette annonce : elle est désastreuse, nul besoin de tirer sur l’ambulance ; et le flottement médiatique post-apocalyptique (21/12/12) a sans doute amplifié la portée de cette information, largement reprise par la presse spécialisée, et ce en dépit des excuses présentées par Kevin Systrom, co-fondateur de l’Application.
L’objet de cet article serait plutôt de démontrer pourquoi il était légalement impossible, en France, de revendre les photographies prises par les Utilisateurs d’une Application mobile, même en incluant cette possibilité dans ses conditions d’utilisation.
La cession globale des œuvres futures est nulle
Article L131-1 du code de la propriété intellectuelle.

Dès lors qu’une œuvre est dite « originale », autrement dit, qu’elle reflète la personnalité de son auteur par son cadrage, son sujet, sa composition, son éclairage, bref, qu’elle a une essence artistique, elle est protégée par les dispositions du code de la propriété intellectuelle.

Celui-ci prévoit notamment qu’il est impossible de prévoir contractuellement à l’avance et de manière globale qu’une œuvre, en l’occurrence une photographie, puisse être vendue avant même sa réalisation, sa conception.
Par conséquent mettre une disposition générale dans ses CGU du type « toutes les créations photographiques produites par les Utilisateurs de l’Application seront susceptibles d’être vendues à des tiers » est illégal.
Ainsi, si Instagram désire revendre une photographie protégée par le droit d’auteur, elle devra le faire au cas par cas, en signant un contrat de cession de droit d’auteur pour chacune des œuvres cédées.
Le droit à l’image

Outre le problème posé par la question des droits d’auteur, il ne faut pas oublier les droits du modèle de la photographie.
Dès lors qu’une personne est le sujet principal d’une photographie, son image ne peut être exploitée à des fins commerciales sans son consentement ou celui de ses représentants légaux.
Si Instagram désire utiliser l’image d’un modèle pour illustrer sa marque, elle devra signer un contrat de cession de droit à l’image avec cette dernière précisant avec exactitude pour quelle durée, sur quels supports, dans quel cadre cette cession pourra intervenir.
Le respect de l’œuvre des tiers
Article L122-4 du Code de la propriété intellectuelle

Les utilisateurs d’Instagram mitraillent toute la beauté du monde, et les créations artistiques en font partie. Elles sont un sujet de prédilection de ces photographes mobiles.
Cependant, une fois de plus, impossible de reproduire l’image d’une œuvre sans le consentement de son créateur ou de ses ayants droits ; et même avec l’accord de ce dernier (ou si l’œuvre est tombée dans le domaine public) il est toujours obligatoire de mentionner le nom de l’artiste et veiller à ce que la prise photographique ne porte pas atteinte à l’intégrité de l’œuvre.
En cela le cas d’Instagram est intéressant puisque les filtres photographiques engendrent une modification de la perception de l’œuvre, à savoir si ces modifications sont « susceptibles de porter atteinte à l’intégrité de l’œuvre », il appartiendra au juge d’en décider.


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